Décembre 1981
« La question de savoir s’il revient à la pensée humaine la vérité objective n’est pas une question de la théorie, mais une question pratique.
Dans la pratique, l’être humain doit prouver la vérité, c’est-à-dire la réalité et le pouvoir, la présence de ce côté-ci de sa pensée.
Le débat sur la réalité ou la non-réalité d’une pensée, qui s’isole de la pratique, est une question entièrement scolastique. »
(Marx [seconde thèse sur Feuerbach])
« La vérité d’une connaissance ou d’une théorie est déterminée non par une appréciation subjective, mais par les résultats objectifs de la pratique sociale.
[Le critère de la vérité ne peut être que la pratique sociale.]
Le point de vue de la pratique, c’est le point de vue premier, fondamental de la théorie matérialiste-dialectique de la connaissance. »
(Mao [De la pratique])
Sommaire
De l’organisation au parti
Le mouvement
crise – restructuration – guerre
L’État impérialiste des multinationales
La contre-révolution globale impérialiste
comme contre-révolution armée
pour le maintien forcé des rapports de production
Le processus et la conduite de la guerre de transition
pour le communisme
Le prolétariat métropolitain
Le parti guérilla du prolétariat métropolitain
Le parti guérilla et la définition du programme
Le programme de transition au communisme
Crise, guerre, internationalisme
Après douze années de lutte armée, le rapport entre révolution et contre-révolution en Italie s’est redéfini et transformé, et un cycle dans l’histoire de l’Organisation communiste des Brigades rouges est définitivement fermé : le saut vers le parti posant, ici et maintenant, la solide et concrète base de la construction du Parti Communiste Combattant, instaure une rupture historique, profonde et irréversible avec le passé de l’Organisation Communiste Combattante.
La seule continuité historique possible pour les Brigades rouges est dans la rupture avec le passé, car la seule perspective stratégique est celle d’être un parti de guérilla du Prolétariat métropolitain.
« Le processus de construction politique, programmatique et de formation organisationnelle du Parti Combattant n’est pas une affaire linéaire, évolutive, confiée au temps, mais au contraire c’est un processus discontinu, dialectique, le produit conscient d’une avant-garde politico-militaire, qui dans le phénomène complexe de la guerre des classes affirme la validité de la perspective stratégique et du programme communiste qu’elle soutient et l’adéquation de l’outil organisationnel nécessaire pour les mener à bien. »
[Seconde résolution de la direction stratégique des Brigades Rouges, 1974]
Lorsque l’avant-garde politico-militaire du prolétariat métropolitain construit le Parti Communiste Combattant dans la perspective stratégique de la transition vers le communisme, c’est la synthèse historique, au plus haut niveau politique, du long processus de construction révolutionnaire et, en même temps, la réalisation concrète de son dépassement en tant qu’organisation : l’avant-garde produit consciemment la fin d’un cycle politico-organisationnel par la rupture, car ce sont là les conditions objectives et subjectives du saut vers le parti.
Le saut vers le parti est l’aboutissement d’un processus complexe de redéfinition stratégique et organisationnelle et de lutte politique qui a commencé au lendemain de la campagne du printemps 1978 à son plus haut niveau de maturité et, par conséquent, est entrée en crise la conception politico-organisationnelle qui était à la base de l’Organisation des Brigades Rouges et de toutes les Organisations Communistes Combattantes plus généralement.
La crise qui s’est ouverte après [l’enlèvement et l’exécution du chef de la Démocratie-Chrétienne Aldo Moro] [en 1978] a été caractérisée par la nécessité d’un saut à la direction-organisation des masses sur le terrain de la lutte armée, et au sein de cet axe, depuis lors, la bataille politique s’est développée au sein de l’Organisation pour construire un système d’implantation partidaire.
La première étape de ce processus complexe est celle qui, à partir de la discussion autour des Organismes de Masses Révolutionnaires, en vient à définir une critique articulée du subjectivisme dans ses différentes variantes.
La deuxième étape est celle où, partant de la critique du subjectivisme, le débat commence à se focaliser sur la question des programmes et trouve un premier point d’arrivée dans la Résolution de la direction stratégique (Ds) [de 1980].
La Campagne D’Urso, traduisant la thèse politique de la Ds 80 dans la pratique de l’intervention dans une strate spécifique du prolétariat métropolitain, définit et articule la ligne de masse correcte de l’Organisation et fixe, de manière irréversible, la substance de l’action du parti dans le contexte transitionnel à la guerre civile en cours.
La troisième étape est celle où l’action du parti se traduit par la capacité de transférer le contenu stratégique de la campagne D’Urso aux différentes couches de classe du prolétariat métropolitain.
La campagne Printemps-Été 1981 constitue le moment le plus élevé de l’action du parti car :
a) elle affirme la capacité concrète de la direction de l’Organisation sur les différentes couches prolétariennes et donc sur l’ensemble du prolétariat métropolitain ;
b) elle donne vie aux contenus stratégiques de la dialectique destruction-construction qui contre-distingue la tendance à la guerre et jette les bases réelles d’un pas en avant décisif vers la construction du système du pouvoir rouge ;
c) elle fait ressortir et renforce, par la bataille politique au sein de l’organisation, la ligne révolutionnaire de construction du parti combattant par opposition à la ligne organisationnelle-bureaucratique, qui, ne saisissant pas les nœuds politiques caractérisant la conjoncture actuelle, est inadéquate – et finalement antagoniste – à la tâche historique du saut au parti.
La Campagne Printemps-Été de 1981 sanctionne la défaite politique de cette ligne dans l’Organisation et, en établissant les conditions subjectives du saut vers le parti, achève et conclut un cycle dans l’histoire de l’Organisation Communiste Combattante Brigades Rouges.
La ligne révolutionnaire de construction du parti, en construisant, ici et maintenant, le Parti Communiste Combattant, continue et approfondit, sous différentes formes, la bataille politique contre les fausses lignes au sein du Mouvement Révolutionnaire et du Prolétariat métropolitain, pour les vaincre définitivement dans leur cadre théorique et dans la pratique, et pour renforcer et attester au plus haut niveau quant à l’unité politique sur la perspective stratégique de la transition vers le communisme.
Mais le Parti Communiste Combattant, sous la forme historiquement donnée du Parti-guérilla du Prolétariat métropolitain, représente aussi la continuité historique dans l’Organisation Communiste Brigades Rouges, dont il réaffirme et développe les références théoriques et pratiques et les principes stratégiques qui ont a été à la base depuis le début :
– la conception matérialiste de l’histoire et le matérialisme dialectique élaborés par Marx et Engels dans leur travail de synthèse de l’expérience historique du prolétariat naissant, développé par l’expérience historique révolutionnaire ultérieure : la Révolution russe, la Révolution chinoise, la Grande Révolution culturelle prolétarienne ; réaffirmée et redéfinie dans la métropole impérialiste par la théorie-pratique marxiste-léniniste des Brigades rouges qui trouve son point de synthèse maximale dans « L’abeille et le communiste ».
– Le centralisme démocratique, comme méthode par laquelle le parti affronte et résout les contradictions en son sein.
Le centralisme démocratique est, en même temps, une philosophie, une politique, un modèle d’organisation.
Sur le plan philosophique, c’est une conception matérialiste-dialectique prolétarienne, qui trouve son fondement dans la théorie maoïste de la contradiction.
Sur le plan politique c’est la défense des intérêts du Prolétariat métropolitain en tant que classe émergente…
Défense qui est mise en œuvre à travers des lignes politiques spécifiques, c’est-à-dire un ensemble de processus dialectiques de transformation synthétisés par les mots d’ordre « des masses aux masses » et « vivre dans la contradiction ».
Sur le plan organisationnel, c’est un modèle qui nie de manière antagoniste les principes de l’organisation capitaliste du travail, de la grande usine, de l’État impérialiste des multinationales.
C’est un modèle qui est construit pour donner une voix à toutes les composantes du prolétariat métropolitain.
La seule manière correcte de résoudre la lutte entre les lignes politiques, qui est le reflet, au sein du parti, de la lutte des classes – une lutte qui existera tant que les classes existeront, opposant le Centralisme Bureaucratique au Centralisme Démocratique – est celle fondée sur les principes stratégiques « unité-critique-unité » et « lutte-critique-transformation ».
Seule l’application constante et inflexible de ces principes isole la mauvaise ligne, la défait et, par conséquent, la récupère, réunissant et plaçant tout le Parti sur la bonne ligne.
La loi fondamentale de l’accumulation capitaliste est la baisse tendancielle du taux de profit.
Cette tendance, pendant toute une phase historique, s’est affirmée et développée au sein de la production et de la reproduction à une échelle élargie des cycles d’accumulation capitaliste.
Elle s’est donc concrétisée dans la production et la reproduction de crises cycliques du capital.
La dialectique qui animait ces crises était crise – restructuration – expansion des forces productives. Constamment le Mode de Production Capitaliste a actionné des contrepoids à la baisse du taux moyen de profit.
Une telle action de contrepoids pourrait avoir une efficacité pratique, quand le capital n’avait pas encore franchi toutes les étapes de son développement.
Et, en fait, tout cela a été possible dans le passage de la simple coopération à la fabrication jusqu’à la grande industrie.
La nature et le contenu des contrepoids déterminaient la nature et le contenu de la restructuration, visant à l’expansion des forces productives.
En étendant les forces productives au niveau maximum possible, sur la base de la production capitaliste, le Mode de Production Capitaliste affirmait la domination réelle du capital.
Dans le passage de la « subsomption formelle à la subsomption réelle » du travail dans le capital, la domination du capital devient exclusive et générale.
Sur la base de la domination réelle du capital, il n’est plus possible de déterminer un quelconque développement des forces productives sans briser l’enveloppe des rapports de production dominants.
La crise, de cyclique, est devenue structurelle. La baisse du taux de profit moyen, d’une tendance, devient une réalité pleinement opératoire.
La crise n’assume plus une tendance cyclique, mais devient la donnée qui caractérise en permanence l’accumulation, au point où elle se situe à l’horizon de la surproduction absolue de capital.
La dialectique qui vit désormais est nouvelle : crise – restructuration – destruction des forces productives.
La crise reste une nécessité interne de l’accumulation, mais, si auparavant cette nécessité visait l’expansion, maintenant elle vise la destruction des forces productives.
A son niveau de développement maximum, le Mode de Production Capitaliste s’est transformé d’un moyen pour l’expansion des forces productives en un moyen pour l’étranglement et la destruction des forces productives.
Ce travail d’étranglement-destruction s’identifie directement à la conservation d’une production fondée sur la valeur d’échange, alors qu’elle a atteint sa phase de déclin historique.
La dialectique crise – restructuration – destruction se révèle dans son essence : le maintien forcé des rapports capitalistes de production, de circulation et d’échange.
A ce stade, une contradiction antagoniste surgit entre les rapports de production et les forces productives. Surgit, donc, une ère de « révolution sociale ».
L’unique moyen de résoudre cette contradiction, de ramener ses termes à l’unité sur une base nouvelle et supérieure, c’est la guerre révolutionnaire.
Le contenu stratégique qui anime la guerre révolutionnaire est la révolution sociale.
Dans la phase historique ainsi déterminée, la nature et le contenu des contrepoids finalisent directement la restructuration jusqu’à la destruction.
Il ne s’agit plus, simplement, de contrer la baisse tendancielle du taux de profit moyen, mais d’imposer les raisons déclinantes d’un profit déclinant.
L’activation des contrepoids agit désormais dans une nouvelle dimension : celle de la matérialisation du rapport de guerre entre les classes.
En ce sens, la défense du taux moyen de profit se conjugue directement au rapport de guerre opérant entre les classes.
Les contrepoids ne vivent plus comme une contre-tendance pure et simple mais comme une détermination de la tendance à la guerre.
L’État, qui les soutenait auparavant pour soutenir l’accumulation, les dirige et les manœuvre désormais directement, pour produire et reproduire l’échelle fondée sur la valorisation.
Maintien forcé des rapports actuels de production, de circulation et d’échange capitalistes et étranglement – destruction des forces productives.
Ce sont les deux directives impératives caractérisant les nécessités capitalistes dans la crise structurelle du Mode de Production Capitaliste.
Il faut réaffirmer que lorsque nous disons « nécessité capitaliste », nous nous référons à l’ensemble des contradictions qui, dans la crise, saisissent le monopole multinational du capital multiproductif.
En effet, dans la phase de sa domination réelle, la dynamique et les mouvements du capital ont pour base de développement l’espace capitaliste dans son ensemble, d’où l’entière dimension planétaire, et les contradictions propres au Mode de Production Capitaliste affectent tout le système impérialiste multinational.
Dans la phase de crise générale de surproduction absolue de capital, le capital prédispose des mécanismes non plus pour surmonter de manière conjoncturelle les phases de crise cyclique, mais pour imposer les lois déclinantes du Mode de Production Capitaliste.
De tels mécanismes s’articulent intérieurement dans la guerre que la bourgeoisie impérialiste lance au niveau international contre le prolétariat international.
Dans la phase où est dominant sur toute la planète le Mode de Production Capitaliste, l’État Impérialiste des Multinationales organise et concentre la guerre contre le Prolétariat International.
La guerre inter-impérialiste elle-même n’est qu’une forme spécifique d’anéantissement du prolétariat international, alors qu’il tente de conquérir de nouvelles zones pour tel ou tel bloc.
La guerre inter-impérialiste prend la forme d’une guerre entre le bloc impérialiste et le bloc social-impérialiste.
Dans l’acquisition de nouvelles aires vit l’anéantissement du prolétariat de ces régions, dans le cadre de l’anéantissement général du prolétariat international.
La guerre contre le prolétariat métropolitain est le cœur et, en même temps, le niveau le plus élevé et le plus multidimensionnel de l’attaque de l’État impérialiste des multinationales contre le prolétariat international.
Sur cette base objective, il n’est plus possible de séparer la « guerre intérieure » de la « guerre extérieure ». La domination réelle du capital entraîne un rapport de guerre totale contre le prolétariat international.
Au sein de cette relation générale vivent des spécificités et des distinctions, non des séparations.
En ce sens, l’impérialisme est la guerre. En ce sens, la tendance aujourd’hui dominante est la guerre. Dominante dans le contenu et dans le sens que nous avons esquissé.
La domination de la guerre, telle que nous en sommes venus à la définir, signifie que la tendance principale dans le monde est la révolution.
Ceci trouve son point maximum de synthèse et d’application dans la métropole impérialiste.
En même temps, cependant, il est projeté avec des formes et des contenus spécifiques dans tout l’espace impérialiste.
C’est en ce sens – et seulement en ce sens – que la révolution empêche la guerre impérialiste.
C’est la base matérielle d’un internationalisme prolétarien redéfini et plus organique.
Des connexions organiques ont toujours lié l’État au capital ; non seulement il est produit du capital, mais il est aussi producteur de capital. Aujourd’hui, cette interaction est redéfinie qualitativement, transformant les deux termes en interaction.
L’État est constitutivement présent au cœur des rapports de production et de reproduction. Son rôle, pour la production et la reproduction de telles rapports dans la crise structurelle, devient essentiel.
Il doit désormais assurer la pérennité des rapports capitalistes et du rapport d’exploitation sous-jacente.
L’État apparaît comme un « appareil privé » de la fraction dominante qui se sépare et se détache de la « société civile ».
Bien que « déduit » du capital, il maintient un aspect « extérieur » au capital, car dans et à travers son action passe la détermination et la re-détermination des rapports de production capitalistes, des rapports sociaux correspondants.
Se détachant de la « société civile », il y revient, l’imprègne et l’occupe dans tous ses pores ; s’étant séparé de la fraction dominante, il transforme les intérêts exclusifs de cette dernière en intérêt général.
L’État affirme ici sa souveraineté absolue sur l’accumulation et les relations entre les classes.
Dans la crise permanente de l’accumulation dans la phase de domination impérialiste, le mode de vie normal devient : destruction de la force productive, au moyen de la production et la reproduction d’un rapport de guerre totale contre le prolétariat métropolitain.
Il n’y a pas de lieu de formation socio-économique qui échappe à l’intervention de l’État ; il n’y a pas de rapport et/ou de relation social qui ne soit imprégnée de son action coercitive.
Partout l’intervention de l’État détruit la force productive, afin de maintenir la domination forcée des rapports de production, de circulation et d’échange capitalistes.
C’est la « violence d’État » qui rend possible, en la garantissant, la survie de l’accumulation de la domination impérialiste.
L’État impérialiste et les rapports sociaux correspondants en coma profond, contrairement à l’émergence de relations virtuelles, infiniment plus riches et qualitativement supérieures, c’est l’État de la guerre.
Maintenant, il devient l’appareil privé de la fraction dominante de la bourgeoisie impérialiste et défend les intérêts du capital monopoliste multinational dans toutes les régions de la formation économico-sociale.
Il perd de plus en plus toute légitimité historique dans sa position d’architecte maximal, défenseur et garant du processus d’auto-valorisation capitaliste qui, aujourd’hui, ne se donne que comme étranglement et destruction des forces productives.
L’État impérialiste des multinationales est, aujourd’hui, un Etat pour guerre.
Dans la tendance, dans le développement de la guerre des classes, l’État, se réunissant autour d’un seul centre de gravitation, se transformera complètement en bande armée, comme l’a déjà identifié Lénine dans son analyse des formes de pouvoir d’État en situation prérévolutionnaire.
Seulement, aujourd’hui la situation pré-révolutionnaire s’étend sur le long terme, caractérisant toute une phase historique : la guerre des classes de longue durée.
Marx dit :
« au-delà d’un certain point, le développement des forces productives devient un obstacle pour le capital, c’est-à-dire que le rapport capitaliste devient un obstacle pour le développement des forces productives du travail ».
Dans l’époque historique actuelle, ce point est atteint ; plus précisément, l’ère actuelle se caractérise par avoir atteint ce point : le capital se place en rapport au développement de la richesse sociale, entravant le développement des forces productives.
Ayant atteint ce stade historico-social, un changement profond dans la formation économique-sociale capitaliste s’est déterminé, parce que le capital doit imposer des mécanismes déclinants de production et de reproduction de la plus-value en étranglant au lieu de développer les forces productives et la richesse sociale.
Un tel développement ne se donne plus à travers le perfectionnement des rapports de propriété, mais par leur dépassement, car il n’apparaît que comme la destruction des rapports de propriété dans toutes leurs formes possibles et nécessaires.
Le capital, alors, doit empêcher le dépassement et il ne peut le faire qu’en maintenant sa « domination exclusive et générale », la base sociale qui l’a alimenté étant en crise.
C’est précisément la conservation-imposition de la domination « exclusive et générale » du capital qui fixe les lignes et les contenus de la transformation de la formation économico-sociale capitaliste en un système impérialiste de multinationales, c’est-à-dire un système dans lequel le capital monopoliste international domine et donc la fraction de la bourgeoisie qui le représente : la bourgeoisie impérialiste.
Dans ce système toutes les régions sociales sont traversées simultanément par les mêmes impulsions, motivations, décisions et ordres stratégiques sous la domination de l’impérialisme des multinationales.
Toutes les régions y sont violemment assemblées. Tout en conservant leur relative autonomie, ils sont soumis impérieusement à un seule pressante exigence : le maintien forcé des rapports capitalistes de production, de circulation et d’échange.
Pour atteindre cet objectif nécessaire − et nécessité − au sein de l’État impérialiste des multinationales, il y a une tendance accélérée vers l’intégration totale entre toutes les fonctions, structures et organismes de pouvoir.
Plus est pressante l’impérieuse exigence de maintenir par la force la domination des rapports sociaux capitalistes, plus devient strict le processus de centralisation et d’exécution et d’intégration des décisions stratégiques, dont le champ de détermination se rétrécit de plus en plus, au point de s’identifier tout court à l’Exécutif.
La centralisation des décisions stratégiques exclusivement entre les mains de l’Exécutif leur permet d’avoir une portée étendue qui ne connaît pas de limites.
Non seulement elles sont remplies, de manière intégrée, de contenus politiques, économiques, militaires, juridiques, etc. mais elles sont transmises, appliquées, mises en œuvre, avec une égale intensité et charge contre-révolutionnaire, dans toutes les régions de la formation économique sociale transformée.
Tout cela, ensemble, rend explicite l’étatisation réussie de la formation socio-économique capitaliste.
C’est une étatisation forcée, au sens où les raisons de la conservation forcée de la domination impérialiste imprègnent et façonnent toutes les régions sociales.
À une telle étatisation correspond à l’exécutivisation de la « société civile ». Ici, il est utile de répéter que celle-ci, pour Marx, est la société bourgeoise.
Elle englobe donc à la fois les rapports de pouvoir entre classes et les rapports sociaux qui, remontant à la base économique, circulent dans toutes les régions de la formation économico-sociale capitaliste.
L’exécutivisation de la société bourgeoise signifie que les décisions stratégiques imputées à l’exécutif ont une sphère d’impact totale et totalisante.
En l’exécutant, le pouvoir de l’État impérialiste des multinationales est totalisé, tentant de se reproduire indéfiniment, façonnant et refaçonnant toute la société selon ses besoins impératifs de survie.
Le moment politique « envahit » le moment économique ; le moment militaire « envahit » le moment politique ; le moment juridique « envahit » le moment idéologique, etc. ; tous ensemble envahissent la spécificité de chacun, la déterminant depuis le début.
La contre-révolution s’arme, armant toutes les fonctions individuelles et les structures de pouvoir de l’État impérialiste des multinationales.
Les modifications internes de la formation économico-sociale capitaliste remontent jusqu’aux formes du pouvoir d’État, qui sont profondément modifiées.
À la crise des rapports de production correspond la crise de l’État dans le « capitalisme mûr » : l’une accentue l’autre, déterminant et précipitant la crise générale du système impérialiste.
En crise et soumis à la redéfinition sont les fonctions « classiques » de l’État : à la fois celle du « capitaliste collectif idéal » et celle du « vrai capitaliste ».
D’une part, ce que l’État impose « collectivement », c’est l’intérêt général « corporatif » de la bourgeoisie impérialiste.
D’autre part – et en contradiction puissante avec cela – c’est l’instrument essentiel et le porteur privilégié de l’intérêt « corporatif » partiel d’une fraction bien circonscrite de la bourgeoisie impérialiste : la bourgeoisie d’État.
Au niveau de l’État pour la guerre, des contradictions nouvelles et plus déchirantes sont introduites dans la forme de l’État ; des contradictions inter-impérialistes nouvelles et plus aiguës s’installent.
Une « lutte en coulisses » plus grande et plus féroce, de massacre mutuel, s’ouvre : la lutte entre factions et au sein d’une même coterie.
Le rôle de l’État « en tant que médiateur des conflits sociaux » qui tente de concilier « des contradictions de classe irréconciliables » est définitivement et irréversiblement en crise.
De toutes ses faces, défendant les intérêts « corporatifs », il attaque la « réalité extérieure », constituée par la formation économico-sociale, et le prolétariat métropolitain, sans réserve ni médiation, dépassant toute possibilité, désormais impossible, de réconciliation-action entre les classes.
Les structures du pouvoir et les organismes de l’État impérialiste constituent tous ensemble la « structure intégrée » de la contre-révolution mondiale armée qui est l’émanation de la contre-révolution impérialiste mondiale, constituant l’aspect spécifique à ce stade.
L’obstacle au développement des forces productives ne peut être stratégiquement mis en œuvre que par cet organisme intégré.
Cela ne signifie pas qu’il constitue une structure organisationnelle avec sa propre consistance limitée. Il traduit plutôt le niveau d’assemblage et d’interaction entre les diverses structures et organismes de pouvoir, en relation avec l’intervention de l’État impérialiste dans des zones et des conjonctions économiques uniques, dans des régions sociales déterminées et contre des couches de classe spécifiques et différentes.
Cette structure intégrée élabore et traduit en pratique, au plus haut niveau de décision, la stratégie différenciée pour la réalisation d’un seul objectif stratégique : l’anéantissement du prolétariat.
En ce sens, il concentre le feu contre le prolétariat métropolitain, en le différenciant.
En substance, il concentre la guerre contre le prolétariat métropolitain, en le différenciant selon les différentes couches de classe, et il est ainsi différencié.
La différenciation est l’anéantissement en acte : le devenir de l’anéantissement.
Au fur et à mesure que l’anéantissement progresse, la stratégie différenciée tend de plus en plus à devenir directement la stratégie d’anéantissement.
Les centres de gravitation du pouvoir de l’ennemi de classe tendent de plus en plus à se recomposer autour d’un même centre, étant donné que les fronts différenciés de la guerre tendent à se réduire à un unique front.
Dans la force réelle de cette dialectique nouvelle et complexe changent substantiellement les propriétés, les formes qualitatives, les lois du mouvement et les relations réciproques de toutes les structures et organismes de pouvoir de l’État impérialiste, parce qu’elles deviennent les pôles de l’intégration contre-révolutionnaire armée.
Conjoncture après conjoncture et au cours de la même conjoncture, la face du pôle dominant change.
Tous les pôles contribuent dans une mesure égale à l’élaboration de la stratégie contre-révolutionnaire ; un pôle ou quelques pôles mettent en œuvre cette stratégie, conjoncture après conjoncture, de manière décisive.
Ceux-ci constituent le ou les pôles dominants dans la conjoncture de la structure intégrée de la contre-révolution mondiale armée.
Avant de coopérer entre eux, les différents pôles associent chacun le complexe des fonctions extrinsèques dans leur domaine d’intervention spécifique, constituant chacun un bloc homogène.
Toutes les structures de pouvoir et les organismes de l’État impérialiste opérant dans l’économie s’associent sur une base nouvelle et à un niveau d’interaction plus élevé, constituant le pôle économique de la structure intégrée de la contre-révolution armée mondiale.
De manière analogue, le pôle militaire, le pôle juridique, etc. s’associent et se mettent en place.
Tous les pôles, se séparant et s’intégrant les uns aux autres, agissent de manière différenciée dans les différents niveaux de la structure intégrée de la contre-révolution armée mondiale.
Tous les pôles sont intégrés à tous les niveaux, mais distincts : un pôle est toujours un avec les autres et, de même, toujours distinct des autres.
C’est en vertu de cette unité-distinction que l’État impérialiste généralise la guerre, l’enracinant dans sa totalité dans tous les replis diffus du tissu social, non pas simplement pour les rendre amorphes, mais pour les plier et les subordonner, au moyen d’une guerre illimitée aux exigences du maintien forcé des rapports de production.
La rationalité despotique de la plus-value devient l’enveloppe de la guerre dont l’État impérialiste des multinationales entoure, étouffe et écrase l’entière société.
1) Le parti de guérilla que le prolétariat métropolitain entend construire n’est pas exclusivement le Parti Combattant.
Ce n’est pas un simple Parti Politique car, dans cette époque historique, le centre de gravité de l’affrontement entre les classes n’est plus placé sur le terrain politique mais sur le terrain social.
Ce n’est pas un parti exclusivement comme combattant, car la guerre de classe révolutionnaire ne signifie pas, ni exclusivement ni majoritairement, un combat militaire.
Le militaire n’est qu’une détermination de la guerre métropolitaine, dans laquelle le prolétariat et la bourgeoisie se déploient, s’opposent, s’affrontent irréductiblement en ennemis : en termes d’inimitié absolue.
La guerre n’est pas un acte final ou extraordinaire de contre-position de classe, mais elle est déjà aujourd’hui intériorisée en permanence dans toutes les régions de la formation économico-sociale, dans tout le spectre des rapports entre les classes, dans l’univers des rapports sociaux.
En ce sens, la guerre est caractérisée comme guerre totale permanente, une révolution sociale radicale et prend à cette époque historique la forme spécifique de la Guerre de Classe pour la Transition au Communisme.
La Guerre de Classe pour la Transition au Communisme, c’est-à-dire la dialectique entre la bourgeoisie impérialiste et le prolétariat métropolitain, entre révolution et contre-révolution, détermine, domine, conjoncture après conjoncture, les formes historiquement possibles et nécessaires des organismes pour la conduite de la guerre, les déterminations du Système du Pouvoir Rouge.
Il détermine la forme de combat dans chaque région de la formation économico-sociale sur les plans politique, militaire, économique, idéologique.
En ce sens, il est possible aujourd’hui de renverser l’hypothèse classique qui conçoit « la guerre comme une continuation de la politique par des moyens violents », car la position dans la contradiction politique-guerre est inversée par rapport au niveau actuel de développement de la Formation Économico-Sociale et que la politique subit également des transformations qualitatives.
Comme tous les concepts, la « politique » et la « guerre » sont socialement déterminées.
Or c’est la politique qui, en devenant un « aspect secondaire », opère de manière subalterne des lois générales imposées par la guerre.
Mais surtout, depuis que le caractère d’antagonisme absolu s’est étendu à tous les rapports sociaux, même les formes d’action subissent une métamorphose radicale.
La politique révolutionnaire devient une simple dimension – celle destructrice – de la guerre entre les classes qui, dans le contexte métropolitain, s’étend, se servant de tous les moyens, à tous les rapports sociaux.
Avec la destruction historique des rapports de production dominants, du système de pouvoir correspondant et de la division consécutive des hommes en classes opposées, se prépare et se construit la société communiste, l’abolition des classes et donc l’abolition des guerres.
Le principe maoïste de « faire la guerre pour empêcher la guerre » trouve une confirmation de plus en plus large.
2) « Les lois de la guerre sont un problème que doit étudier et résoudre quiconque dirige une guerre.
Les lois de la guerre révolutionnaire sont un problème que doit étudier et résoudre quiconque dirige une guerre révolutionnaire. »
[Mao Zedong, premières lignes de la section 1 – Les lois de la guerre sont évolutives – du premier chapitre – Comment étudier la guerre – de Problèmes stratégiques de la guerre révolutionnaire en Chine]
La révolution, c’est une guerre à la « solution finale », en ce qu’elle se pose comme le renversement historique et la destruction de l’ennemi de classe, par l’abolition violente des rapports de production.
Le système de guerre révolutionnaire est donc défini comme une « sphère complète et fermée », au sein de laquelle la révolution opère avec ses théories et ses modèles et ne permet pas de sortir de cette sphère.
« L’universel vit dans le particulier, ou la contradiction universelle vit dans la contradiction particulière.
Mais si l’on n’étudie pas cela [ce qu’il y a de spécifique dans les contradictions], il est impossible de déterminer cette essence spécifique qui distingue une chose des autres, impossible de découvrir les causes spécifiques ou les bases spécifiques du mouvement, du développement des choses [et des phénomènes, impossible par conséquent] de distinguer les choses. »
[Mao Zedong, De la contradiction]
3) Le but de la guerre est : d’exercer le pouvoir politico-militaire pour exercer le pouvoir social.
C’est donc le pouvoir social qui domine le scénario de guerre.
Dans la guerre révolutionnaire, qui vit et doit vivre dans la métropole impérialiste, la Guerre de Classe pour la Transition au Communisme s’approprie tout savoir révolutionnaire et le transforme en pouvoir social en acte.
Elle est l’activité dans pouvoir révolutionnaire qui, en détruisant le pouvoir ennemi, construit la Transition au Communisme.
Après avoir longuement scruté les horizons de la lutte des classes, la politique révolutionnaire en tant qu’activité conforme à la finalité – activité tendant dans tous les moments à la révolution – se trouve dans les conditions et dans les possibilités de créer de nouveaux horizons.
Le véritable objet de la politique révolutionnaire est maintenant la guerre des classes pour la Transition au Communisme.
Il n’y a plus de politique séparée, fonctionnellement, de la guerre. Il n’y a plus de guerre séparée, fonctionnellement, de la politique.
Maintenant, la politique et la guerre agissent, réagissent, interagissent et coopèrent au sein de nouvelles formes d’existence, dominées par la guerre.
La domination de la guerre n’a rien à voir avec la domination du militaire. Le militaire n’est en fait qu’une forme spécifique de politique et c’est la forme transitoire d’un rapport social spécifique.
La guerre des classes dans la métropole comprend l’aspect militaire comme l’un de ses aspects, mais elle ne peut s’y réduire.
Cette réduction est typique du militarisme. Les armes comme les techniques de combat sont des outils d’action révolutionnaire, des outils parmi d’autres. Mais le fondement de cette action, il faut qu’il soit toujours clair, c’est le contenu social de la transformation qu’elle poursuit.
Le Parti-Guérilla est plutôt un parti de la révolution sociale, de la révolution culturelle, de la transition au communisme.
Dans la métropole impérialiste la révolution prolétarienne est nécessairement une révolution sociale : prolétarienne dans le contenu des projections scientifiques de nouveaux rapports sociaux qui brisent le monopole bourgeois dans leur programmation actuelle, ainsi que dans les formes de pouvoir de son devenir.
Autrement dit, il parcourt tous les rapports sociaux et ne se contente pas d’en privilégier un, que ce soit l’économique ou le politico-militaire.
De telles réductions, qui survivent toutefois comme des hypothèques du passé sur le présent, doivent être vigoureusement liquidées.
Les rapports de force entre les classes ne peuvent être bouleversés en se déplaçant uniquement sur le terrain du politique, sur le plan de l’affrontement militaire et encore moins sur celui de l’économie.
Le prolétariat métropolitain doit apprendre à se mouvoir simultanément et de manière différenciée sur tous les terrains, à l’intérieur de tous les rapports sociaux.
Et ce n’est que pour détruire le système de pouvoir politique de la bourgeoisie, en premier lieu son État, que le prolétariat métropolitain doit à son tour accomplir des actes politiques.
L’acte politique par excellence est en effet le renversement du pouvoir existant et la dissolution des anciennes rapport sociaux.
Mais cet acte n’est pas l’arme ni même le but de la révolution prolétarienne : c’est au contraire sa « doublure intérieure ». Nous affirmons que le pouvoir prolétarien n’est politique que dans sa forme extérieure, alors qu’il est social dans son contenu.
Politique car il détruit l’État.
Social en ce sens qu’il construit collectivement de nouveau rapports sociaux et une nouvelle société sans classes.
4) Il n’y a plus un art de la guerre, mais l’art de la guerre sociale ; il n’y a plus de plan de guerre, mais le plan social de guerre ; il n’y a plus de séparation fonctionnelle entre « calcul stratégique » et « calcul tactique », mais les deux coexistent unis et distincts à chaque étape de l’évolution de la guerre des classes pour le communisme.
L’art de la guerre sociale matérialise le Programme de Transition au Communisme, autour duquel il s’articule de manière stricte.
En ce sens, c’est le point de direction général de la guerre révolutionnaire. C’est l’art du renversement final de l’ennemi et l’art de la construction de la transition communiste.
Le plan social de la guerre organise, dans la conjoncture et dans la variation des conjonctures, le renversement final dans les formes conjoncturelles historiquement possibles et nécessaires.
De plus : le plan social de la guerre combine stratégiquement et tactiquement l’attitude finale de l’ennemi, d’une part ; d’autre part, il conjugue dans les formes possibles le développement de la construction de la transition communiste entravé par la domination réelle du capital.
Faire le premier pas signifie, en un certain sens, commencer à faire le dernier.
5) Le plan social de la guerre, à côté de la conduite de la guerre, se rapproche de la forme absolue de la guerre.
Il se divise en actions principales, qui attaquent le pôle principal des centres de gravitation dominants du pouvoir de l’ennemi de classe.
Partant de ces hypothèses, il concentre autant que possible l’attaque en autant d’actions principales qu’il y a de pôles dominants des principaux centres de gravitation.
Par conséquent, il ne se limite pas à attaquer le cœur de l’État, mais commence à le détruire dans ses ganglions vitaux.
6) Tout cela n’est toujours pas suffisant. Au sein de la pratique sociale informée par la dialectique désarticulation-destruction de la construction, se conjuguent tous les éléments qui caractérisent l’action du Parti-Guérilla comme action multidimensionnelle.
Le Parti-Guérilla agit tout au long de l’arc des rapports sociaux. Tout en concentrant le foyer de sa pratique, de manière conjoncturelle, sur le pôle principal des centres de gravitation de la puissance ennemie, il se déplace simultanément et de manière différenciée sur tous les terrains, à l’intérieur de tous les rapports sociaux.
Tout en ayant de manière très claire « l’objectif principal », il ne néglige pas les « objectifs secondaires ». Ils sont nécessairement complémentaires « à l’objectif principal ». Ils vivent autour et à l’intérieur de celui-ci et, par essence, le constituent.
C’est dans cette dialectique que s’établissent la durée et le rythme de la campagne.
Rythme qui se développe sur une période de temps prolongée : le temps nécessaire pour atteindre l’objectif principal sur lequel repose la campagne.
Dans le fondement de la campagne réside le principe stratégique : « agir le plus vite possible », au sens de savoir identifier et frapper l’un des centres de gravitation du projet impérialiste dans la juste dialectique de désarticulation-destruction-construction.
De plus : c’est également dans le devenir de la campagne que vit le principe stratégique « agir le plus vite possible », au sens de savoir saisir et approfondir, à travers des objectifs diversifiés, la contradiction dans chacune des sphères des rapports sociaux, en faisant vivre la juste dialectique désarticulation – destruction – construction à chaque fois au plus haut point.
En ce sens, la Campagne, plus qu’aux vagues concentriques d’une pierre jetée à l’eau, ressemble aux mille vagues qui se croisent, se heurtent, se renforcent, de nombreuses pierres jetées à l’eau.
Agir le plus rapidement possible, c’est combler de façon accélérée la distance qui sépare le premier du dernier pas de la guerre, c’est donc la rapprocher de sa forme absolue, de la révolution absolue, aujourd’hui historiquement possible comme une révolution qui investit et transforme tout l’éventail des rapports sociaux, absolu parce qu’il clôt définitivement les comptes d’une entière époque historique.
Le point de vue stratégique est la guerre de classe de longue durée pour le communisme.
La perspective immédiate qui doit traduire immédiatement et dans les formes historiquement déterminées le point de vue stratégique, ce sont les campagnes de décision rapide. Tant au moment de leur fondation qu’au cours de leur développement.
Concentration-accélération signifie pour une partie du prolétariat métropolitain être le pouvoir.
Exister en tant que pouvoir signifie faire vivre le pouvoir rouge, le légitimer et le légaliser.
Légaliser et légitimer le pouvoir rouge, c’est « rendre superflu » toute forme de pouvoir, l’éteindre. La seule forme de légalité historiquement justifiée est la légalité révolutionnaire, puisqu’elle est l’abolition de la légalité.
7) Dans la métropole impérialiste, la préservation de ses propres forces et l’anéantissement de celles de l’ennemi ne renvoient pas à deux phases distinctes de la guerre : d’abord la défense stratégique, ensuite la contre-offensive stratégique.
Conserver pour anéantir et anéantir pour conserver caractérise, du début à la fin, la conduite de la guerre dans la métropole impérialiste.
Dans un contexte historique où, comme le dit Mao, « les forces de la réaction sont puissantes et les forces de révolution grandissent progressivement », la guérilla est toujours dans une position de défense stratégique.
Elle vit en condition d’encerclement stratégique dans le rapport de force générale.
La contre-offensive stratégique signifie produire, dans un rapport de force général défavorable, un rapport de forces particulièrement favorable. Cela signifie briser l’encerclement, encercler les encercleurs. Encore et encore.
La guerre révolutionnaire métropolitaine se caractérise, d’une part, par « l’absence d’une ligne stable de front ». L’instabilité des lignes entraîne une mobilité élevée des forces combattantes. En ce sens, la guerre révolutionnaire est une guerre de manœuvre.
D’autre part, elle conquiert immédiatement des rapports de pouvoir plus favorables : c’est-à-dire qu’eme conquiert et occupe des positions de pouvoir de plus en plus stables.
En ce sens, la guerre révolutionnaire est aussi une guerre de position.
L’attaque de position compte ici comme une imposition de pouvoir.
La manœuvre rend le champ de bataille illimité ; la position confère au champ de bataille un caractère de stabilité illimitée.
En d’autres termes, les lignes de front tendent à la stabilité et les directions opérationnelles se stabilisent : tous les facteurs d’instabilité sont progressivement éliminés et régularisés. Tout cela contribue à l’ouverture d’une nouvelle phase plus délicate : la guerre civile qui se déroule pour le communisme.
Sur cette base se font les connexions qui, dans la métropole impérialiste, s’articulent avec les lignes de guerre.
Le centre de la guerre – la métropole impérialiste – n’est pas seulement le territoire de l’État impérialiste en guerre, mais aussi du Prolétariat Métropolitain en Armes.
C’est une forteresse pour les deux.
Avec une différence substantielle : alors que l’État impérialiste en guerre veut garder le Prolétariat Métropolitain enchaîné à la place forte, pour l’y maintenir, le Prolétariat Métropolitain en armes veut détruire l’État impérialiste et, par conséquent, faire sauter la place forte.
Les lignes de guerre sont internes-externes pour les deux, à la fois se déplaçant et se faisant face sur le même territoire. Les lignes internes et externes se prolongent et s’interpénètrent.
Les opérations par lignes internes et les opérations par lignes externes ont lieu en même temps et dans le même espace : entre elles il y a co-temporalité spatio-temporelle, et pourtant distinction dialectique.
Le Prolétariat Métropolitain en armes est à l’intérieur de la place forte. Il est invisible pour l’État impérialiste en guerre et visible pour les masses : l’un est le résultat de l’autre. Néanmoins, il se révèle aux yeux de l’État impérialiste en guerre en s’extériorisant comme pouvoir.
Il s’extériorise pour attaquer et détruire l’État impérialiste en guerre.
Détruire la place forte signifie sortir de la place forte, signifie la transition au communisme.
Atteint ce pic, le niveau maximum d’invisibilité coïncide avec le niveau maximum d’extériorisation et devient immédiatement et définitivement visible. Le système de pouvoir rouge devient visible parce qu’il organise le passage au communisme dans la guerre des classes.
L’avenir de la guerre de classe – le communisme – vit déjà dans le présent de la guerre des classes.
L’avenir de l’État, c’est qu’il n’y aura plus d’État. L’avenir de la guerre des classes est qu’il n’y aura plus de guerre.
8) Dans les campagnes de décision rapide, le passage rapide est : de l’invisibilité à l’extériorisation.
Les campagnes de décision rapide constituent « l’extériorisation de l’invisibilité » du pouvoir rouge.
En extériorisant – c’est-à-dire en imposant – le pouvoir, elles assurent la victoire à la fois sur le terrain stratégique et dans la succession des batailles. À travers de telles campagnes, le Prolétariat Métropolitain en armes est à l’attaque dans toutes les conjonctures et dans les variations des conjonctures.
Il y a plus. Elles font vivre le déploiement des combattants en fonction de l’élargissement du théâtre de guerre, prolongeant à la fois les effets directs de la guerre, par le renversement en acte de l’ennemi, et les effets indirects, par la dissuasion.
Les campagnes de décision rapide se déroulent en batailles partielles, tournant autour du même centre de gravité. L’unité des batailles est l’unité entre les actions principales et les actions secondaires.
Entre actions principales et actions secondaires s’établit une interconnexion nécessaire en mouvement perpétuel, dans la mesure où, au cours de la conjoncture et dans le changement des conjonctures, le pôle principal des centres de gravitation du pouvoir de classe ennemi se transforme en un secondaire, et vice versa.
En fait, les premières attaquent le pôle principal, les secondes, les pôles secondaires dans leur devenir principal.
Le dédoublement nécessaire actions principales – actions secondaires permet, dans le déroulement de la guerre de transition au communisme, de détruire les principaux pôles du pouvoir de l’ennemi de classe dans leur changement de visage : dans leur visage d’aujourd’hui et de demain.
Dans le devenir de la guerre de classe de longue durée pour le communisme s’élargit l’unité dialectique au sein des campagnes de décision rapide : le principe d’extériorisation s’affirme toujours à plus grande échelle.
Des campagnes de décision rapide articulées pour des batailles partielles, on passe à des campagnes articulées comme de grandes batailles.
Par la réalisation du principe d’extériorisation, les tensions et l’ampleur des conséquences intrinsèques de la guerre tendent donc de plus en plus à l’extrême. La réalisation des campagnes comme de grandes batailles marque le passage à la guerre civile déployée pour le communisme.
9) Engels déclare :
« L’armée est l’organisation qui représente le mieux l’État du futur ».
Nous voyons de la qualité dans la métropole impérialiste. L’Armée rouge se présente comme un organe de l’exercice à plus grande échelle de la dictature du prolétariat pour le communisme.
Elle représente, mieux que tout autre organisme, les intérêts de classe et la sphère d’action de l’État dictatorial du prolétariat.
À travers l’armée rouge la possibilité − nécessité d’imposer − exercer le pouvoir devient la capacité de l’armée du pouvoir révolutionnaire, opérativité multidimensionnelle du pouvoir révolutionnaire.
L’Armée rouge est donc l’organisme par excellence de la guerre révolutionnaire. En ce sens, c’est l’organe le mieux adapté à la solution finale.
Par conséquent, comme l’a dit Engels, c’est l’organisation qui représente le mieux l’État du futur : l’État qui, en renversant l’État impérialiste dans la guerre, s’abolit.
En tant que tel, c’est un moyen inéluctable de construire la dictature du prolétariat pour le communisme, car il élimine la dictature du prolétariat.
Un système de pouvoir rouge qui, dès le départ, ne se donne pas cet organe, qui ne constitue pas sous les formes possibles et nécessaires cet organisme spécifique qui ne peut être éliminé, ne peut se construire.
L’Armée rouge est aussi le but inéliminable auquel la construction du système de pouvoir révolutionnaire doit tendre dès le début.
Le système du pouvoir révolutionnaire en formation renvoie, du début jusqu’à la fin, à la formation de l’armée rouge.
Dans le rapport entre le système de pouvoir révolutionnaire, ou la dictature du prolétariat en construction, et son organe suprême, ou l’armée rouge, la dialectique politique révolutionnaire-guerre connaît son point culminant : le pouvoir révolutionnaire crée son organe, l’organe du pouvoir développe la révolution révolutionnaire pour abattre toutes les formes de pouvoir.
10) Dans la métropole impérialiste, l’Armée rouge est autant l’organisme par excellence pour la dissolution du pouvoir bourgeois que pour la dissolution de toute forme de pouvoir possible.
Le Prolétariat Métropolitain armé y est recomposé en classe : l’Armée rouge est l’organe suprême de la recomposition prolétarienne.
En elle vit la recomposition de toutes les pratiques sociales.
En elle vit l’individu social prolétarien qui, transformant l’ensemble de la société, se transforme lui-même et, par conséquent, ses organes de savoir-pouvoir.
L’Armée rouge est l’ultime scorie de l’ancienne société, mais aussi le premier organe qui constitue la nouvelle.
Le savoir prolétarien, reconnectant les projectualités sociales du programme, est directement lié au pouvoir ; l’exercice du pouvoir va de pair avec les mille connaissances du passage au communisme.
L’unité du savoir et du pouvoir est l’unité de la planification sociale et de la transformation sociale.
L’Armée rouge est l’organe le mieux adapté à ce travail de projection-transformation, tant par sa qualité de totalité organique que par ses articulations réelles.
L’Armée rouge est l’organe de la révolution sociale.
C’est le prolétaire que nous avons armé de mille savoirs et de mille pouvoirs, organisés et recomposés en une totalité sociale irréductible à la domination impérialiste.
Ce n’est pas une « [organisation] armée », mais un savant armé. Ce n’est pas le pouvoir des armes, mais l’arme qui, sachant, peut et, si elle est capable, sait.
Marx dit :
« La révolution seulement politique laisse debout les piliers de la maison ». En tant qu’organe suprême de la révolution sociale, l’Armée rouge fait s’effondrer les piliers de la maison, parce qu’elle prend « le point de vue d’ensemble ».
L’avancée de l’Armée rouge sur les fronts illimités de la guerre des classes pour le communisme est l’avancée de l’émancipation politique vers l’émancipation sociale.
Le prolétariat métropolitain est le résultat de trois mouvements interactifs produits par la crise :
a) la production – restructuration qui est une nouvelle localisation de la base productive qui conduit à l’effondrement continu de la classe ouvrière, c’est-à-dire à la contraction de ses chiffres productifs et à la croissance des marginaux et/ou salariés ;
b) la haute mobilité-circulation de chaque prolétaire parmi les différentes figures qui devient une donnée caractérisante et généralisée de la condition prolétarienne ;
c) la crise d’influence de l’idéologie bourgeoise et révisionniste, et en particulier de certains mythes tels que la capacité du capital à assurer un processus graduel et sûr, l’éthique du travail, etc. l’affirmation d’une conscience communiste, transgressive, résolument tournée vers l’avenir.
C’est le caractère irréversible et général de la crise qui sous-tend l’intérêt irréversible et prolétarien de toutes les figures du Prolétariat Marginal, en tant que classe, à bouleverser le Mode de Production Capitaliste actuel.
Cela ne signifie pas que le travail productif maintienne objectivement sa position centrale au sein du prolétariat métropolitain et que, par conséquent, les travailleurs productifs aient une centralité politique ou une direction révolutionnaire dans le processus de recomposition de la classe.
Il s’ensuit que les autres figures prolétariennes (marginalisées, improductives, etc.), en tant que fragments de l’effondrement de la classe ouvrière dans le devenir de la crise, ne sont pas du tout configurées comme ses alliées « extérieures » mais plutôt comme des stratifications internes d’une seule classe : le prolétariat métropolitain.
Dans ce cadre, nous pensons que le recours au concept révisionniste et gramscien d’« hégémonie » qui présuppose la séparation de la classe ouvrière des autres figures prolétariennes et l’assujettissement de ces dernières à ses intérêts est erroné.
Comme le dit Gramsci, « le fait de l’hégémonie présuppose indubitablement que les intérêts et les tendances des groupes sur lesquels s’exercera l’hégémonie soient pris en compte, qu’un certain équilibre de compromis se forme » : mais il s’agit précisément d’un compromis, d’une « médiation » entre des intérêts substantiellement différents.
La classe ouvrière, pour faire court, c’est autre chose !
C’est précisément ce que nous nions aujourd’hui, quand nous affirmons que le Prolétariat Métropolitain est « unité du multiple à dominante ouvrière », quand nous affirmons qu’il inclut tous les ouvriers productifs, les travailleurs manuels, l’armée industrielle de réserve, les couches prolétarisées et en voie de prolétarisation et qui, à ce titre, constitue la grande majorité de la population de notre pays.
En conclusion, la recomposition du Prolétariat Métropolitain autour de la figure de l’ouvrier masse métropolitain ne peut se faire sans que les différentes strates qui le composent se nient et dépassent leurs particularités ; de même la classe ouvrière de cette recomposition ne fait que se nier en tant que force de travail qui valorise le capital.
La méconnaissance du concept de Prolétariat Métropolitain conduit les camarades à le remplacer par la catégorie de « peuple » comme sujet du processus révolutionnaire dans la métropole.
Cette catégorie rappelle d’une part la théorie tiers-mondiste des « fronts populaires » et d’autre part la notion maoïste bien connue. Dans les deux cas, le peuple désigne un ensemble de classes différentes dont l’unité politique est déterminée par la classe ouvrière.
Or, comme nous l’avons vu, dans la crise historique générale du mode de production capitaliste, le prolétariat métropolitain n’est pas du tout configuré comme un ensemble de classes, et le parti n’est pas non plus l’avant-garde de la classe ouvrière seule.
Le processus de recomposition du prolétariat métropolitain est en fait la refonte politique des différentes couches en une seule classe.
Au contraire, le concept de peuple fait allusion à une « médiation » des intérêts séparés de la classe ouvrière avec ceux propres aux autres classes. C’est pourquoi nous pensons qu’il est incorrect de parler d’une « guerre civile populaire de longue durée ».
Il n’est pas superflu de rappeler que dans la métropole impérialiste caractérisée par la domination réelle du capital sur le travail et sur tous les rapports sociaux, la forme et le contenu de la révolution prolétarienne coïncident et se concrétisent dans la pratique sociale du passage au communisme.
Au contraire, dans les révolutions bolchevique et chinoise, en raison du manque de coïncidence de forme et de contenu, différentes alliances de classe étaient possibles dans les « fronts populaires » sous l’hégémonie de la classe ouvrière ; c’est-à-dire qu’il était possible que les contenus bourgeois-démocratiques soient mis en avant avec une forme prolétarienne.
Un exemple en est le slogan « la terre aux paysans » lancé pendant la révolution de 1917 par le parti bolchevique, qui a manifestement un caractère démocratique-bourgeois dans la revendication de la propriété individuelle de la terre.
La non-coïncidence entre la forme et le contenu de la révolution en Russie et en Chine s’explique par le fait que ces processus révolutionnaires se sont développés dans des sociétés caractérisées par la « domination formelle » du capital sur le travail et les relations sociales, c’est-à-dire caractérisé par le fait que le capital s’est imposé dans les rapports de production, mais pas encore dans tous les rapports sociaux.
Il est évident que dans la métropole impérialiste, et donc aussi dans notre pays, reproposer ne serait-ce que tactiquement les schémas élaborés par les partis communistes dans d’autres phases du développement capitaliste n’est pas seulement une erreur théorique mais conduit à proposer une stratégie révolutionnaire totalement inadéquate eu égard aux nouveaux niveaux de pénétration du capital dans tous les rapports sociaux.
En fait, il s’agit de diriger un processus révolutionnaire qui met immédiatement à l’ordre du jour le passage au communisme.
1. Dans cette conjoncture, le saut vers le Parti est une nécessité objective, imposée par le rapport révolution-contre-révolution.
C’est à travers le saut vers le parti que peut être donnée la solution révolutionnaire du rapport de guerre totale et sédimentée entre les classes.
Ce saut n’est pas un acte volontariste des Organisations Communistes Combattantes, mais plutôt le résultat inévitable du rapport historiquement déterminé entre la révolution et la contre-révolution dans cette conjoncture.
Il traduit dans le rapport de force entre les classes la stabilisation objective de ce rapport permanent d’hostilité absolue qui s’est établi entre les classes.
A son tour, l’inimitié absolue est le reflet de la crise du Mode de Production Capitaliste dans la phase de domination réelle du capital, une phase dans laquelle tous les rapports de production capitalistes, afin de se préserver, produisent et reproduisent la guerre totale contre le Prolétariat Métropolitain, à tous les niveaux de la formation économico-sociales et dans tous les interstices des rapports sociaux.
C’est seulement le Parti qui, dans la conjoncture modifiée, peut activer et élargir la construction du système de pouvoir rouge. Agir simplement comme un Parti, le propre des Organisations Communistes Combattantes, ne suffit plus.
Le saut relevant de l’époque vers la transition communiste, à la construction et au libre développement unilatéral de l’individu social communiste exige le saut vers le Parti : l’un rappelle sans équivoque et rigoureusement l’autre.
Sans saut vers le Parti, pas de construction du Système du Pouvoir Rouge, pas de dictature du prolétariat, pas de transition vers le communisme.
2. Le saut au Parti permet d’organiser et de déployer la finalité de la transition vers le communisme.
Pas seulement, il active et développe tous ses leviers et organes. Encore : il façonne toutes ses déterminations.
Enfin : il rassemble le prolétariat métropolitain comme sujet social du processus révolutionnaire, comme classe universelle qui, en s’émancipant, émancipe l’ensemble de l’humanité.
Liquider aujourd’hui le saut au Parti signifie liquider la guerre des classes pour le passage au communisme, liquider les tâches historiques et stratégiques que la conjoncture impose.
Prolonger le saut du Parti vers un avenir incertain et vague, c’est échouer dans sa propre fonction d’avant-garde et pratiquer une ligne de masse historiquement dépassée, qui sait et parle de propagande armée, quand, en réalité, il s’agit de commencer à organiser la guerre d’émancipation du travail capitaliste.
Agir en tant que Parti à ce stade signifie construire le saut vers le Parti. Cela signifie devenir et être un Parti.
3. Le fait d’avoir identifié et indiqué la nécessité objective du saut vers le Parti n’épuise pas l’acte de fondation politique du Parti ni ne précise déjà la forme que le Parti doit revêtir historiquement.
La forme du parti révolutionnaire est toujours historiquement déterminée et, par conséquent, change avec le changement des époques historiques et des formes et qualités correspondantes que revêt le processus révolutionnaire.
En ultime instance, la forme du Parti est toujours déterminée par le rapport qui s’établit entre les rapports de production et les forces productives, puisque c’est ce rapport spécifique qui, en régulant la production et la reproduction de la richesse sociale, régule et façonne le progrès, les formes et les objectifs de la révolution.
La forme du Parti doit toujours être dimensionnée et fabriquée en fonction de cette tendance, formes et objectifs. Elle ne prédétermine rien, mais elle est déterminée.
À son tour, elle se conforme à ces lois objectives, en les interprétant scientifiquement, en modelant la stratégie révolutionnaire, en la convertissant en un programme et une projectualité sociaux, en une organisation révolutionnaire des masses.
4. Dans l’époque historique actuelle où les rapports de production dominants constituent le plus grand obstacle au développement des forces productives, une époque de révolution sociale prend et doit prendre le relais.
Avec cela, le processus révolutionnaire est amené à fondamentalement se qualifier pour avoir un caractère social.
En vertu de l’antagonisme structurel entre les rapports de production dominants et les forces productives, le processus révolutionnaire dépasse la sphère du politique pour se configurer d’emblée comme une révolution sociale.
Marx observe d’ailleurs déjà : « L’intelligence politique est précisément intelligence politique, c’est qu’elle pense à l’intérieur des limites de la politique… Plus elle est aiguë, plus elle est vivante, moins elle est capable de comprendre les maux sociaux…
Plus l’intelligence politique est unilatérale, c’est-à-dire (…) plus parfaite, plus elle croit à l’omnipotence de la volonté et plus elle est aveugle aux limites naturelles et spirituelles de la volonté, et plus elle est incapable de découvrir la source des maux sociaux ».
Et encore : « Tant que les prolétaires pensent sous la forme politique, ils voient les raisons de tous les maux dans la volonté et tous les remèdes dans le pouvoir et le renversement d’une forme déterminée d’État. La volonté politique cache les racines de la pauvreté sociale, fausse la compréhension de leurs véritables desseins ; leur intelligence politique trompe leur instinct social ».
En continuant à se référer à Marx, il convient de noter que « la nature politique commune est la nature de l’État ».
Le but de la révolution est la conquête de l’État. Le maintien du pouvoir d’État conquis transforme la classe dirigeante en un oppresseur féroce : l’État est toujours – et ne peut manquer d’être – un instrument d’oppression d’une classe sur une autre.
5. La nature de la révolution prolétarienne dans la métropole n’est pas la conquête du pouvoir politique, mais le renversement résolu de toute forme de pouvoir et, avec cela, de toute forme d’État.
La révolution sociale prolétarienne sait que « la vie humaine est plus universelle que la vie politique » et, par conséquent, maintenant elle peut et doit dissoudre non seulement l’État impérialiste pourri mais aussi la marche de la société capitaliste.
Le communisme a besoin de l’acte politique de la conquête du pouvoir, « comme il a besoin de destruction et de dissolution ». Toutefois « là où commence son activité organisatrice, là où se manifestent son but et son âme, là il jette son enveloppe politique ».
La révolution prolétarienne utilise la politique comme une « coquille », pour affirmer le contenu social du saut d’époque pour la communauté réelle. Au fur et à mesure que ces contenus sont affirmés, l’enveloppe elle-même est rejetée et jetée dans la poubelle de l’histoire.
La révolution sociale prolétarienne est la mort de la politique qui, en tant que « totalité abstraite », dominait autrefois les voies de la révolution.
Des voies qui qualifiaient pourtant les révolutions bourgeoises, étant donné que celles-ci et seulement celles-ci faisaient sien le point de vue de l’État.
La révolution sociale prolétarienne rompt résolument avec cette tradition, car elle adopte le point de vue de la totalité concrète, c’est-à-dire la société et le sujet social de l’émancipation universelle des forces productives, à partir de la fondamentale : l’homme.
6. « La révolution n’est donc pas seulement rendue nécessaire parce qu’elle est le seul moyen de renverser la classe dominante, elle l’est également parce que seule une révolution permettra à la classe qui renverse l’autre de balayer toute la pourriture du vieux système qui lui colle après et de devenir apte à fonder la société sur des bases nouvelles. » (Idéologie allemande)
Fonder la société sur de nouvelles bases signifie le communisme.
Dans ce saut vit le passage « du règne de la nécessité au règne de la liberté ». Dans ce saut vit le passage de la préhistoire à une histoire vraiment et entièrement humaine.
Tout cela n’est possible qu’en rompant les rapports de production capitalistes, les rapports sociaux correspondants, la division capitaliste du travail, etc.
Déjà Engels, prenant la Commune de Paris pour exemple, disait que l’état de dictature du prolétariat n’était pas un état au sens propre du terme, mais une communauté, puisque, en abolissant les classes et en s’éteignant, il réunit les individus en une communauté réelle, non plus séparée de la société et au-dessus d’elle, comme l’était l’État.
Dans la transition vers le communisme, la communauté signifie la réunification de toutes les pratiques sociales de destruction-construction, la réunification du savoir avec le pouvoir.
Cette réunification traverse toutes les déterminations du Système du Pouvoir Rouge, de ses agents et de ses organes.
Construire la transition vers le communisme, c’est aussi construire des individus sociaux communistes et les pratiques de savoir-pouvoir de destruction-construction.
Ici, à ce seuil, le processus révolutionnaire est porté à sa plus haute expression. Après tout, Marx lui-même met en garde : « L’antagonisme entre le prolétariat et la bourgeoisie est une lutte classe contre classe, une lutte qui, portée à sa plus haute expression, à une révolution totale ».
7. Dans la métropole, la sphère du politique est inadaptée à la complexité et au caractère général du processus révolutionnaire.
Ainsi, le Parti ne peut avoir une forme exclusivement et éminemment politique.
Le « pouvoir des armes » et leur langage n’évoquent pas le pouvoir absolu et le savoir-faire qui réunit les pratiques sociales, le « pouvoir absolu ».
Par conséquent, le Parti ne peut revêtir une forme exclusivement combattante.
« Dans la métropole impérialiste, la naissance de la guérilla a été d’emblée caractérisée comme unité dialectique du politique et du militantisme.
Non plus « les deux fusionnant en un », mais « un qui se divise en deux ».
Non plus un parti d’un côté et une armée de l’autre, mais un parti guérilla.
Le parti guérilla que le Prolétariat Métropolitain entend construire n’est pas un simple parti politique, de même qu’il n’est pas exclusivement un parti combattant.
Ce n’est pas un simple parti politique, comme le Parti bolchevik et le Parti communiste chinois, car en cette époque historique le centre de gravité de l’affrontement entre les classes ne s se place plus sur le terrain politique, mais sur le plan social.
Ce n’est pas un parti exclusivement combattant parce que la guerre de classe révolutionnaire ne signifie pas, principalement, ni exclusivement le combat militaire. »
Voici la base et le principe inspirateur de la forme Parti dans la métropole.
Le Parti assume la forme sociale de la guérilla, laquelle est sociale, parce qu’elle a réunifié en son sein toutes les pratiques sociales.
8. La guérilla est l’agent maximum de l’invisibilité et de l’extériorisation du savoir-pouvoir du prolétariat métropolitain : invisibilité à l’ennemi et extériorisation contre l’ennemi coexistent en son sein au plus haut niveau de synthèse.
Cela signifie que plus le Parti est invisible et externe à la contre-évolution impérialiste mondiale, plus il est visible et devient interne au Prolétariat métropolitain : c’est-à-dire plus il communique avec le Prolétariat Métropolitain.
Il communique les rapports de pouvoir, les relations sociales, les pratiques de savoir, les pratiques de pouvoir.
Sur ce plan le Parti Guérilla est le Parti de la communication sociale.
Cela lui permet d’organiser, de recomposer et de transformer la spontanéité du prolétariat métropolitain en unité du multiple qui palpite et s’enrichit au sein du Système du Pouvoir Rouge.
Celui-ci, à son tour, rétroagit à l’égard du Parti en le transformant.
La dialectique réelle en tension de savoir-pouvoir qui se dégage de la dictature du prolétariat en construction transforme ainsi les transformateurs.
Non seulement cela : plus le couple invisibilité-extériorisation fait affirmer les contenus sociaux du pouvoir rouge, plus la forme du Parti devient visible, plus devient alors visible la forme du passage au communisme.
Plus la transition devient visible, plus le caractère transitoire de la nécessité du Parti devient visible.
De même que la dictature du prolétariat est la dernière forme de pouvoir possible et nécessaire, de même que l’Armée rouge est la dernière forme de l’armée, de même le Parti guérilla est la dernière forme possible et nécessaire du parti.
Les classes abolies, État, Armée et Parti disparaissent. Les contradictions sociales n’auront plus un caractère antagoniste. Par leur résolution, les hommes sociaux, comme le dit déjà Marx, affirmeront leur domination consciente et définitive sur la nature et sur leur propre nature.
La capacité de jouissance signifiera la jouissance au plus haut niveau naturel, humain et social ; la capacité de jouissance et de jouir signifiera le développement unilatéral des jouissances sociales humaines.
Pour la première fois, une communauté sociale humaine introduira la « fête » dans la relation entre l’homme social – nature. La même nature elle-même sera pour la première fois entièrement humaine et sociale.
9. Le Parti guérilla insère dans ce cadre propre à une époque la désarticulation-destruction de l’État impérialiste d’une part, et la conquête-organisation du prolétariat métropolitain sur le terrain de la guerre de transition pour le communisme d’autre part.
Hors de ce cadre, aucune dialectique destruction-construction ne peut être donnée.
Ce sont ces finalités propres à une époque qui rendent la dialectique destruction-construction objectivement possible et subjectivement organisable.
À son tour, cette dialectique projette et fabrique dans le présent concret, pour ainsi dire, la finalité propre à l’époque sous sa forme historiquement déterminée.
Le Parti guérilla est au centre d’un travail incessant de traduction de la finalité propre à l’époque en pratiques sociales. Et vice versa.
En ce sens, le Parti guérilla est le porteur dans « l’abstrait » à la fois du Programme de Transition au Communisme que de la traduction conjoncturelle de celui-ci dans le Programme Politique Général de conjoncture.
C’est un chemin de l’abstrait au concret. Son chemin est aussi le sien qui, partant de la pratique et convertissant le programme en pratique, s’élève du particulier au général.
Aller du concret particulier au général signifie partir du prolétariat métropolitain pour arriver au Parti. Aller de l’abstrait au concret, c’est partir du Parti pour revenir au prolétariat métropolitain.
Dans cette dialectique complexe et riche, donc, sont présents non seulement le Programme de Transition au Communisme, c’est Programme Politique Général de Conjoncture, mais un autre élément décisif doit être inséré : les Programmes Immédiats spécifiques du pouvoir, puisqu’ils se réfèrent concrètement à ses besoins immédiats du prolétariat métropolitain.
Lorsque nous parlons de définition des programmes, nous entendons faire référence à cette dialectique complexe et à tous ses éléments en interaction.
La définition des programmes vit dans cette interaction toujours mouvante.
Et dans cette interaction, dans le développement concret de la guerre des classes et spécifiquement des interconnexions qui s’inscrivent, déplacent et transforment la dynamique entre toutes les déterminations du Système du Pouvoir Rouge : Parti, Organismes des Masses Révolutionnaires, Mouvements de Masses Révolutionnaires.
Inextricablement, la définition des programmes renvoie à la construction de la ligne de masse, puisque les programmes peuvent uniquement vivre que dans le concret de la théorie-pratique révolutionnaire qui organise et transforme la « spontanéité des masses ».
La dimension des programmes – de celui général à celui cyclique jusqu’à celui portant sur l’immédiat – est unitaire.
Néanmoins, il y a des distinctions en son sein. Le rapport qui lie les différents programmes entre eux est donc dialectique, d’unité-distinction.
Cela signifie qu’il n’est pas possible d’abord de définir un programme, puis un autre et les autres. Chaque programme considéré individuellement renvoie nécessairement à tous les autres : en lui-même, il est incomplet.
C’est dans la définition des programmes que chaque programme commence à trouver son caractère de complétude mature. Commence à trouver, disions-nous, car tous cherchent et ne peuvent trouver « leur plus mûre identité que dans la lutte révolutionnaire ».
On peut conclure que la définition des programmes et la conquête pour leur part d’un caractère mature de classe-identité s’inscrit au plus haut niveau d’unité du rapport théorie-pratique.
La définition des programmes qualifie l’essence du Parti et le distingue des autres déterminations du Système du Pouvoir Rouge. En ce sens, il n’y a pas de Parti sans définition des programmes.
La définition des programmes qualifie et finalise aussi le rapport du Parti avec les Masses. En ce sens, il n’y a pas de définition de Parti et de programme sans rapport avec les masses.
Et c’est une relation de modelage réciproque à partir des masses, le Parti se« modèle » et se finalise comme une détermination consciente et projectuelle du Système du Pouvoir Rouge ; les masses investies par les déterminations conscientes et projectuelles propres aux Parti sont « modelées » en ce sens qu’elles sont réunies, transformées et organisées sur le terrain révolutionnaire.
Cela signifie que la partie – le Parti – s’unit continuellement à l’ensemble – les masses – tout en s’en distinguant continuellement.
Le Parti et les Masses constituent ensemble une totalité ouverte qui toujours « s’ouvre » en ce sens que chacun, en passant dans l’autre, se change lui-même et, par conséquent, la qualité totale du parcours révolutionnaire.
C’est pourquoi un trait caractéristique de l’existence du Parti est la définition des programmes. C’est pourquoi la définition des programmes ne peut être dissociée de la construction de la ligne de masse, c’est-à-dire placée à l’extérieur du rapport Parti-Masses (et, pire, avant celui-ci).
Le rapport Parti-Masses n’échappe pas – comme aucun autre rapport et détermination ne peut échapper – aux répercussions du caractère historiquement changeant de tous les rapports sociaux ; le rapport Parti-Masses, en d’autres termes, est aussi une relation historiquement déterminée.
Cela signifie qu’aujourd’hui, d’une part, lorsqu’on parle du rapport Parti-Masses, il faut, plus précisément, parler du rapport Parti guérilla-Prolétariat métropolitain ; d’autre part, ce rapport n’est pas génériquement déterminé et finalisé par la perspective d’organiser les masses sur le terrain révolutionnaire, mais, plus pertinemment, il est déterminé et finalisé par la perspective d’organiser le prolétariat métropolitain sur le terrain de la guerre de transition au communisme.
Seul le Parti guérilla peut réunifier le prolétariat métropolitain.
Ce n’est qu’à l’époque historique du prolétariat métropolitain que la nécessité du parti de guérilla pouvait surgir. Sans la construction de la guérilla, il n’est pas possible de réunifier le prolétariat métropolitain.
Rester en dehors de cette construction, ne pas la promouvoir, ne pas la diriger, ne pas la fabriquer dans un saut qui redéfinit les pratiques sociales révolutionnaires, c’est se référer non pas précisément au Prolétariat Métropolitain, mais encore de manière générique aux masses ; cela signifie se référer non pas de manière pertinente à la guerre de transition pour le communisme mais encore de manière générique à la révolution.
Dans les deux cas, non seulement les nécessités objectives et le devenir possible du saut d’époque au communisme ne sont pas compris, mais les mêmes caractéristiques saillants de la conjoncture de transition sont perdues. Il ne pouvait pas en être autrement du reste.
La définition des programmes-construction de la ligne de masse signifie construction de l’unité sociale (politique, militaire, idéologique, etc.) du Prolétariat Métropolitain.
Le saut d’époque au communisme dépend de l’unité sociale du prolétariat métropolitain.
Cette unité, du reste, ne peut vivre que si elle est pénétrée, nourrie et façonnée par les contenus sociaux d’époque du saut au communisme.
La construction de la ligne de masse, donc, la construction de l’unité sociale du Prolétariat Métropolitain se déroulent le long de trois maillons indivisibles, qui constituent une chaîne indestructible : Programme de Transition vers le Communisme, Programme Politique Général de Conjoncture, Programme Politique Immédiat.
Chacun de ces trois maillons renvoie à l’autre et chacun se jette dans l’autre : tous, ensemble et de manière distincte, trouvent dans la pratique sociale révolutionnaire leur identité et leur base de formation et de développement.
Le Parti guérilla du Prolétariat métropolitain se distingue précisément par sa capacité à parcourir ces trois maillons et à les rassembler sans relâche dans une chaîne de relations profondément unitaires.
Aucun espace de « l’être social » au sein duquel se place la multiplicité des unités qui composent le prolétariat métropolitain et la multidimensionnalité des pratiques de savoir-pouvoir qui s’en dégagent se soustrait et peut se soustraire au champ d’action du Parti guérilla.
La sphère au sein de laquelle se meut le Parti guérilla est l’univers social de la réunification de toutes les pratiques sociales et de toutes les couches qui composent le Prolétariat Métropolitain.
Dans cet univers il n’y a aucune division spatio-temporelle. Le premier est le second ; la logique des deux, trois temps « va au diable », mieux : la pratique sociale l’envoie au diable.
C’est précisément pour cet ordre de raisons que le Programme de Transition au communisme, le Programme Politique Général de Conjoncture et le Programme Politique Immédiat ne peuvent être séparés l’un de l’autre.
Briser l’unité-distinction qui les lie dans l’espace et dans le temps équivaut à briser la chaîne et donc à briser la totalité de la pratique sociale révolutionnaire qui construit la transition au communisme.
Mais si le Programme de Transition au Communisme, le Programme Politique Général de Conjoncture et le Programme Politique Immédiat constituent toujours un seul tout indivisible, au sein de cette totalité historiquement déterminée il y a une échelle de priorité.
Le sens de la priorité est double.
Quant à la fondation et au développement possible des tendances stratégiques de la guerre des classes pour le communisme, est central le programme de transition au communisme, comme abstraction maximale du général.
En ce qui concerne la mise en œuvre matérielle de la pratique sociale révolutionnaire, le point nodal, ce sont les Programmes politiques immédiats, en tant que concrétisation maximale du particulier.
Reconnecter politiquement et socialement dans la conjoncture le Programme de Transition au Communisme avec le Programme Politique Immédiat est la tâche spécifique du Programme Politique Général de Conjoncture, en tant que synthèse conjoncturelle entre abstraction générale et concrétisation particulière.
Les Programmes Politiques Immédiats non seulement se reconnectent et trouvent leur identité complète dans le Programme Politique Général de Conjoncture, mais en cela ils réalisent de manière conjoncturelle le passage au communisme dans toutes les couches de la classe et, par conséquent, dans le Prolétariat Métropolitain recomposé.
Bien que déterminés par les formes déterminées de la transition, eux seules peuvent nourrir ces formes et leur donner un caractère concret.
La concrétisation du Programme Politique Général de Conjoncture est ici précisément, la concrétisation du Programme de Transition au Communisme dans la conjoncture.
Ainsi, tout Programme Politique Immédiat, tout en étant orienté et construit sur une couche de classe spécifique, renvoie à tous les autres : l’organisation d’une couche de classe sur le terrain de la guerre de transition au communisme, pour le communisme, se fait en étroite unité avec tous les autres.
C’est une loi de la révolution sociale dans la métropole.
Il n’y a pas d’organisation d’une couche de classe en dehors de la recomposition politique et sociale du prolétariat métropolitain.
Par conséquent, s’il est vrai que sans Programme Politique Général de Conjoncture, il n’y a pas de Programmes Politiques Immédiats, l’inverse est également vrai.
Encore une fois, le rapport est dialectique, il ne tolère aucune réduction et aucun schématisme, étrangers à la dialectique matérialiste du marxisme-léninisme.
Si le Programme de Transition au Communisme rappelle le saut d’époque vers le communisme, Programme Politique Général de Conjoncture rappelle la nécessité d’analyser la situation économique et comment y faire vivre la transition, dans des formes historiquement déterminées, au communisme.
Ces besoins doivent non seulement contribuer à résoudre le problème de l’identification de la « cible centrale » à attaquer, mais aussi celui de la détection des « domaines centraux de lutte » à pratiquer et des objectifs sociaux à atteindre.
Le Programme Politique Général de Conjoncture n’est pas simplement un plan d’attaque contre le cœur de l’État, mais aussi un programme de construction de nouveaux rapports de savoir-pouvoir entre les classes, visant à l’abolition et à la transformation sociale de la société capitaliste.
Bref, dans le Programme Politique Général de Conjoncture vit, dans les formes spécifiques de la conjoncture et sur la ligne de son devenir possible et nécessaire, une dialectique indivisible entre destruction et construction.
Privilégier la destruction, c’est transformer le Programme Politique Général de Conjoncture en une offensive militaire contre l’appareil de l’État impérialiste.
Privilégier la construction, c’est transformer le Programme Politique Général de Conjoncture e en propagande vulgaire et grossière d’un « contre-pouvoir » qui coexiste à côté du pouvoir bourgeois et non contre lui.
À leur tour, les Programmes Politiques Immédiats rappellent la nécessité de partir des besoins immédiats du prolétariat métropolitain.
Ici, certaines choses doivent être clarifiées. Seule une référence purement formelle au léninisme peut qualifier le fondement des Programmes Politiques Immédiats du prolétariat métropolitain d’« économicisme ».
Aujourd’hui, en effet, « l’économisme » ne peut pas constituer la « maladie infantile de la métropolisation », comme nous le verrons.
Lénine, à vrai dire, ne pose pas la chose de cette manière. Il ne se lasse pas d’avertir qu’il existe « spontanéité et spontanéité », exhortant le Parti à considérer avec la plus grande attention « les pas en avant réalisées par le mouvement ».
La spontanéité constitue pour lui, en définitive, la « forme embryonnaire de la conscience ». Par conséquent, parler avec mépris de la spontanéité, le liquider et privilégier unilatéralement le Parti n’est pas léniniste.
Avec l’aggravation de la crise du Mode de Production Capitaliste, l’expansion et l’intensification de l’intervention de l’État impérialiste dans toutes les régions de la formation économico-sociale, les « luttes économiques » se répercutent contre la « résistance » directe et globale de l’État et se définissent dans la perspective de la lutte pour le pouvoir.
Ici, à un tel degré de développement de la crise et du rapport de guerre relatif entre les classes, même l’« économiste » le plus têtu ne serait pas en mesure de circonscrire les « luttes spontanées » contre le « simple patron » : désormais elles s’affrontent « spontanément » avec l’État.
Si la « spontanéité » est la « forme embryonnaire de la conscience », les Programmes Politiques Immédiats sont la forme embryonnaire du Programme Politique Général de Conjoncture et, par conséquent, de la transition au communisme dans la conjoncture.
Au niveau de cette nouvelle dialectique, les limites ne peuvent plus consister dans la réduction économiste du rapport de pouvoir.
Il y a bien d’autres tendances erronées qui peuvent s’affirmer sur cette nouvelle base (par rapport à ces tendances nous avons commencé, pour la partie qui nous appartenait, à exercer l’autocritique nécessaire).
D’une part, le fait de ne pas développer adéquatement l’embryon, c’est-à-dire de croire que la définition des programmes aboutit exclusivement à la construction des Programmes Politiques Immédiats, en dehors du Programme Politique Général de Conjoncture.
D’autre part, l’incapacité de développer adéquatement le cadre d’analyse de la conjoncture propre au Parti, c’est-à-dire de croire que la définition des programmes se résout dans l’enfermement des chambres du Parti avec la construction idéaliste et unilatérale du Programme Politique Général de Conjoncture en dehors du rapport avec le prolétariat métropolitain.
Les Programmes Politiques Immédiats constituent le particulier concret organisé en programmes.
Autour d’eux, le Prolétariat Métropolitain s’organise sur ses besoins immédiats et les Organismes de Masses Révolutionnaires naissent comme structures formant l’Armée Rouge.
Les Programmes Politiques Immédiats découlent de la dialectique Parti-Mouvements de masses révolutionnaires.
Le Parti apporte le contenu stratégique de la transition et l’analyse de la conjoncture ; les mouvements révolutionnaires de masse, toutes les tensions, contradictions, humeurs, attentes, exigences de pouvoir qui bouillonnent en morceaux au sein du prolétariat métropolitain.
Non seulement les Programmes Politiques Immédiats prennent forme de cette dialectique, mais les Organismes de Masses Révolutionnaires naissent et se développent, la détermination manquante du Système du Pouvoir Rouge, étant donné que les Mouvements Révolutionnaires de Masses et le Parti sont des déterminations déjà données, dont la genèse est influencée chacune par l’autre.
Les Organismes Révolutionnaires de Masses constituent le chaînon manquant du Système de Pouvoir Rouge, car ils n’apparaissent pas ou ne se reproduisent pas spontanément.
Ils sont le résultat précis d’une dialectique précise : celle entre le parti et les Mouvements de Masses Révolutionnaires.
Même lorsqu’il y aura des milliers d’Organismes de Masses Révolutionnaires, ils continueront à revêtir le caractère de chaînon manquant dans le Système de Pouvoir Révolutionnaire.
Sans un programme de transition au communisme qui explique les objectifs sociaux de la guerre, il n’est pas possible d’identifier toutes les composantes prolétariennes qui y sont objectivement intéressées.
Ce programme, en revanche, ne surgit pas de rien, mais dix ans de luttes prolétariennes, de critique pratique et radicale de l’usine et de la formation sociale capitaliste, l’ont largement esquissé dans son contenu essentiel que l’on peut ainsi résumer :
– Réduction du temps de travail, travailler tous, travailler moins ; libération massive du temps social et construction des conditions sociales de son utilisation avancée.
– Recomposition du travail manuel et du travail intellectuel, de l’étude et du travail, chez chaque individu et au cours de la vie.
– Abolition de la propriété privée et réappropriation sociale des richesses.
– Renversement de l’exercice des pouvoirs et du flux de la projectualité des objectifs collectifs à tous les niveaux de la vie sociale.
– La requalification de la production, du rapport entre l’homme et la nature, sur la base de valeurs d’usage collectivement définies et historiquement possibles.
– Modification de notre formation sociale selon les principes d’un internationalisme prolétarien efficace.
La condition de ce programme est le dépassement des rapports de production capitalistes, de production fondée sur la valeur d’échange.
L’utopie n’y est pour rien. Il s’agit ici d’un programme qui, comme dirait Marx, « ne permet pas aux piliers de la maison de rester debout », ayant déjà pleinement mûri dans ses fondements.
C’est un programme auquel font continuellement allusion les luttes des sujets prolétariens les plus conscients qui rompent violemment avec les tendances immanentes et conservatrices du développement capitaliste et s’affrontent sous des formes antagonistes avec l’État.
Cependant, c’est un programme qui cherche son identité la plus mature dans la lutte révolutionnaire. La croissance du pouvoir rouge coïncide avec cette recherche et c’est au Parti de la promouvoir.
1. La loi générale : la crise de l’impérialisme engendre la guerre.
« Le révisionnisme soviétique et l’impérialisme yankee, qui se tiennent sous le même manteau, ont commis tant de ces crimes que les pôles révolutionnaires du monde entier ne permettront pas qu’ils restent impunis.
Les peuples de tous les pays se soulèvent. Une nouvelle période historique de lutte contre l’impérialisme yankee et le social-impérialisme soviétique a maintenant commencé.
Ou la guerre provoque la révolution, ou la révolution empêche la guerre, les jours de la vie de l’impérialisme yankee et du révisionnisme soviétique sont désormais comptés.
Prolétaires de tous les pays, unissez-vous. »
2. Les quatre contradictions sont devenues trois.
Les quatre contradictions fondamentales de notre temps, telles qu’elles ont été exposées par Mao lors du 9e au 10e congrès du Parti Communiste Chinois − c’est-à-dire avant que Deng Xiao Ping ne développe sa théorie bourgeoise des « trois mondes » − peuvent être schématisées comme suit :
– la contradiction entre le prolétariat mondial et la bourgeoisie mondiale est la principale, elle traverse toutes les formations sociales dominées par le mode de production capitaliste, y compris celles à « capitalisme monopoliste d’État » (URSS, Chine, etc.) ;
– la contradiction entre les pays socialistes et impérialistes, c’est-à-dire par « socialistes » les pays où domine la dictature du prolétariat, et y compris parmi les impérialistes aussi ceux à capitalisme d’État ;
– la contradiction entre peuples et nations opprimés d’une part, et impérialisme d’autre part ;
– les contradictions internes du système impérialiste entre États, groupes financiers, multinationales impérialistes.
Au cours des dix dernières années, beaucoup d’eau est passée sous les ponts. La révolution culturelle, quoique momentanément, a été vaincue et la ligne bourgeoise de Deng a pris le dessus.
Il est toujours difficile de retracer les pays dans lesquels la dictature du prolétariat domine réellement. Il nous semble donc que dans la phase actuelle, la deuxième grande contradiction remonte, par ordre d’importance, à la dernière place.
Néanmoins, la contradiction entre le prolétariat mondial et la bourgeoisie mondiale est devenue plus aiguë et plus étendue ; et à la suite de cela aussi les deux autres mentionnés deviennent plus explosifs. Cela nous semble l’aspect qui caractérise les années 80.
Malgré ceux qui soutiennent que la tendance à la guerre prévaut sur celle à la révolution, nous soutenons le contraire : la révolution est la tendance principale à l’époque de l’impérialisme mourant.
Lorsque nous parlons d’impérialisme, nous nous référons autant au mouvement du capital monopoliste privé qu’à celui des pays capitalistes d’État.
« Nous voulons être très explicites sur ce point : l’impérialisme et le social-impérialisme sont deux unités variables du mode de production capitaliste à ce stade : le capitalisme privé et le capitalisme d’État.
Ils forment un système impérialiste, dans lequel il y a à la fois unité et contradiction. : unité du Mode de Production Capitaliste, contradiction entre ses formes d’existence géographiquement et historiquement déterminées ».
« Le révisionnisme moderne est l’expression idéologique, politique, matérielle d’un secteur de l’impérialisme mondial, l’impérialisme social, une composante organique (et contradictoire) de la dictature de classe de la bourgeoisie impérialiste ».
La loi générale de la crise traverse tout le système impérialiste.
La contradiction principale de ce système est celle entre le secteur monopolistique multinational dirigé par les États-Unis et le secteur monopolistique d’État dirigé par l’URSS.
3. À la différence de la première et de la seconde guerres mondiales, l’actuelle a un triple caractère :
– c’est une guerre de classe dans chaque secteur de l’impérialisme ;
– c’est une guerre entre les peuples et les nations opprimés par l’impérialisme ;
– c’est une guerre entre secteurs de l’impérialisme et au sein de chacun d’eux.
En effet, l’exportation du capital et les « contre-tendances » à la crise de surproduction ont une répercussion violente à la fois dans les zones qui exportent le capital et dans les zones où celui-ci va établir sa domination.
a) Dans les régions exportatrices de capitaux (domination réelle), la guerre des classes tend à prendre la forme d’une guerre sociale totale pour la transition au communisme.
b) Dans les zones pénétrées par le capital internationalisé, la guerre tend à revêtir des formes multiples définies par le degré de développement des forces productives et des rapports sociaux contre lesquels le capital s’est établi et a commencé à s’imposer comme rapport (guerres de libération nationale).
c) Au sein de chaque secteur impérialiste, les conflits se multiplient entre États, groupes financiers et entreprises multinationales.
L’imbrication de ces trois caractères explique la forme particulière de la guerre actuelle qui est un processus mondial, simultané et interactif de guérilla et de lutte révolutionnaire dans la métropole, les guerres de libération nationale, la multiplication des foyers de confrontation militaire directe entre le secteur impérialiste et le social-impérialiste.
La « tendance à la guerre » n’est donc pas une incubation de tensions latentes qui s’apprêtent à exploser dans un « instant X » à venir.
4. Aux fins de notre discours, il est maintenant intéressant de souligner le fait que le secteur impérialiste dans lequel se situe notre formation sociale est caractérisé, également, par un développement inégal du capital.
La forme politique de cette évolution inégale est celle d’un système d’États impérialistes entrelacés (au niveau économique, politique et militaire) selon une hiérarchie complexe qui voit les États-Unis, ou les plus puissantes multinationales capitalistes, à son sommet.
Cependant, il faut dire que s’il existe une contradiction au sein du système impérialiste, l’intérêt unitaire de la bourgeoisie impérialiste à étendre toute la zone d’exploitation du capital monopoliste multinational est toujours dominant.
À cette fin, il a donc construit un système mondial politico-militaire intégré conçu pour intervenir à la fois intérieurement dans les États impérialistes individuels dans une fonction contre-révolutionnaire, ainsi que pour attaquer tout « ennemi extérieur » potentiel.
Ce système politico-militaire intégré, pour l’espace européen et méditerranéen, a son cœur au sein de l’OTAN.
5. Les États impérialistes s’arment pour la guerre.
L’OTAN est une organisation qui défend les intérêts du capital monopoliste multinational et surtout du plus fort : les multinationales américaines.
L’OTAN n’est pas une institution « défensive » : si elle défend quelque chose, ce ne sont que les intérêts du capital impérialiste.
L’OTAN est la force motrice de la contre-révolution impérialiste dans l’espace européen et méditerranéen.
L’OTAN signifie guerre interne et guerre externe.
Guerre intérieure :
– favorise l’intégration des appareils et la standardisation des théories anti-guérilla ;
– promeut la contre-guerre psychologique à travers des livres, des médias de masse, des films, etc. Par exemple, la brochure de Sterling (« The Plot of Terror ») est citée à plusieurs reprises par le secrétaire d’État américain Haig et le journaliste a été invité à participer aux travaux du sous-comité du Sénat américain sur le terrorisme et la sécurité ;
– prépare une psychologie de masse à l’appui de la politique agressive de l’impérialisme.
Guerre extérieure :
– intégration de sections des forces armées des pays membres dans des corps expéditionnaires agressifs ;
– l’installation de bases de missiles à têtes nucléaires, il va de soi que toute décision sur leur « utilisation » appartient uniquement aux Américains puisque les gouvernements européens n’ont aucun droit de vote à cet égard.
6. L’aggravation de la crise est à l’origine de la nécessité d’une intégration transnationale plus étroite des appareils contre-révolutionnaires et bellicistes de la bourgeoisie impérialiste.
Dans ce processus, qui est naturellement perturbé par de profondes contradictions, les appareils des États individuels subissent d’importantes métamorphoses.
6a. Le ciment idéologique de tout cela est la philosophie de la « nouvelle droite » américaine qui « pense » pour [le président américain Ronald] Reagan et qui repose sur quatre piliers :
– L’anticommunisme viscéral de la tradition maccarthyste.
– Le néo-libéralisme et le néo-monétarisme de Milton-Friedmann en économie, qui redimensionnent l’intervention de l’État au contrôle des mouvements d’argent.
– Au sein de l’État : coupes dans les programmes sociaux et augmentation des dépenses militaires, modernisation de l’industrie de guerre. A l’échelle mondiale : voir la réunion annuelle du Fonds monétaire international en octobre et le sommet de Cancun.
– La « Moral-Majority » ou la « restauration » après la gueule de bois de 68 et les luttes sociales des dix dernières années. (Droit-Ordre-Famille).
– La nouvelle doctrine militaire résumée par le slogan : Amerika über alles !
6b. Ce processus se développe aussi sous des formes spécifiques dans notre pays, impulsé au niveau politique par le PSI de l’Amerikan Craxi et par la DC [Démocratie Chrétienne].
Cela se traduit par :
– l’envolée du budget militaire (plus que doublé au cours des deux dernières années) ;
– le renforcement de l’industrie de guerre ;
– politique belliciste du gouvernement (voir décision d’envoyer des troupes dans le Sinaï et d’installer des missiles à tête nucléaire un peu partout et à Comiso contre les peuples arabes et nord-africains) ;
– l’intégration du ministère de la Défense et de l’Intérieur dans les projets de l’OTAN. L’Italie est de plus en plus au centre de la politique impérialiste relative à l’espace méditerranéen ;
– la corporatisation du personnel militaire ;
– la restructuration des forces armées dans le cadre de la « modernisation » de l’OTAN.
7. Le degré d’intensité de l’affrontement entre les deux pôles de la contradiction principale du système impérialiste augmente en relation avec le fait que de plus en plus l’Europe elle-même se trouve au centre de cet affrontement.
Qu’il en va ainsi est démontré par les récentes déclarations de Reagan et [le secrétaire d’État américain Alexander] Haig [et ancien commandant suprême des forces alliées en Europe de 1974 à 1979, visé par une attaque de la RAF en 1979] sur la possibilité d’une guerre nucléaire limitée à l’Europe.
La tristement célèbre « directive 59 » approuvée par Reagan prévoit précisément la possibilité d’une guerre limitée contre l’Europe et à l’URSS dans l’intérêt américain.
[Il y a ici confusion entre la Presidential Directive 59 signée par Jimmy Carter en juillet 1980 organisant de manière secrète une attaque nucléaire préventive en Europe et les propos du nouveau président Américain Ronald Reagan parlant en 1981 d’une guerre nucléaire se limitant à l’Europe.]
Haig : « Il y a des choses pires que la guerre. »
Haig : « Parmi les plans extraordinaires envisagés dans la doctrine de l’OTAN figure celui de l’utilisation d’une arme atomique à des fins démonstratives pour faire comprendre à l’autre partie que les limites de tolérance dans le secteur conventionnel sont dépassées ».
Pour Haig, il y a donc « pire » que quelques dizaines de millions de morts : quelques dizaines de millions de prolétaires au chômage.
Le prolétariat métropolitain de Rome, Londres, Bruxelles, Amsterdam, Bonn, ainsi qu’en Scandinavie, au Danemark, en Norvège, en Suède a démontré sa sensibilité aiguë au problème en se mobilisant immédiatement et en donnant lieu aux manifestations politiques de masse les plus puissantes des dix dernières années.
Contrairement aux manifestations contre la guerre d’agression américaine au Vietnam à la fin des années 1960, les mouvements de masse identifient aujourd’hui l’impérialisme comme une force menaçante et agressive directement dirigée contre le prolétariat européen.
N’est pas oublié le lien indissociable entre plus de dix millions de chômeurs sans perspectives et destinés à augmenter, circulant en Europe, et les préparatifs d’une solution atomique de leur problème.
Ainsi, si hier, à quelques rares exceptions près comme la RAF, cela se limitait à condamner l’agression impérialiste d’un peuple lointain, aujourd’hui cela commence à lutter pour empêcher la guerre inter-impérialiste d’envahir et de submerger l’Europe elle-même et l’idée-force qui seule la révolution prolétarienne peut empêcher que cette guerre commence à se frayer un chemin dans la conscience des masses.
Au sein de ces mouvements, il est possible d’identifier différentes positions qui reflètent à la fois l’ampleur et l’hétérogénéité de classe des forces sociales qui y participent, et l’influence idéologique de la propagande révisionniste et même de la guerre psychologique menée par l’OTAN.
Il est important de clarifier le contenu idéologique de classe des principales positions, puisque la lutte idéologique de classe est un terrain fondamental dans la relation entre le parti et les mouvements de masse.
Critiquer les mots d’ordre influencés par la bourgeoisie et le révisionnisme est une condition pour affirmer ceux qui sont corrects et que le prolétariat métropolitain doit mettre à la base de son initiative.
Le néo-révisionnisme. Cette plante a aussi des racines profondes dans notre pays. Les tenants de cette thèse affirment, plus ou moins explicitement, que l’arrière-plan stratégique des luttes révolutionnaires qui se développent dans le monde (et donc aussi en Europe) est ce qu’on appelle le « camp socialiste », c’est pourquoi la stratégie de ces les luttes ne peuvent qu’être calibrées sur ce que l’URSS et ses alliés mènent dans le monde entier.
La variante timide, qui a honte, est celle de ceux qui soutiennent que de toute façon l’ennemi principal est l’impérialisme américain et qu’il n’y a donc rien de mal à s’appuyer sur l’URSS pour le combattre.
L’un et l’autre ne comprennent pas bien que le mythique « camp socialiste » est en réalité socialiste en paroles et impérialiste en actes puisque le mode de production dominant, depuis de nombreuses années, en URSS comme dans les pays qui lui sont liés, est le capitalisme d’État.
Le révisionnisme pacifiste. Acceptation de l’OTAN et affirmation de son caractère « défensif » (1977 : Berlinguer définit l’OTAN comme une alliance défensive ; 1981 : le comité central du PCI, en octobre, réaffirme ce concept). Demande de désarmement progressif négocié.
Cette thèse est contre-révolutionnaire, car elle accepte pour le prolétariat une place dans les desseins bellicistes de l’impérialisme et sème l’illusion d’une paix possible sans la destruction du mode de production capitaliste dans sa phase impérialiste, c’est-à-dire du vrai et unique générateur de la guerre.
Cette position désarme idéologiquement les prolétaires et est activement interne aux plans de l’impérialisme.
8. Dans ce contexte, le parti, pour jouer une position d’avant-garde dans le sens de la transition au communisme, pour affirmer trois thèses fondamentales.
– « Une grande paix ne pourra être réalisée qu’après l’anéantissement de l’impérialisme sous toutes ses formes » (Mao).
– Pour anéantir l’impérialisme, il est nécessaire de mobiliser le prolétariat pour développer la révolution et transformer la guerre inter-impérialiste en une guerre de classe.
– Le véritable internationalisme – dit Lénine – consiste à développer la lutte révolutionnaire dans son propre pays.
Dans notre pays, c’est l’impérialisme du capital monopoliste américain multinational, européen et au pôle national, qui doit être envoyé en enfer avec l’État impérialiste qui défend ses intérêts et les structures militaires agressives qu’il a générées.
Il ne s’agit donc pas d’affirmer que dans la contradiction entre les deux secteurs de l’impérialisme, celui dirigé par les Yankees est le principal et celui dirigé par l’URSS est le « secondaire », et donc implicitement sinon explicitement, laisser ouvertes la porte à la thèse néo-révisionniste selon laquelle on peut s’appuyer sur le second pour combattre le premier.
Au contraire, l’attaque contre l’État impérialiste et contre les structures politico-militaires transnationales intégrées du secteur impérialiste dans lequel se déroule notre militantisme révolutionnaire est déterminée exclusivement par notre emplacement et n’implique pas une évaluation de la dangerosité différente pour le prolétariat mondial des deux pôles du système impérialiste.
Ce slogan acquiert un sens nouveau dans les conditions actuelles d’interaction politico-militaire entre les États.
En fait, l’action révolutionnaire ne se limite pas ici à rendre « précaire » l’« arrière-plan » de la bourgeoisie impérialiste, mais propose une désarticulation directe et systématique des plans et des structures d’agression impérialiste.
9. Dans la crise de l’impérialisme, toute guérilla qui ne part pas du slogan « anéantir l’impérialisme » est inévitablement réformiste.
Le slogan « anéantissez l’impérialisme » est central dans le programme de transition vers le communisme.
En effet, il n’est pas possible de révolutionner définitivement les rapports sociaux de production sans une défaite définitive du système impérialiste.
Il est cependant possible, précisément en raison du développement inégal du capitalisme et de la chaîne des États impérialistes, de briser le maillon le plus faible et de construire un processus de libération du travail capitaliste dans une zone locale.
C’est précisément pour cette raison que nous parlons de « détacher l’Italie de la chaîne impérialiste » et de construire le processus de transition vers le communisme comme voie autonome et de lutter contre tout impérialisme et de manière unitaire avec tous les prolétaires en lutte et tous les peuples opprimés.
10. Il faut affronter le problème de l’unité avec toutes les guérillas luttant pour le communisme et plus généralement avec celles qui, bien qu’elles n’aient pas un contenu prolétarien, luttent contre le système impérialiste.