Le réalisme est, au XIXe siècle, incontournable pour la bourgeoisie elle-même.Voilà pourquoi on voit le réalisme émerger comme tendance, y compris très partiellement chez des auteurs ne participant pas à cette tendance. Il est impossible de comprendre Le spleen de Paris de Charles Baudelaire sans voir que la démarche est authentiquement réaliste, avec une prose portraitiste absolument éloignée des rimes décadentes des Fleurs du mal. Il en va de même chez de nombreux peintres alors.

Si l’on prend le peintre Édouard Debat-Ponsan (1847-1913), qui a été un éclectique fréquentant la haute bourgeoisie et les grandes figures politiques bourgeoises, on retrouve tout de même chez lui parfois une approche authentiquement réaliste, comme ici, avec Coin de vigne, de 1886, ou bien d’un réalisme bien plus élémentaire, une facture bien plus académique, avec Au puits (1888), Repos dans les champs, Le repos du bouvier (1893), Flirtant (1896), Le dépiquage au rouleau de pierre (1892).

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On notera Nec mergitur ou La Vérité sortant du puits, symbolisant l’affaire Dreyfus et offert à Émile Zola, lui coûtant par ailleurs une partie significative de sa clientèle.

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Gustave Brion (1824-1877) est un autre exemple de ce foisonnement réaliste. La récolte des pommes de terre pendant l’inondation du Rhin en 1852 est d’une orientation intéressante.

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Le Vainqueur de la danse du coq (Mœurs alsaciennes en 1860) de 1871 et Une scène de carnaval, ancien titre : Une Noce en Alsace sont par contre des caricatures de la peinture flamande.

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Gustave Brion sera également un éclectique et il sera même illustrateur de la première édition des Misérables, ainsi que de Notre-Dame de Paris, les classiques romantiques – et donc résolument anti-réalistes – de Victor Hugo.

Un peintre également à la croisée des chemins, à la démarche éclectique, est Jules Bastien-Lepage (1848-1884). Voici Les foins, ainsi que La faneuse au repos, ainsi que La récolte des pommes de terre, des œuvres très abouties dans son style tendant pratiquement au grotesque, à l’expressionnisme.

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Voici ce qu’en dit le critique d’art Paul Mantz à l’époque :

« Cette paysanne est un monument de sincérité, un type dont on se souviendra toujours. Elle est très hâlée par le soleil, elle est laide ; la tête est carrée et mal dégrossie ; c’est la reproduction implacablement fidèle d’une jeune campagnarde qui ne s’est jamais regardée au miroir de l’idéal. Mais dans cette laideur il y a une âme.

Cette faneuse si vraie par l’attitude, les yeux fixés vers un horizon mystérieux, est absorbée par une pensée confuse, par une sorte de rêverie instinctive et dont l’intensité se double de l’ivresse provoquée par l’odeur des herbes coupées. Le son d’une cloche, l’appel du maître des faucheurs, la tireront bientôt de sa contemplation muette. Elle reprendra son dur travail, elle rentrera dans les fatalités de la vie réelle.

Mais pendant cette rude journée, l’âme aura eu son entracte. De tous les tableaux du Salon, y compris les tableaux religieux, la composition de Bastien-Lepage est celle qui contient le plus de pensée. »

Voici également Pas mèche, Pauvre Fauvette, L’amour au village, et enfin Jeanne d’Arc ainsi que Diogène, deux œuvres vraiment puissantes, dont le réalisme techniquement efficace est déjà malheureusement mis au service du modernisme, de l’expression subjective, etc.

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On notera également Le petit colporteur endormi.

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On peut rapprocher cette dernière œuvre de deux peintures de Fernand Pelez (1848-1913), Sans asile (1883) ainsi que Un martyr ou Le marchand de violettes (1885).

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Un dernier exemple d’éclectisme tient en Rosa Bonheur (1822-1899). Cette peintre a eu un vaste succès commercial et une grande reconnaissance, devenant chevalier, puis officier de la Légion d’honneur, étant la première femme à recevoir le titre. Elle fut également Croix de San Carlos du Mexique, octroyée par l’empereur Maximilien et l’impératrice Carlotta, commandeur de l’ordre royal d’Isabelle octroyée par Alphonse XII d’Espagne, Croix de Léopold de Belgique, membre honoraire de la Royal Academy of Watercolorists de Londres et Mérite des beaux-arts de Saxe-Coburg-Gotha, etc.

Ses œuvres ne tiennent, en effet, qu’à un réalisme somme toute vide, vaguement naturaliste, montrant uniquement des animaux mais sans la dignité du réel : on est là finalement dans le pittoresque, le réalisme dévoyé. Voici Labourage nivernais (1849), qui connut un grand succès, ainsi que Veaux (1879), Muletiers espagnols traversent les Pyrénées (1875) et enfin Le Marché aux Chevaux.

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