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Les récents effondrements boursiers ont été une manifestation spectaculaire de la crise générale du capitalisme. Comme à chaque fois, la bourgeoisie veut faire payer la sa note aux prolétaires. Les plans de “restructuration” qui attendaient dans les tiroirs le moment opportun sortent en liasse, et chaque entreprise annonce sa charette de licenciements. Chaque classe est dos au mur: la bourgeoisie par la crise de son système, le prolétariat par la menace de la pire des servitudes et de la plus noire des misères. L’intervention de la justice de classe dans les grève se systématise, la “concertation” fait place à la confrontation. Il faut lutter, en dénonçant les réformismes, les liquidateurs, et ces prétendus communistes qui ne cessent de réinventer la socialdémocratie. Les luttes se durcissent. Les dispositifs et les appareils répressifs se renforcent sur tous les plans (légaux, techniques, matériels), ils s’exercent et ils s’emballent. Les affaires se succèdent au nom de “l’anti-terrorisme”. Le 5 juin dernier, cinq militants du Bloc ML ont ainsi été emprisonnés pour “participation à activité terroriste”. La guerre est le dernier mot du Capital contre les peuples opprimés et contre les classes exploitées. La bourgeoisie belge, dans sa tradition d’éternel sous-fifre du bellicisme impérialiste, envoie ses troupes aux quatre coins du monde. Sur tous les fronts, le système révèle sa nature hideuse. Sur tous les fronts, organisons-nous pour le combattre et le vaincre!
Pendant que les travailleurs de Carrefour et ceux d’UCB subissaient la répression et les interventions de la police, les directions de la CSC et de la FGTB multipliaient les déclarations de soutien au gouvernement libéral et pleurnichaient contre les astreintes. Ils pleurnichaient aussi pour participer à la négociation interprofessionnelle et appliquer les décisions du patronat.
« Tous ensembles pour sortir de la crise » ? !
Les pirates de la finance sont assurés du soutien de l’Etat bourgeois et des partis dits « démocratiques » (des partis fascistes aussi, d’ailleurs…). L’ex-ministre de la Justice Onkelinx, « socialiste-fille-d’ouvrier », avait déjà entamé une procédure pour limiter, supprimer, le droit de grève dans les services publics en instaurant le « service minimum ». Après une pétition « pour défendre le droit de grève » lancée par la FGTB qui avait récolté 80.000 signatures (c’est ce qui s’appelle se tirer une balle dans le pied) ce sont les cheminots qui ont montré la seule voie de résistance possible : des actions concrètes.
Contre les astreintes, contre la présence de la police dans les entreprises les travailleurs des Forges de Clabecq-Duferco, ceux de Splintex-ACV à Fleurus, de Carrefour, d’UCB, et de bien d’autres entreprises, ont fait plus que les manifestations-bidon (avec comme manifestants des fonctionnaires syndicaux et des délégués en congé, pendant que les entreprises continuaient de tourner…), et que les déclarations des bonzes pour défendre les droits fondamentaux.
La lutte contre les astreintes
Cette lutte n’est qu’un début. Là aussi, les travailleurs d’UCB à Braine-l’Alleud ont marqué des points et ridiculisé huissiers, patronat et policiers. Sur le terrain et malgré l’absence de solidarité des entreprises voisines et du secteur. Malgré surtout la complicité des centrales syndicales engagées dans la négociation interprofessionnelle et au service du gouvernement.
La lutte contre les astreintes n’est qu’un aspect de la lutte contre les licenciements, pour les salaires, pour les conditions de travail. Ce que le patronat craint par-dessus tout, ce sont les grèves avec occupation et les grèves de solidarité. Ce n’est pas par hasard qu’elles sont interdites en Allemagne, ce qui n’a pas empêché IG-Metall d’obtenir quelques concessions sur les salaires.
Clairement, pire encore que l’exploitation « ordinaire » – la plus-value, la » réduction des coûts du travail « , le harcèlement, les cadences…- le capitalisme va tenter de se « réformer » (une réforme, une » régulation « , un » encadrement » impossibles) pour instaurer un réel esclavage, la destruction de toute protection sociale et, recours ultime contre la résistance populaire, une véritable guerre civile et le terrorisme d’Etat.
Comment passer à l’offensive ?
Les luttes de résistance vont s’intensifier, se généraliser malgré les divisions orchestrées par les centrales syndicales réformistes. Hier c’étaient les fonctions publiques régionales qui descendaient dans la rue quand, au même moment, les travailleurs de Carrefour menaient une lutte solidaire.
Dans les structures syndicales, dans les délégations, les délégués et les travailleurs combatifs doivent se compter, se reconnaître, s’organiser et créer, quasi clandestinement, des comités de lutte syndicale. Le moment venu, il faut dénoncer les délégués opportunistes, ces permanents privilégiés – des « parvenus « …- qui prétendent mener des négociations, monopoliser la parole et faire avaler des défaites et des accords conclus au bénéfice du patronat et des actionnaires voraces.
Alors que nous sommes au cœur du système d’exploitation, bien placés le combattre, le détruire et défendre ainsi les intérêts de tous.
Cette énorme responsabilité ne peut aboutir que si nous nous battons pied à pied pour nos intérêts, pour l’établissement d’un véritable index, contre les licenciements et la dégradation des conditions de travail par la surexploitation, la flexibilité.
Elle ne peut aboutir que si nous reprenons à notre compte ce que les larbins du capital appellent « les pires dérives de l’économie planifiée » à savoir l’expropriation des capitalistes et la socialisation pure et simple de la production.
Pas d’illusions !
La guerre permanente du capitalisme et de ses larbins (le gouvernement, la presse, les « experts ») contre la classe ouvrière est une guerre permanente. Elle était accompagnée jusqu’ici de « mesures sociales », du discours social-démocrate de « la défense des plus faibles » ; elle est maintenant une guerre ouverte, une guerre sans merci, une guerre sans limite
Ce n’est qu’en développant la persuasion, l’agitation, l’organisation, l’éducation, la propagande, l’action solidaire et révolutionnaire que, de francs-tireurs, nous deviendrons soldats d’une armée organisée pour la lutte de classe.
Contre le capitalisme,
Contre les larbins du capitalisme,
La lutte de classe, dirigée par un Parti Révolutionnaire,
Jusqu’au communisme !
(texte paru dans Clarté actualité n°1, ci-dessous, affichage la veille de la “Journée d’action” syndicale du 6 octobre)
La crise du Capital – et le rôle de l’Etat.
Selon ses propres hérauts, le capitalisme traverse aujourd’hui une crise historique, comparable – pas moins – à celle de 1929. De PTB et Besancenot jusqu’aux libéraux les plus convaincus, tous appellent aujourd’hui aux nationalisations, à l’intervention de l’Etat pour venir en aide au capital financier dont l’état naturel de chaos et de sauvagerie prend aujourd’hui des proportions telles que la bourgeoisie toute entière voit ses intérêts et ses richesses mises en péril.
Quant à lui, le prolétariat subit de plein fouet l’inflation et l’endettement.
Dans la phase actuelle de développement du mode de production capitaliste, l’impérialisme décrit par Lénine, le capital financier et le capital industriel ne peuvent être dissociés. Le premier est la condition d’existence du second. Le capital connaît depuis longtemps déjà une crise de surproduction de capitaux : la baisse tendancielle du taux de profit, l’hypertrophie du capital constant par rapport au capital variable, rend extrêmement difficile le maintien de taux de profit suffisants. Seuls l’investissement massif de capitaux dans la guerre et les mécanismes du crédit (pour l’Etat comme pour les particuliers) permettent à l’industrie d’écouler sa production, particulièrement dans les vieux pays capitalistes. La masse monétaire financière croît donc bien plus rapidement que la valeur totale des marchandises (capital constant ou biens de consommation), car le mode de production capitaliste – anarchique par nature – est devenu incapable d’assurer la reproduction et l’extension des forces productives.
L’Etat montre bien quel est son rôle : l’Etat est une arme, un outil puissant de la bourgeoisie en tant que classe, représentant ses intérêts collectifs (parfois contre une puissance bourgeoise étrangère, parfois contre un bourgeois ou groupe bourgeois particulier, toujours contre le prolétariat – son ennemi historique). L’Etat défend les intérêts de la bourgeoisie comme superstructure (judiciaire, politique et militaire) mais aussi dans son fonctionnement économique le plus organique. Sa nécessité pour la bourgeoisie apparaît clairement à tous (même aux plus libéraux) en temps de crise.
Les illusions petites-bourgeoises sur un Etat au-dessus des classes apparaissent bien ridicules aujourd’hui, lorsqu’après mille jérémiades sur l’impossibilité d’assurer des soins de santé, une sécurité sociale, décentes et la nécessité d’équilibrer les budgets, nos Etats parviennent en quelques heures à mettre des milliards d’euros sur la table pour sauver les banques et l’organisation bourgeoise de la richesse.
Contrairement à ce que les apôtres de la mondialisation capitaliste voulaient nous faire accroire, mais aussi les apôtres du genre d’ATTAC d’une autre mondialisation, les Etats restent bien l’arme centrale de la bourgeoisie, le rouage principal du mode de production capitaliste. Nos luttes doivent s’inscrire principalement dans ce cadre, à tout niveau, celui de la lutte de classe quotidienne (syndicale et extra-syndicale) comme celui de la construction du Parti Révolutionnaire.
Lutter contre l’inflation, lutter contre l’exploitation
L’augmentation de la masse monétaire fait baisser le prix des autres marchandises, en particulier celles qui servent à déterminer la valeur de la force de travail. La valeur d’une quantité déterminée de numéraire (d’un billet de banque donné par exemple) va donc diminuer par rapport à celle de toute autre marchandis: les prix augmentent. Nous renvoyons à ce propos aux extraits de la Contribution à la Critique de l’Economie Politique cités dans le texte suivant du présent numéro de Clarté.
Mais l’augmentation des prix des marchandises devrait également s’appliquer à la marchandise « force de travail », dont le prix s’appelle salaire, et dont la valeur est fonction des différentes marchandises qui la composent, et qui permettent à cette force de subsister et de se reproduire (tous les biens de consommation du prolétaire). Mais entre en jeu, en plus des simples calcules économiques, le moteur de l’histoire : la lutte des classes. La valeur de la force de travail, et son expression monétaire, est fonction d’un rapport de forces que nous devons inverser.
Par ailleurs, le capital financier a porté massivement sa spéculation sur un certain nombre de matières premières telles que le pétrole, approfondissant ainsi sa crise. Même si la valeur du pétrole a probablement augmenté (car il est de plus en plus difficile à produire), sa hausse de cet été ne s’explique pas uniquement par cela : elle est aussi le fruit d’une spéculation, et cette dernière est le fruit de la surproduction de capital. Il y a sur le marché des masses de capital qui cherchent à se valoriser. Le cycle de la valorisation industrielle paraissant trop long (et la fusion entre capital bancaire et industriel dans le capital financier, caractéristique de l’époque de l’impérialisme, étant achevée), ce capital s’engouffre dans la spéculation. Il provoque des hausses de prix terribles sur des catégories de marchandises qu’il s’imagine susceptible d’augmenter plus que la moyenne et qui ont un cycle de production suffisamment long pour permettre cette hausse avant que l’augmentation de la production ne ramène le prix à la baisse (le pétrole, l’immobilier, …). Le capital spéculatif (agissant à travers des milliers de traders) achète la marchandise en question et achète même à l’avance, via un système d’option, la marchandise pas encore produite et les éléments nécessaires à sa production). Il acquiert objectivement et collectivement la mainmise sur une partie conséquente de cette marchandise. Ceci permet une sorte de « prix de monopole » (sauf que c’est un monopole inconscient et collectif). La marchandise en question (et celles qui lui sont directement liées) ont un prix supérieur à leur valeur (y compris par rapport à la valeur de la marchandise « force de travail ») pour deux raisons.
– soit qu’elles sont directement l’objet de la spéculation (le pétrole lui-même, et puis, en seconde ligne, le matériel de forage, les droits de prospection, etc.)
– soit qu’elles bénéficient indirectement de la spéculation car elles représentant une alternative partielle à la marchandise enchérie (le nucléaire, le charbon)
– soit qu’elles répercutent dans son prix la spéculation sur le pétrole qui est, dans son processus de production, est « capital constant » (toutes les marchandises qui nécessitent de l’énergie pour leur production) – dans le cas du pétrole, cela fait beaucoup…
Et puis cela s’effondre (car le marché ne permet pas un décalage durable entre le prix et la valeur d’une marchandise) et le processus recommence en prenant un autre objet de spéculation.
L’inflation est donc le fruit d’une surproduction structurelle du capital, caractéristique de la crise générale du capitalisme, mode de production anarchique et dépassé historiquement.
L’inflation permet aussi à la bourgeoisie de tenter de faire payer sa crise au prolétariat, en accroissant encore et toujours l’exploitation des travailleurs : alors que les prix de toutes les marchandises augmentent, celui de la force de travail stagne.
Les organisations syndicales et la lutte contre l’inflation
A l’heure où l’inflation atteint 6 %, les organisations syndicales entament seulement une campagne pour » la défense du pouvoir d’achat « , campagne qui a vaguement culminé lors de la journée de grève(ke) et d’action du 6 octobre. Pas de véritables mobilisations dans les entreprises et les services publics, pas d’action sérieuse. Surtout, ne rien faire qui puisse gêner le gouvernement et, en particulier, le P.S.
La seule mesure défensive, minimale, efficace pour défendre réellement les salaires réels (car c’est de cela qui se cache derrière le « pouvoir d’achat »), c’est l’index. Non pas l’index-croupion actuel qui ne sert qu’à préserver la paix sociale par la collaboration des syndicats. Un véritable index. Un index qui suit la hausse de prix de toutes les dépenses des travailleurs: loyers, nourriture, vêtements, chauffage, frais de santé, frais scolaires et d’autres postes nécessaires, y compris les transports et la culture. Toute autre proposition n’est qu’une diversion, comme la demande de diminuer les taxes sur le gaz, le mazout, l’essence, lancée par P.S. et adopté par un PTB définitivement devenu la « cinquième roue » de la charrette social-démocrate. L’application de cet index aux salaires, aux allocations et aux pensions, c’est tout simplement une hausse générale des salaires et des allocations sociales de 6%. Et cela même n’est qu’une mesure de défense immédiate, car le travail est toujours plus productif, et la plus-value que le Capital peut extraire de la journée de travail ne cesse de croître, même sans rogner sur le salaire réel des travailleurs.
Comme la crise est profonde, et le rapport de forces défavorable aux travailleurs, « les patrons et le gouvernement ne seront pas d’accord ! » pour maintenir l’index.
C’est certain. Trouver des milliards pour voler au secours des actionnaires de Fortis et de Dexia (en prétendant voler au secours des épargnants…) ne pose aucun problème. Mais c’est une autre chanson quand il s’agit d’assurer un niveau de vie digne à ceux qui créent la richesse réelle de ce pays (pas les spéculateurs ou les exploiteurs, mais ceux qui construisent les immeubles, qui fabriquent les biens de consommation, qui transportent et qui soignent les personnes).
L’inflation et la lutte des communistes
Il ne s’agit pas d’avoir l’accord du gouvernement et des patrons, ni même de négocier avec eux, mais de rétablir un rapport de force entre eux et nous qui les obligent à céder. A d’autres époques de l’histoire, pas tellement éloignées, la force du prolétariat international – qui avait conquis le pouvoir politique en Union Soviétique – lui a permis de nombreuses conquêtes, en Belgique et ailleurs. L’indexation des salaires, la réduction du temps de travail, les congés payés ne sont pas le fruit de la générosité d’un capital moins en crise. Même en crise, le capital ne cède pas, et ne rompt pas sans qu’on l’y contraigne : au contraire, il lui est plus essentiel que jamais d’accroître l’exploitation.
Récemment, les compagnies aériennes, la direction de l’aéroport de Zaventem, et même les délégations syndicales étaient opposées à la grève des bagagistes. Mais les bagagistes ont obtenu satisfaction sur une partie de leurs revendications. Par peur de la contagion les médias et les organisations syndicales ont soigneusement passé cela sous silence.
Par le chômage économique, les fermetures plus ou moins temporaires et plus ou moins déguisées, le capital tente de faire payer la crise aux travailleurs. Son fonctionnement anarchique lui impose aujourd’hui d’essayer d’imposer une flexibilité inouïe aux prolétaires. Dans ce cadre, les luttes spontanées se multiplient.
Il faut rétablir le rapport de force en développant nos moyens de lutte. La revendication de l’index est la base d’une solidarité entre tous les travailleurs. Elle offre la possibilité d’étendre le mouvement aux luttes contre les licenciements, les restructurations, les cadences infernales, les attaques contre les délégués. Cette lutte ne peut être efficace que par la création de comités de lutte syndicale, de groupes d’opposition syndicale aux trahisons social-démocrates au sein des organisations réformistes.
Elle ne peut être efficace que dans la perspective de la construction d’une organisation communiste des avant-gardes révolutionnaires, qui cimentera idéologiquement le prolétariat en lui permettant de se réapproprier sa glorieuse histoire. C’est ainsi seulement, en combattant de front le capitalisme et sa crise que nous pourrons nous libérer définitivement de l’économie marchande, et mettre fin à l’exploitation de l’homme par l’homme.
Même en crise, le capitalisme ne tombera pas tout seul : abattons-le !
Contre la bourgeoisie et son Etat
Contre les larbins du capitalisme
La lutte de classe, dirigée par un Parti Révolutionnaire
Jusqu’au communisme !
(texte du tract distribué lors de la “Journée d’action” syndicale du 6 octobre)
En guise de complément au tract du Bloc ML sur l’inflation et le “pouvoir d’achat”, voici un extrait de la Contribution à la critique de l’économie politique (1859).
Dans la circulation des signes de valeur, toutes les lois de la circulation monétaire réelle paraissent renversées et mises sens dessus dessous. Alors que l’or circule parce qu’il a de la valeur, le papier a de la valeur parce qu’il circule. Alors que, la valeur d’échange des marchandises étant donnée, la quantité de l’or en circulation dépend de sa propre valeur, la valeur du papier dépend de la quantité qui en circule. Alors que la quantité d’or en circulation augmente ou diminue avec l’augmentation ou la diminution des prix des marchandises, les prix des marchandises semblent augmenter ou diminuer avec les variations de la quantité de papier en circulation. Alors que la circulation des marchandises ne peut absorber qu’une quantité de monnaie d’or déterminée et que par suite l’alternance de la contraction et de l’expansion de la monnaie en circulation se présente comme une loi nécessaire, la proportion dans laquelle le papier-monnaie entre dans la circulation semble pouvoir augmenter de façon arbitraire. Alors que l’État altère les monnaies d’or et d’argent et porte ainsi le trouble dans leur fonction de moyens de circulation même s’il émettait la monnaie à un simple 1/100 de grain au-dessous de son contenu nominal, il se livre à une opération parfaitement correcte en émettant des billets dépourvus de valeur qui n’ont du métal que leur nom monétaire. Alors que la monnaie d’or ne représente visiblement la valeur des marchandises que dans la mesure où celle-ci est elle-même estimée en or ou exprimée en prix, le signe de valeur semble représenter directement la valeur de la marchandise. Aussi conçoit-on aisément pourquoi des observateurs qui étudiaient les phénomènes de la circulation monétaire en s’en tenant exclusivement à la circulation du papier-monnaie à cours forcé devaient fatalement méconnaître toutes les lois immanentes de la circulation monétaire. Ces lois semblent, en effet, non seulement renversées, mais abolies dans la circulation des signes de valeur, étant donné que le papier-monnaie, s’il est émis dans la quantité voulue, accomplit des mouvements qui ne lui sont pas particuliers comme signe de valeur, alors que son mouvement propre, au lieu d’avoir son origine directe dans la métamorphose des marchandises, provient du fait que n’est pas respectée la proportion voulue par rapport à l’or.
(…)
Les billets ayant cours forcé, nul ne peut l’empêcher d’en faire entrer le nombre qu’il veut dans la circulation et d’y imprimer les noms monétaires qu’il lui plaît : 1 livre sterling, 5 livres sterling, 20 livres sterling. Il est impossible de rejeter les billets hors de la circulation une fois qu’ils s’y trouvent, puisque les poteaux frontières arrêtent leur cours et qu’en dehors d’elle ils perdent toute valeur, valeur d’échange comme valeur d’usage. Détachés de leur existence fonctionnelle ils se transforment en chiffons de papier sans valeur. Ce pouvoir de l’État est cependant pure apparence. Il peut bien jeter dans la circulation autant de billets qu’il veut avec tous les noms monétaires qu’il veut, mais son contrôle cesse avec cet acte mécanique. Emporté par la circulation, le signe de valeur, ou le papier-monnaie, tombe sous le coup de ses lois immanentes.
1. Le blitz
Le 5 juin 2008, à 5 heures du matin, les commandos anti-terroristes ont défoncent les portes de quatre militants du Bloc Marxiste-Léniniste et du Secours Rouge : Wahoub Fayoumi, Bertrand Sassoye, Abdallah Ibrahim Abdallah et Constant Hormans, celles de plusieurs de leurs proches et celles de Pierre Carette et d’une militante du Secours Rouge également arrêtés. Les journalistes sont sur place et répercutent immédiatement la désinformation du parquet.
Celui-ci invoque deux dossiers distincts :
1° Quatre arrestations résultent d’une enquête visant à « vérifier si une cellule, qui aurait participé aux activités d’un groupe terroriste [le Parti Communiste Politico-Militaire italien], existait en Belgique et identifier les membres de celle-ci ». Il s’agit des arrestations des quatre membres du Bloc ML et du Secours Rouge.
2° Deux arrestations résultent d’une enquête « ayant établi » (sic) que Bertrand Sassoye et Pierre Carette (anciens militants des Cellules Communistes Combattantes) n’avaient pas respecté leurs conditions de libération, ce qui sera démenti rapidement par le Tribunal d’application des peines qui relâchera Pierre Carette.
Deux heures après les arrestations, le Bloc ML et le Secours Rouge/APAPC rendent public le communiqué commun suivant :
« Ce matin vers 5h30 des perquisitions et arrestations de membres de Secours Rouge Belgique et Bloc Marxiste-Léniniste ont eu lieu à Bruxelles. Elles ont été menées avec la violence habituelle : policiers cagoulés, armés, gilets pare-balles, etc.
A l’heure actuelle, nous avons connaissance de deux arrestations, cinq perquisitions donc une à Paris (deux encore en cours).
Ce n’est pas la première fois, et ne sera pas la dernière non plus, que la répression du Système s’acharne contre les militants révolutionnaires, anticapitalistes, anti-impérialistes, antifascistes.
Lutter contre le terrorisme du système Capitaliste est légitime et nous ne comptons pas arrêter notre travail. Ses intimidations ne réussiront pas a arrêter le cours de l’histoire car l’histoire la font les peuples!
Nous vous appelons à diffuser ce communiqué le plus largement possible.
LA SOLIDARITÉ EST NOTRE ARME !
Secours Rouge Belgique
Bloc Marxiste-Léniniste »
En soirée, le Secours Rouge organise une conférence de presse où l’attaque contre la solidarité internationale est dénoncée. Car à ce moment, il apparaît que ce n’est pas le Bloc ML en tant que tel qui est visé, mais le Secours Rouge. Le fait que les membres du Secours Rouge arrêtés soient également militants du Bloc ML n’est pas étonnant. Les militants du Bloc ML ont des activités politiques dans des organisations de masse, dans des syndicats, dans divers comités de lutte. Les liens entre le Secours Rouge et le Bloc ML sont étroits puisque le tiers des membres du Secours Rouge sont également militants du Bloc ML. Le Bloc ML a toujours encouragé l’activité du Secours Rouge et essayé, dans la mesure de ses moyens, de contribuer au succès de son action de soutien envers toutes les personnes confrontées à la répression pour leur activité anticapitaliste, anti-impérialiste et anti-fasciste.
Le 6 juin, un cinquième militant du Bloc ML, également membre du Secours Rouge, Jean-François Legros est arrêté pour violation de libération conditionnelle. Il sera également libéré par le Tribunal d’Application des peines après une grève de la faim en prison.
2. Le choix du Bloc ML
Dès le moment où c’était clairement le Secours Rouge la cible de l’offensive bourgeoise, le Bloc ML s’est effacé pour consacrer toutes ses forces à appuyer le Secours Rouge, à l’aider à résister à l’attaque, et à contre-attaquer.
C’est un choix qui avait ses avantages et ses inconvénients.
L’avantage était celui de la cohérence : le Secours Rouge concentrait toutes les forces, proposait une stratégie et un discours unique. Et de fait, malgré plusieurs tentatives pour diviser les dossiers (en isolant le cas de notre camarade Wahoub, jugé plus « présentable » par des démocrates bourgeois), pour le dépolitiser, le Secours Rouge a réussi a garder la direction du mouvement de solidarité, sans nuire à son étendue, en plaçant correctement l’affrontement sur la critique de la justice de classe et son dernier « saut de qualité » : la législation anti-terroriste.
L’inconvénient était que le Bloc renonçait à son expression propre, forcément différente de celle du Secours Rouge, ou plutôt, postposait celle-ci.
Il nous est encore difficile de dire si le choix que nous avons fait était le bon. Nous savons ce que nous avons perdu en renonçant à une lutte spécifique, mais nous ne savons pas ce que nous aurions perdu en renonçant à faire du Secours Rouge le centre de la campagne pour les camarades emprisonnés.
Il est regrettable que tous n’ait pas cette prudence, comme en témoignent les critiques « définitives » du « Comité Solidarité-Liberté » dans son déplorable texte d’août dernier. On aurait pu d’emblée écarter ce texte en le signalant pour ce qu’il est : le triste règlement de compte de deux personnes ayant quitté le Secours Rouge il y a deux ans et qui se manifestent en tant que « Comité » (à savoir eux-mêmes et leur base sympathisante : leurs conjointes). Il est remarquable de constater que ce document est l’unique intervention du « Comité » dans toute l’affaire. Pas un texte de solidarité avec les militants emprisonnés. Pas une dénonciation de la répression et de la justice de classe. Non : uniquement une leçon ex cathedra de « juste ligne » dont on se demande quelle pratique et quel succès fonderait la légitimité(1). Passons donc sur la critique contre la discrétion du Bloc (car si le Bloc s’était manifesté, on aurait à coup sûr vu le « Comité » dénoncer « l’instrumentalisation de la solidarité » par le Bloc…) et fermons la parenthèse « Solidarité-Liberté ».
3. Les choix du SR
Examinons dans quelle mesure le Bloc se retrouve dans la ligne adoptée par le Secours Rouge dans l’affaire du 5 juin.
1° Le SR a réussi à contrer toutes les tentatives extérieures pour dissocier le groupe des prisonniers. Il faut rappeler ici la manœuvre tentée par PTB qui, se cachant derrière un collectif de signataire (certains ne mesurant assurément pas le fin mot de la manœuvre), publia dans le Soir du 19 juin une carte blanche intitulée Wahoub Fayoumi : nouveau dérapage de la lutte antiterroriste. Cette carte blanche critique naturellement longuement les CCC ou le Secours Rouge (elle n’a pas PTB pour rien comme origine) et ne met en avant que le cas de Wahoub qui, comme « journaliste de la RTBF » et ancienne figurante importante du mouvement étudiant, était jugée plus présentable et récupérable que ses camarades(2). C’est dans le même esprit que, le 24 juin, quelques parlementaires rendent visites à la seule Wahoub en dénonçant une application « trop rigoureuse » de la loi anti-terroriste. Wahoub les a invité à plutôt rendre visite à Constant Hormans et Abdallah Ibrahim Abdallah qui, suite à des initiatives du directeur de la prison de Saint-Gilles, étaient dans des conditions de détention exceptionnellement dures (interdits de visite, de colis, etc.). Le SR a réussi à contrer cette manœuvre de dissociation et la réduire à néant, et cela bien avant que les prisonniers ne parviennent à surmonter les problèmes de la détention pour produire une déclaration commune(3).
2° Le SR a réussi, sinon à créer, du moins à entretenir et amplifier, un large mouvement de solidarité allant bien au-delà de la base sympathisante des thèses communistes révolutionnaires. Et il a réussi ce travail sans s’effacer dans un mouvement sans ligne ni caractère ni stratégie. Le SR a su rester au centre de la campagne pour la défense de ses prisonniers et barrer la route à quelques tentatives de récupération.
3° Bien entendu, on pourrait discuter ligne par ligne des communiqués du SR, mot par mot des interventions de ses représentants, pour dénicher ici une manifestation de sectarisme, là une manifestation d’opportunisme. Mais si l’on considère les conditions de travail du SR (avec cinq militants en prison, tous les ordinateurs saisi par la police, l’adresse mail fermée par Hotmail, etc.), le SR a fait preuve d’une fermeté et d’une sûreté de vue remarquables. L’écueil principal était celui de « l’innocentisme ». De la même manière que les prisonniers refusaient de donner quelque information que ce soit à la police, fut-ce pour se disculper, le SR n’avait pas à mettre en avant la thèse de l’innocence, puisque sa ligne consiste à soutenir tous les révolutionnaires emprisonnés, « coupables » et « innocent ». Plus exactement, il considère (comme nous) que ce critère appartient à la justice bourgeoise. Il importe seulement au SR de savoir si la personne réprimée est, dans le cadre de la lutte des classes, dans le camp populaire/prolétarien ou dans le camp bourgeois/impérialiste. D’un autre côté, le fait que les dossiers visant les prisonniers étaient singulièrement vides n’étaient pas sans importance. Des arrestations sur base de tels dossiers constituent clairement un « saut de qualité » dans la répression de classe, et c’était une chose à mettre en évidence et à dénoncer. La frontière entre « l’innocentisme » et la dénonciation de ce « saut de qualité » incarné dans les nouvelles lois anti-terroristes est ténue et, même si son expression n’a pas toujours été sans défaut, le SR s’en est remarquablement tiré.
4° L’engagement du SR dans la construction d’un Secours Rouge International a porté ses fruits. Le SRI est certes en gestation et embryonnaire, mais il est intervenu de manière non négligeable dans la campagne pour la libération de nos camarades : accrochages de calicots à Magdebourg (22 juin et 21 juillet) et à Zürich (22 juin), manifestation devant les consulats de Belgique à Bâles (13 juin), à Berlin (25 juin) et à Istambul (21 juillet), envoi de délégations (française, suisse, et italienne) à la manifestations de 19 juillet à Bruxelles, intervention dans une manifestation à Berlin (13 juillet), et rassemblement devant le Centre Wallonie-Bruxelles à Paris (26 juin).
4. Bilan et perspective
Considérant le remarquable travail fait par le SR et le caractère minime, marginal et accidentel des erreurs qui ont pu être commises, le Bloc ML ne voit pas de raison de changer sa ligne de conduite dans cette affaire. C’est dans le cadre du SR et par l’intermédiaire de ses militants également membres du SR qu’il répondra à l’offensive répressive de la justice de classe. Il est impossible de dire si il y aura ou non un procès contre nos camarades: cela dépendra de la décision d’une Chambre du Conseil qui doit se réunir… à une date non encore fixée. La réunion de cette Chambre du Conseil devra être l’occasion d’une large mobilisation solidaire pour arracher le » non-lieu » qui mettra un terme à l’affaire. D’ici là, la lutte pour la suppression des conditions mises aux libérations est d’actualité, tout comme la réunion des moyens qui sera nécessaire aux mobilisations futures.
NOTE :
1. C’est une remarquable habitude de ce « Comité ». On lit sur son site, à propos des campagnes de solidarité avec les 70 militants interpellés en février en 2007, dont 17 sont actuellement en jugement : « En Belgique : nous faisons pour l’instant un travail d’information et de traduction (pour lequel toute aide est bienvenue ! Nous ne pouvons pas tout traduire, faute de temps). Nous attendons la fin de l’enquête et les éclaircissements qui se produiront pour organiser des initiatives concrètes d’agitation en Belgique. » Lorsque les camarades italiens auront passé l’examen du « Comité Solidarité-Liberté » (à la lumière de l’enquête de la police politique de Berlusconi), le « Comité » nous fera savoir s’ils sont dignes d’une « initiative concrète d’agitation »… Cette absence de réalité militante solidaire du « Comité » dénonce l’imposture que constitue le parallèle qu’il prétend faire entre sa critique du SR et la critique que le SR avait faite du CLEA. Le « Comité » oublie simplement que si le SR critiquait le CLEA, c’était sur base d’une authentique pratique solidaire avec les prisonniers également défendus par le CLEA. On est loin du compte avec ce “Comité”…
2. Cette manoeuvre se retrouve dans la presse de PTB, puisque le seul article consacré à l’affaire (paru dans Solidaire le 16 juin) ne parle que de Wahoub. Il a pour titre : Justice : L’avocat Jan Fermon réagit à l’arrestation de Wahoub Fayoumi et pour sous-titre Le 5 juin, cinq personnes ont été arrêtées dont la journaliste de la RTBF Wahoub Fayoumi et un ancien membre des CCC. La journaliste est accusée de terrorisme. La première question de l’interview est : « Pourquoi Wahoub Fayoumi a-t-elle été arrêtée ? » et tout est à l’avenant.
3. Certaines forces extérieures au courant révolutionnaires sont intervenues sur leur base politico-idéologique (progressiste- démocrate-bourgeoise), mais en respectant l’unité des prisonniers. C’est le cas des signataires de la carte blanche publiée le vendredi 27 juin par La Libre Belgique sous le titre La bande a bon dos.
1. Qui sommes-nous ?
Nous sommes 4 communistes. Cela signifie que nous pensons que le système capitaliste est devenu un obstacle à tout véritable progrès social, politique, culturel, environnemental, économique et scientifique. Nous croyons l’humanité capable de dépasse ce blocage en raison des contradictions et des crises engendrées par le capitalisme lui-même. Nous pensons que les catégories marxistes restent de loin les meilleures pour penser et transformer la société. Nous ne réfléchissons pas en terme de « gens » ou de « citoyens », mais en terme de classe : d’un côté ceux à qui le capitalisme profite, la bourgeoisie, de l’autre côté l’immense majorité de ceux qui ont objectivement tout à gagner d’une révolution communiste : le prolétariat. L’héritage politico-stratégique du marxisme-léninisme est selon nous le plus porteur d’avenir pour le prolétariat. C’est un héritage difficile où il faut faire la part de ce qui a vieilli et de ce qui a gardé son actualité, où il faut faire la part des erreurs, parfois tragiques, et des avancées. Mais c’est un héritage immensément riche et glorieux, qui n’a absolument aucun équivalent, dont nous nous revendiquons avec fierté et que nous essayons de faire vivre dans nos lettres. C’est pour cette raison que nous militons dans le Bloc Marxiste-Léniniste, c’est dans cet esprit que nous militons sur le front syndical et sur celui de la solidarité avec les prisonniers révolutionnaires.
2. L’attaque de la répression
Le blitz policier du 5 juin et les dix-huit mois d’espionnage maniaque qui l’ont précédé débouchent sur un dossier dont la vacuité a été remarquablement exposée par nos avocats en Chambre du Conseil et en Chambre des mises. Cette attaque de la répression a trois caractéristiques remarquables :
1. Elle met en évidence le caractère réel de la nouvelle loi anti-terroriste. Cette loi permet n’importe quoi contre n’importe qui, surtout lorsque son application se double, comme c’est le cas pour notre affaire, de la mise en pratique de la loi sur les « méthodes particulières de recherche ». Les juristes démocrates avaient mis en garde contre ces lois qui ne font qu’avaliser l’arbitraire et lâcher totalement la bride aux diverses polices.
2. Cette attaque a un caractère politique évident. Nos engagements dans le Bloc ML et dans le Secours Rouge étaient au centre de l’enquête. A peine le quart des questions que les enquêteurs nous ont posées concernaient notre prétendu lien au Parti Communiste Politico- Militaire. Par contre, on nous a interminablement interrogés sur le Secours Rouge, sur les meetings qu’il avait organisés, sur les personnes qui assistaient à ces meetings, etc. Que la solidarité révolutionnaire ait été dans le collimateur ne fait aucun doute.
3. Le fait que nous ne collaborions pas à l’enquête est considéré comme un élément de culpabilité. Nous voudrions nous expliquer sur ce dernier point.
3. Ne pas dire !
3.1 Démocratie, fascisme et répression
Lorsque les nazis ont pris le pouvoir en 1933, des dizaines de milliers de communistes ont été arrêtés, déportés et assassinés grâce aux dossiers de police de la République démocratique de Weimar. C’est ainsi que Goering, devenu chef de la police du Land de Prusse s’est servi des listes de communistes à arrêter dressées par son prédécesseur, le Préfet de police démocrate Severing. Ce n’est pas un épisode isolé. Chaque fois que la bourgeoisie perd confiance en la démocratie pour assurer son pouvoir et garantir ses privilèges, elle lui substitue cette autre forme de pouvoir communément appelée « fascisme ». Le passage de la démocratie au fascisme est toujours un traumatisme pour les peuples. Pas pour l »appareil d’Etat bourgeois. Cet appareil (ministères, armées, polices, etc.) sert le fascisme comme il a servi la démocratie, et est le plus souvent l’opérateur du passage de l’un à l’autre. C’est cette continuité qui garantit l’efficacité de l’opération. Lorsque les militaires ont pris le pouvoir en Argentine, ils ont utilisé les dossiers de police du régime démocratique auquel ils succédaient pour arrêter, torturer, assassiner et faire disparaître 30 000 personnes en quelques semaines.
3.2 Les principes de sécurité
Fondés sur la discipline collective et la discrétion, les modes de fonctionnement peuvent se résumer à 4 principes : 1. Ne pas révéler les noms des militants et des sympathisants que nous pouvons côtoyer; 2. Ne pas révéler l’existence ni la configuration de structures organisationnelles ; 3. Ne pas révéler la nature des interactions ; 4. Étendre cette discrétion au profit de toutes les forces progressistes, quelques désaccords qu’il puisse y avoir entre eux et nous. Ainsi lors de la guerre de libération de l’Algérie, et dès 1960, la Force de Police Auxiliaire française a utilisé des techniques d’infiltration ayant finalement, après obtention des renseignements recherchés, mené à de nombreuses arrestations et tortures des membres du Front de Libération nationale combattant pour leur indépendance. Plus proche de nous, des alter mondialistes ont été victimes d’une répression féroce, à Gênes en 2000 ou ailleurs, due à des renseignements obtenus par des méthodes d’interrogatoire mettant en place la dénonciation.
3.3 Deux impératifs politiques
L’application pure et simple de ces principes ferait des forces communistes de simples cercles de conspirateurs. En réalité, ces principes s’opposent à deux impératifs également indispensables, ce qui oblige à chaque instant les communistes à gérer une tension entre ces impératifs politiques et de sécurité. Le premier impératif qu’entravent les règles de sécurité, c’est celui du lien entre les forces communistes et le prolétariat. Ce n’est qu’en multipliant ces liens que les communistes pourront développer les forces révolutionnaires jusqu’à rendre celles-ci capables de renverser le pouvoir bourgeois. Le second impératif qu’entravent les règles de sécurité, c’est celui de la démocratie interne. Autant les forces révolutionnaires ont besoin d’une organisation et d’une discipline rigoureuses, autant elles ont besoin d’un débat d’idées interne qui seul permet une politique adéquate à la réalité sociale. Les principes de sécurité et les techniques qu’ils commandent (le cloisonnement, par exemple) doivent donc souvent céder dans une mesure bien réfléchie, à ces deux impératifs. Mais si il est bien un domaine où il ne souffre aucune exception, cest dans les rapports entre les communistes et l’appareil policier et judiciaire au service de la bourgeoisie.
4. La répression aujourd’hui
Même si nous sommes bien sûrs dans une situation infiniment moins dramatique que les exemples extrêmes de terreur blanche évoquées plus haut (IIIè Reich, Argentine et généraux) le respect des principes de sécurité ne relève pas seulement d’un automatisme ou d’une mesure conservatoire pour le long terme : il a pour aujourd’hui déjà un caractère d’auto-défense. Le dispositif répressif de « contre-révolution préventive » ne cesse de se développer, et ce sur tous les plans : • Légal, avec la loi sur l’infraction terroriste, la loi sur les méthodes particulières de recherche, le mandat d’arrêt européen, etc. • Technique, avec les progrès de l’identification par ADN, le couplage, via la numérisation, de la vidéo-surveillance et de la biométrie, etc. • Organisationnelle, avec des institutions transnationales comme EUROPOL ou EUROJUST. • Idéologique, avec le matraquage politico-médiatique sécuritaire et réactionnaire. A l’heure où le pays leader de l’OTAN, les USA, légalise la torture ; à l’heure où les pays de l’Union Européenne se sont rendus complices des « vols secrets de la CIA » autrement de disparitions et de tortures dans des prisons secrètes, à l’heure où le FBI a détaché au siège d’EUROPOL une cellule pour y faire son libre marché du renseignement, le respect des principes de sécurité est impératif.
5. Conclusions
Politiciens, policiers et magistrats s’autorisent des moyens dont ils n’auraient pas seulement osé rêver il y a 10 ou 20 ans. Cette tendance s’aggrave, faute de résistance populaire et démocratique. Le fait de considérer comme coupable notre refus de nourrir les dossiers de police participe de cette tendance. Quel qu’en soit le prix, nous ne transigerons pas sur nos principes. Nous refusons de donner des informations susceptibles d’impliquer des tiers, quand bien même ces informations nous disculperaient. Nous appelons toutes les forces révolutionnaires, progressistes et démocratiques à se battre sur cette ligne de défense. Nous les appelons à soutenir la grève de la faim de notre camarade Jean-François Legros qui, dans le cadre de cette offensive ciblant le Secours Rouge, a été incarcéré par le moyen d’une suspension de sa libération conditionnelle. La solidarité est une arme !
Les communistes arrêtés pour leurs prétendus liens avec le PCPM,
Constant Hormans, Abdallah Ibrahim Abdallah, Wahoub Fayoumi, Bertrand Sassoye.
Prisons de Saint-Gilles, Berkendael, et Forest,
le 25 juin 2008 à 18h.
1. Du révisionnisme à la clarification
PTB naquit en 1970 sur la base – juste – de la critique maoïste du révisionnisme du Parti Communiste de Belgique par AMADA/TPO, « Parti Ouvrier Communiste en Construction ». Il se caractérisa d’emblée par une volonté louable d’implantation ouvrière – avec un relatif succès. Mais, rapidement, l’opportunisme et l’électoralisme eurent raison des principes marxistes-léninistes-maoïstes censés diriger la ligne de cette organisation.
Après avoir, durant les années 80 et 90, clamé son hégémonie sur les idées marxistes-léninistes révolutionnaires en Belgique, contredisant une pratique révisionniste et opportuniste permanente, PTB tourne enfin explicitement le dos au vocabulaire marxiste révolutionnaire et à l’idéologie prolétarienne. PTB a toujours refusé le débat avec les autres organisations communistes(1), et nous n’allons certainement pas nier leur caractère historiquement dogmatique et sectaire(2). Mais aujourd’hui, cette autocritique n’est qu’un prétexte pour joindre leur voix à tous ceux qui qualifient de dogmes les bases scientifiques – le matérialisme dialectique et le matérialisme historique – qui fondent la seule théorie dont le prolétariat puisse et doive se saisir pour renverser la dictature bourgeoise : le marxisme-léninisme.
On rappellera également, en 1984 et 1985, la campagne d’intoxication contre-révolutionnaire de PTB en 1984-1985 contre les Cellules Communistes Combattantes. PTB n’a jamais souhaité débattre de l’opportunité stratégique de mener à ce moment-là des actions de propagande armée, ni de discuter la justesse des cibles, ni même de critiquer la militarisation d’une politique mal ou trop peu portée par une agit-prop au sein des masses prolétariennes. Il s’agissait simplement de dérouler une série ininterrompue de calomnies, contradictoires, trouille d’être démasqués comme ennemis du peuple par la pratique concrète d’une politique révolutionnaire armée en Belgique.
Les acquis sociaux conquis par le prolétariat en lutte, surtout au moment où le rapport de forces politique était plus favorable au prolétariat, où l’exemple et la puissance politique de l’Union Soviétique et des Partis Communistes remplissaient de crainte et de prudence les Etats bourgeois, sont aujourd’hui également des instruments de la domination bourgeoise, de maintien de sa « paix sociale », vidés de leur sens politique hors des périodes de lutte, tout en constituant de faibles remparts contre la férocité de l’exploitation capitaliste. Cependant, les communistes doivent apporter leur soutien sans faille au prolétariat en lutte pour le maintien de toutes ces conquêtes.
De la même manière au niveau idéologique, même dépossédé de son contenu matériel et révolutionnaire, l’utilisation des concepts du marxisme scientifique n’est jamais innocente : elle reflète la force que les idées prolétariennes eurent dans la lutte de classes idéologique. Même lorsque ces idées sont détournées de leur sens réel par le révisionnisme contemporain (comme dans l’URSS de Khrouchtchev ou la prose PTBiste des années 80 et 90), nous devons nous battre contre la substitution de concepts bourgeois ou interclassistes aux concepts marxistes prolétariens. L’abandon du vocabulaire prolétarien ratifie la victoire de la bourgeoisie dans la lutte des idées.
Dans le cas présent, l’abandon revendiqué des idées prolétariennes par le PTB permet, plus que jamais, un certain nombre de clarifications idéologiques bienvenues. Le PTB a depuis belle lurette abandonné le camp du prolétariat et rejoint celui de la « gauche » institutionnelle, de gouvernement ou d’opposition, dont la fonction historique et politique est de détourner les luttes prolétariennes, de vider de tout contenu révolutionnaire les expressions politiques de la lutte des classes, et d’assurer à la bourgeoisie une stabilité politique – en négociant avec elle un certain nombre de concessions réduisant de manière transitoire et limitée sa sauvagerie.
La faiblesse idéologique des marxistes-léninistes aujourd’hui ne fait que refléter la faiblesse politique du mouvement communiste, c’est-à-dire la faiblesse subjective du prolétariat, laquelle n’est pas un reflet mécanique d’une prétendue faiblesse objective. Le prolétariat est plus nombreux que jamais dans l’histoire du capitalisme ; ses conditions d’existence ne cessent de se détériorer ; sa force objective est immense. Mais il est totalement désarmé, organisationnellement, idéologiquement, politiquement.
Dès lors, en l’absence d’organisation numériquement significative unifiant les marxistes-léninistes authentiques, et devant la coexistence de courants parfois divergents – y compris sur des questions essentielles – dans les collectifs se revendiquant du mouvement communiste (y compris le Bloc Marxiste-Léniniste), certains camarades, conscients de la nécessité d’un politique révolutionnaire, ont pu – par jeunesse politique ou par découragement – se laisser prendre à l’illusion que, derrière les concessions tactiques du PTB, et dans cette fange idéologique nauséabonde, pouvait se cacher une volonté prolétarienne et révolutionnaire.
La priorité aujourd’hui est le rassemblement des forces véritablement communistes, non leur dilution dans une « gauche » bourgeoise ou interclassiste.
C’est pour cette raison que nous avons rédigé ce texte, afin de confronter les positions du PTB – telles qu’elles s’expriment aujourd’hui – avec les principes communistes, et d’aider le Parti du Travail de Belgique à clarifier sa position, enfin ouvertement contre-révolutionnaire.
Le naïf sera choqué par ce reniement contre-révolutionnaire ; le matérialiste y verra la confirmation qu’il est impossible de maintenir très longtemps un discours, fût-il formel, en contradiction totale avec une pratique depuis toujours réformiste et contre-révolutionnaire.
Parcourons d’abord une interview du « porte-parole » du PTB(3). Nous y voyons des références constantes à la « démocratie » non qualifiée, c’est-à-dire bourgeoise. Un Etat démocratique, selon PTB, est défini par son « processus électoral », respectant l’Etat de droit.
Pour nous, marxistes, l’Etat est l’appareil destiné à maintenir la domination d’une classe sur une autre, aujourd’hui la bourgeoisie sur le prolétariat, et son droit est la forme juridique de cette domination. Selon Lénine « la force du capital est tout, la Bourse est tout; le Parlement, les élections ne sont que des marionnettes, des fantoches… » (4)
Malgré les libertés formelles qu’elle permet, et dont les révolutionnaires doivent s’emparer sans illusion tant que cela est possible, la démocratie bourgeoise n’est que la forme du pouvoir bourgeois dans les périodes historiques où celui-ci n’est pas menacé à court terme. Les communistes savent que l’unique chemin vers la démocratie réelle, populaire, est la dictature de la majorité sur la minorité, la dictature du prolétariat.
Le PTB condamne le recours à la violence révolutionnaire : seul un « Etat démocratique (…) aurait le droit de se défendre [comme] le Venezuela de Chavez ». On ajoutera ici que Chavez lui-même n’aurait pas fait long feu en 2002 si le peuple vénézuélien avait attendu une quelconque caution étatique ou légale pour mettre violemment fin au putsch réactionnaire, et si les affrontements n’avaient pas démontré de façon limpide leur caractère de classe. Le nœud de la question est bien là : PTB renonce à toute analyse de classe.
Dès lors, la question de la violence elle-même est posée en termes formels, non politiques: Evoquant la violence, PTB nous parle de vols de lecteur MP3, et non de la violence de la bourgeoisie, par laquelle elle maintient son exploitation, au prix de millions de vies humaines chaque année, en faisant porter à des milliards d’êtres humains le joug de la misère et de l’exploitation.
PTB revendique enfin explicitement son réformisme : il ne s’agit plus même du réformisme des partis de la 2e Internationale imaginant – par clientélisme et lâcheté – que la voie légale permettrait d’instaurer un pouvoir prolétarien, tentant ainsi de dissimuler leur trahison historique. Non, il s’agit explicitement d’un réformisme interclassiste, légaliste, c’est-à-dire bourgeois.
Cette grossièreté idéologique caractérise-t-elle individuellement le nouveau porte-parole d’un parti qui cherche à asseoir sa légitimité auprès de son maître bourgeois ? Pas seulement :
2. Le programme du PTB
Examinons le » programme 2007 » de ce parti , en tentant de dégager les contradictions de classe principales soulevées par les différents points, leurs liens avec la lutte révolutionnaire, et l’incapacité du PTB à défendre une quelconque position prolétarienne.
Il s’agit d’un programme électoral, marqué du sceau de l’électoralisme le plus béat, respectueux de la démocratie bourgeoise : PTB apporte par ce programme son soutien sans réserve à la légitimité de la farce électorale par laquelle la classe dominante maintient l’illusion d’une participation des masses à la gestion du pays – pire – PTB ne cherche pas à tirer sa légitimité de quelque lien (historique, idéologique ou politique) avec les masses en lutte, mais de sa participation à cette farce par laquelle la bourgeoisie dupe – de moins en moins efficacement – le peuple.
Le programme d’une organisation communiste ne doit certes pas être la répétition ad nauseam des principes marxistes sans les appliquer à la réalité concrète. La qualité d’nu programme ne se mesure pas au nombre de références à Marx, Lénine ou Staline, ou même au prolétariat. Mais le programme d’une organisation communiste doit avant tout affirmer une position de classe, une position révolutionnaire, afin de donner au prolétariat des instruments idéologiques, organisationnels, politiques et militaires dont il puisse à terme se saisir afin d’instaurer sa dictature.
« De toute évidence, l’arme de la critique ne peut remplacer la critique par les armes : la force matérielle doit être renversée par une force matérielle ; mais la théorie se change, elle aussi, en force matérielle dès qu’elle s’empare des masses. » (6)
2.1. Introduction
Le programme s’ouvre sur un magnifique slogan : « les gens d’abord, pas le profit », en lettres de 4 centimètres. On ne parle d’ouvriers, de travailleurs, de prolétaires : les catégories liées au processus de production, et permettant de mettre en question le mode de production capitaliste, sont abandonnées. On ne parle même plus de « pauvres » et de « riches » : les catégories permettant de dénoncer une répartition inique des richesses entre les classes en lutte sont, elles aussi, passées à la trappe.
PTB privilégie l’homme formel à l’individu concret, déterminé, comme il privilégie la démocratie formelle à la lutte concrète.
Le but déclaré des communistes (revendiqué même par les réformistes de la 2e Internationale après sa trahison), est l’abolition de l’exploitation de l’homme par l’homme. Aujourd’hui, cette exploitation prend la forme du salariat, c’est-à-dire de l’achat – par le capitaliste propriétaire des moyens de production – de la force de travail du prolétaire, et de l’extraction d’une plus-value car la valeur créée par l’ouvrier par son travail dépasse (largement) la valeur de sa force de travail. C’est ce processus qui définit le mode de production capitaliste, maintenu par les superstructures de la bourgeoisie : son idéologie, son Etat, ses lois, ses flics.
PTB décrit – comme toute la gauche – la décroissance de la part des salaires dans le PIB, ainsi que les bénéfices éhontés et l’enrichissement infâme des capitalistes. Cette décroissance est la conséquence d’un phénomène bien connu des marxistes, la baisse tendancielle du taux de profit, qui – du fait de l’accroissement du capital constant (machines, bâtiments, …) par rapport au capital variable (la somme des salaires), sur lequel la plus-value est extraite – impose au capital d’augmenter sans cesse le taux d’exploitation pour maintenir ses profits. Autrement dit, l’écart entre la richesse créée par le travailleur et la part qui lui en reviendra sous forme de salaire augmente démesurément et constamment au profit du capitaliste.
Et bien non, PTB a compris ce phénomène bien mieux que Marx. L’argent provient certes du « monde du travail », mais non directement par l’extraction de plus-value, mais par « l’index-santé », le « retard des pensions », le « prix élevé des factures d’énergie », les « taxes », les « impôts » et la « norme salariale ».
C’est bien là la nature de la gauche de pouvoir, ou de l’opposition instituée : il s’agit de dénoncer les « excès » du capitalisme, d’en réclamer des aménagements, tout en occultant sa nature.
A ce propos, on peut se demander qui PTB courtise exactement, en rangeant l’impôt du côté des moyens d’extraction de richesse par la bourgeoisie. Certes, comme le souligne PTB, l’impôt – collecté par l’Etat de la bourgeoisie – frappe bien plus durement le Travail que le Capital, mais l’impôt en soi n’est pas soustrait du salaire du travailleur, mais en constitue sa partie collective. Si aujourd’hui cette richesse est utilisée non seulement collectivement par le peuple, mais aussi par l’Etat bourgeois pour maintenir sa domination, au contraire dans un Etat socialiste, la part collective du salaire tendra à augmenter au fur et à mesure que la richesse sociale elle-même sera collectivisée. Parler de l’impôt en taisant cette réalité, c’est s’abaisser à un discours populiste et réactionnaire, incapable de perspective historique.
Continuons : dans la suite de ce programme, aucune perspective prolétarienne ne sera jamais défendue(7). Pire, le concept de lutte populaire lui-même est totalement absent . La lutte, fût-elle partielle, n’est jamais garantie de victoire ; elle en est la condition. Occulter la lutte, c’est appeler la pire des défaites, la défaite sans combat, la défaite parce que l’on a déposé les armes (théoriques et organisationnelles) avant même que l’ennemi n’ait montré les dents, la défaite qui casse la continuité de l’histoire du mouvement ouvrier. Jamais PTB ne parle de la lutte : il se place en permanence en conseiller des gestionnaires de l’état bourgeois, en comptable, en donneur de leçons, jamais évidemment en avant-garde ni même en compagnon du prolétariat qui se bat.
La plupart des organisations qui aujourd’hui se revendiquent du communisme s’engagent au côté du prolétariat, ou des masses opprimées, dans ses luttes partielles, à court terme, essentiellement économiques, et – sauf dans leurs cercles les plus fermés et de façon purement rhétorique – se réfèrent peu à la perspective historique de renversement de l’ordre bourgeois. Mais au moins ces organisations posent la question en termes de classes, en termes de lutte. PTB a reculé bien en deça de ce stade déjà pitoyable.
2.2. Une saine comptabilité néo-zélandaise
Le premier (!) point du programme PTBiste vise à diminuer le prix des médicaments « grâce au véritable modèle kiwi » et à rendre « gratuite la consultation chez le généraliste ».
Si l’on se penche sur le modèle néo-zélandais de santé cité en exemple, on s’aperçoit qu’il n’est pas étranger aux intérêts de certaines fractions de la bourgeoisie : le généraliste J. Germeaux (VLD) indique qu’en Nouvelle-Zélande, les généralistes ont reçu une partie de l’argent économisé grâce au « modèle kiwi « , et ont pu ainsi réorganiser à leur mode une partie des soins de santé.
PTB se pose ici en gestionnaire de l’assurance-maladie, indiquant des pistes pour « redresser la barre » budgétaire. Rudy Demotte manquait sans doute de conseillers équipés – non de la force théorique d’une analyse matérialiste de l’économie bourgeoise – mais de calculatrices. Soucieux de ne jamais dépasser l’horizon du capitalisme, PTB argue régulièrement (ici et dans d’autres points du programme) que ce qu’il propose est déjà appliqué dans d’autres pays capitalistes. En effet, la légitimité de PTB aux yeux de la bourgeoisie est à ce prix : s’ils en venaient à inclure dans leur programme des éléments dont la pleine réalisation nécessitait le dépassement du capitalisme, ils leur serait plus difficile de s’attirer la confiance des fractions de la petite-bourgeoisie de « gauche » qu’ils cherchent de toute évidence à courtiser. L’effort minimal consistant à réclamer « la fin des licenciements, des délocalisations » ou même ici « la médecine universellement gratuite » les dépasse clairement.
Pourtant, la question de l’industrie pharmaceutique n’en finit pas de démontrer l’horreur du mode de production capitaliste. Nous sommes face à un secteur du capital qui tue les humains par centaines de millions (ainsi les moyens consacrés à la lutte contre le SIDA, contre le paludisme, sont dérisoires par rapport aux budgets de ces monstres capitalistes), s’appuyant sur la propriété privée des moyens intellectuels de production, les brevets, donc sur des éléments immatériels dont la pérennité est uniquement garantie par la superstructure légale bourgeoise, et donc in fine par l’Etat bourgeois, son pouvoir politique et militaire. La contradiction entre les besoins élémentaires des hommes – se soigner pour sauver leur vie – et la superstructure bourgeoise apparaît ici de façon criante. Nulle allusion à cette réalité dans la prose PTBist.
Qu’en est-il exactement de ce modèle kiwi ? S’agit-il d’un contrôle étatique total des prix sur les médicaments (dont le remboursement reste partiel !) ? Même pas ! La revendication du contrôle par l’Etat des prix de moyens d’existence du prolétaire (dont font partie les médicaments) est une revendication soit réformiste, soit utopiste, mais qui ne peut mener à la question de la lutte révolutionnaire, sinon en posant d’emblée la question de la distribution planifiée, de la nationalisation de la production. Mais rien de cela chez PTB : il s’agit seulement de faire jouer la concurrence entre capitalistes, à la façon des marchés publics. PTB redécouvre les vertus de la concurrence, source infinie d’anarchie et de gaspillage, qui – par miracle – aux mains de l’Etat bourgeois, pourrait être outil de régulation sociale et de bien-être populaire. Merci Adam Smith.
2.3. La « facture énergétique »
Ce point du programme du PTB a pour but de diminuer « notre »(8) facture d’énergie de 20%, via un abaissement de la TVA sur le gaz et l’électricité, la création d’entreprises publiques pour l’approvisionnement en énergie au niveau communal et intercommunal à côté des firmes privées existantes.
La politique énergétique du capitalisme révèle en effet de nombreuses contradictions insolubles du mode de production capitalisme : l’exploitation anarchique des forces de la nature, qui ne peut perdurer à long terme ; la nécessité pour l’état bourgeois à un stade de son développement de se substituer aux capitalistes privés pour développer certaines formes d’énergie (telle l’énergie nucléaire) et d’industrie lourde ; le caractère intenable d’une production énergétique non planifiée.
PTB se place à ce propos, non du point de vue du prolétaire qui voit son exploitation s’accroître et la valeur de sa force de travail se réduire toujours davantage, et approcher de plus en plus son minimum physiologique (càd le minimum en-dessous duquel il lui est impossible de reproduire tout simplement son existence matérielle), mais du point de vue comptable de l’Etat bourgeois. PTB, qui décidément brigue le Ministère des Finances, propose de prélever une partie des « superprofits » d’Electrabel pour alléger la facture énergétique des ménages. La taxe sur ces superprofits – car la possibilité de faire des « superprofits « , voire tout simplement des profits par l’exploitation du prolétariat, n’est même pas mise en cause – serait de plus « exceptionnelle » : PTB prend garde à rassurer les actionnaires de Suez-Electrabel : il se pose en ennemi « exceptionnel » du « supercapitalisme » qui fait des « superprofits », mais en bon collaborateur du capitalisme et de ses profits.
A la manière de la Grande-Bretagne (un pays probablement socialiste), PTB propose de taxer les bénéfices « indécents » des compagnies pétrolières : clairement, le capitalisme lui-même, et l’extraction « normale » de la plus-value, semblent décents à PTB.
Comme objectif lointain, à mettre au conditionnel, PTB indique que la production énergétique « devrait passer aux mains des pouvoirs publics », mais – se rendant compte du caractère profondément subversif de mesures qui furent pourtant nécessaires à une époque assez proche au développement économique capitaliste, et dont l’abandon résulte d’un rapport de force défavorable au prolétariat, PTB se contente de revendiquer la création d’intercommunales publiques pour le transport et la distribution de l’énergie, à côté des firmes privées. La revendication de la nationalisation du secteur de l’énergie est bien loin : cependant, PTB dans un accès de naïveté ou de stupidité, indique que cette timide incursion du secteur public dans le domaine de l’énergie (de son transport et de sa distribution donc) permet d’en établir une « planification à long terme ». C’est ignorer que la planification à long terme est contradictoire par nature avec le mode de production capitaliste.
Le développement du capitalisme porte en lui les germes de l’organisation socialiste de la production, par la socialisation croissante de sa production, au niveau national et international. La prise en mains de secteurs industriels par l’Etat, contraint ou dirigé par le prolétariat, est une arme puissante aux mains des opprimés. Quant à lui, PTB, comme toujours, ignore toute position de classe.
Et là, nous avons une de ces splendides énormités, de ces sommets de ridicule, qui émaillent le programme de PTB : « dans l’attente de telles entreprises publiques, les communes peuvent ouvrir un guichet d’information ». Eh oui, selon PTB, les communistes « attendent » la bienveillance de l’état bourgeois pour que leurs revendications soient réalisées, et entretemps veulent imposer l’obligation d’ « aider le consommateur à faire ses choix ». Ce point est repris, très sérieusement, dans les trois revendications de PTB en matière de politique énergétique.
2.4. Chômage et emplois stables
Dans le 3e point de son programme, PTB revendique le plein emploi, quelques améliorations du droit du travail, le droit à la prépension avec embauche compensatoire et des sanctions contre les « entreprises rentables qui licencient massivement »
A nouveau, PTB se place ici entièrement du point de vue de la gestion capitaliste de la société. Nulle allusion à cette simple réalité que le chômage – par la constitution d’une armée de réserve des prolétaires à l’usage du Capital – et la précarisation du salariat sont bien la condition (via la mise en concurrence des prolétaires) du maintien de profits et de taux d’exploitation élevés.
Oui, il est juste de se battre avec le prolétariat pour le maintien d’un droit du travail conquis de haute lutte à une époque où le rapport de forces lui était moins défavorable ; mais nos mots d’ordre ne doivent pas se subordonner à la logique capitaliste : il ne s’agit pas de déterminer si une entreprise est « rentable » ou non – les capitalistes sauront comment magouiller leur comptabilité – pour affirmer un simple mot d’ordre, spontanément émis par les travailleurs en lutte : « pas de licenciement, pas de restructuration, pas de délocalisation ».
Et ce n’est pas de sanctions qu’il faut menacer les patrons criminels : c’est de la colère implacable du prolétariat en lutte. Ce n’est évidemment pas la logique d’un parti légaliste et électoraliste.
2.5. Ecologie
PTB part du rejet des gaz à effet de serre pour défendre une série de mesures, essentiellement techniques, liées à l’organisation des transports (des personnes ou des marchandises) ou à l’économie d’énergie par les particuliers. Il prône également l’abandon de l’énergie nucléaire et du charbon.
Selon PTB, « ce n’est que lorsque les grandes entreprises sont la propriété de la communauté et que l’économie est planifiée (…) que [l’on peut passer à] une production et à des transports respectueux de l’environnement ». Bons élèves de la pensée dominante écologiste, PTB – qui se refuse à démasquer les contradictions inhérentes et léthales au mode de production capitaliste – affirme que « pour respecter l’environnement », le capitalisme doit être dépassé. Effectivement, la question de l’exploitation des forces de la nature met en évidence le caractère caduc des rapports de production capitalistes.
Mais « respecter l’environnement » est une expression totalement creuse de sens. Le capitalisme a mis à son service, au cours des 30 dernières années, l’idéologie écologiste afin de justifier son incapacité à continuer à développer les forces productives, son incapacité à assurer la poursuite du développement de la qualité de vie du prolétariat – même dans les pays dominants. Aujourd’hui, les prolétaires savent que – sous le capitalisme – la génération qui les suit vivra moins bien qu’eux. Le capitalisme a trouvé le bouc-émissaire pour éviter que l’on pose la question de son dépassement historique : la nécessité de « respecter l’environnement ».
Ainsi, incapable de poser rationnellement et collectivement la question de l’énergie nucléaire, la « gauche » de la bourgeoisie (c’est-à-dire les fractions de la bourgeoisie qui n’ont pas d’intérêts immédiats et concrets dans l’exploitation de cette source d’énergie) rejette le nucléaire sans poser rationnellement et scientifiquement la question des déchets et des dangers. Le problème de la fusion nucléaire(9), dont la faisabilité technologique était déjà discutée il y a 40 ans est à ce titre révélateur : son développement potentiel requiert des quantités énormes de richesse sociale pour des bénéfices hypothétiques mais immenses, mais ces bénéfices sont trop lointains la myopie capitaliste, et surtout pour les capitalistes privés particuliers. C’est ainsi qu’un consortium mondial est actuellement mis en place, à une lenteur d’escargot, et – contredisant le catéchisme capitaliste du moment – essentiellement sur des fonds publics, pour explorer cette forme d’énergie qui pourrait apporter une réponse remarquable aux problèmes énergétiques.
La question qui se pose à l’humanité est celle du développement de ses forces productives, donc de l’exploitation rationnelle, contrôlée et durable des forces de la nature, par l’accroissement de ses connaissances et de ses capacités technologiques et scientifiques. Cette question ne peut clairement plus être résolue dans le cadre des rapports de production capitaliste.
Il ne s’agit pas pour les communistes de demander aux « consommateurs » de placer du double vitrage subventionné par l’Etat, ou de demander aux producteurs de respecter un certain nombre de normes techniques visant à diminuer le gaspillage, comme le propose PTB, mais de condamner le capitalisme comme source inépuisable de gaspillage et d’anarchie, comme cause principale de la destruction catastrophique des ressources naturelles, et surtout de la ruine universelle de l’humanité.
2.6. Impôt sur la fortune
PTB propose un impôt sur la partie de la fortune dépassant 500 000 euros.
Citant sept autres pays européens appliquant un tel impôt, PTB entre totalement dans une logique de « gauche » de gouvernement, visant à équilibrer les budgets de l’état bourgeois, en grevant de façon très modérée les plus-values arrachées par les capitalistes au prolétariat. Il est remarquable, que, en passant, PTB veille à rassurer les détenteurs de « fortunes modestes » possédant deux habitations dépassant ensemble les 500 000 euros, et louant même – en capitalistes – une de leurs habitations : PTB ne veut pas inquiéter la petite-bourgeoisie.
2.7. Autres points
Après avoir discuté ces cinq points du programme du PTB – qu’ils estiment » prioritaires » – nous évoquons plus brièvement les vingt autres points, afin d’éviter de nous répéter abusivement.
PTB propose d’instaurer une loi sur les loyers (point 8 de leur programme), fixant les prix des logements. A ce propos, PTB discute la nécessité de construire de nouveaux logements sociaux, le blocage de loyers, … – sans évoquer la contradiction de classe révélée par ce problème.
PTB discute longuement la part du salaire consacrée aux loyers. Engels a montré que cette question est économiquement secondaire (ce raisonnement s’applique également aux points 1 et 3 ci-dessus, le « modèle kiwi » et la « facture énergétique ») : ceci « vaut pour toutes les réformes dites sociales qui tendent à (…) abaisser le prix des moyens d’existence de l’ouvrier. En effet : ou bien elles sont appliquées d’une façon générale et il s’ensuit une diminution de salaire correspondante, ou bien elles restent des expériences isolées et le simple fait d’être des exceptions démontre que leur application à grande échelle est incompatible avec le mode de production capitaliste en vigueur « (10). Sur ces différentes questions, PTB est incapable de poser les questions centrales : celle de l’exploitation capitaliste et de la lutte du prolétariat contre cette exploitation.
Passons sur les points 9 à 11, dans lesquels – pour le calcul des pensions, du salaire minimal, du système fiscal – PTB se présente en parti de « gauche » de gouvernement, comptable et gestionnaire de l’état bourgeois. On relèvera cependant la fixation PTBiste sur les sacs-poubelle: dans un acte de bravoure inouï, magnifique fait d’armes de la lutte pour le socialisme, PTB se targue d’avoir récolté 5000 signatures à Herstal, faisant plier les autorités communales et réduisant le prix des sacs à 60 cents!(11) Ce parti est promis à un bel avenir.
Passons également sur les transports en commun, les bureaux de poste, et les clubs de marche (points 12, 13 et 15), dans lesquels le PTB s’affirme très « proche des gens », mais bien loin du cœur de la lutte prolétarienne.
Le point 16 pose la question de l’égalité homme-femme, de façon très concrète, sans se référer à un féminisme idéal ou formel. Le lien avec la lutte des classes n’est toutefois pas mis en évidence. On remarquera cependant que, sans doute par volonté conciliatrice envers une partie de leur électorat marqué par les idéologies religieuses les plus réactionnaires, PTB omet totalement de mentionner l’oppression spécifique subie par de nombreuses femmes immigrées, et la lutte nécessaire contre l’aliénation religieuse qui maintient ces femmes dans de triples chaînes : celles de la religion, celles du patriarcat, et surtout celles de l’exploitation capitaliste.
Le point 17 vise à une meilleure protection des délégués syndicaux, et à l’interdiction de l’intervention des tribunaux dans les conflits sociaux.
Ici enfin, PTB pose la question de la lutte prolétarienne, mais en la cantonnant d’emblée au champ syndical et légal. Les révolutionnaires ont le devoir de soutenir toutes les luttes prolétariennes, syndicales ou extra-syndicales, pour la défense des intérêts immédiats des travailleurs. Les syndicats – dont les directions se consacrent entièrement à la collaboration de classe – représentent en effet un maigre mais indispensable garde-fou contre la brutalité du capital. Les communistes doivent sont simultanément soutenir ces luttes partielles et immédiates et dénoncer – théoriquement et pratiquement – la fonction historique générale du trade-unionisme, qui contribue à la » paix sociale » bourgeoise.
Il n’est pas innocent que la seule allusion à la lutte de classes dans le programme du PTB soit limitée par l’horizon syndical, » trade-unioniste « . En effet, dès le début des années 80, PTB affirmat que « lLa lutte légale et syndicale est la forme [ de lutte ] principale [ aujourd’hui et en Belgique ] » et à partir de là, la tâche des marxistes est qu’ils » généralisent, organisent et rendent conscientes les formes de lutte que les travailleurs développent spontanément. « . Depuis plus de 25 ans, PTB a renoncé à la notion même d’avant-garde révolutionnaire : la tâche des communistes se bornait déjà pour eux à organiser et centraliser les luttes spontanées. Marx et Engels nous ont appris que ces luttes réformistes ne peuvent être dépassées spontanément par le prolétariat, et que le rôle du parti est précisément d’apporter au prolétariat les armes lui permettant de poursuivre ses intérêts généraux et historiques.
La ligne actuelle du PTB se situe donc dans l’exacte continuité de leur ligne des années 80, épurée à présent de toute allusion de principe au combat révolutionnaire.
Nous rejoignons le slogan du PTB visant l’interdiction des interventions de la justice bourgeoise dans les conflits sociaux : cependant le droit de grève fut obtenu par la lutte prolétarienne, c’est la lutte prolétarienne – et non des bêlements parlementaristes – qui permettra de le préserver. Les communistes soutiennent toutes les formes de lutte que développe le prolétariat contre ses exploiteurs, que celles-ci se déploient ou non dans le champ de la légalité bourgeoise.
On peut penser que cette reconnaissance par le PTB des formes les plus limitées et partielles des luttes prolétariennes, dans leur cadre syndical le plus restreint – alors que le concept même de lutte populaire lui semble aujourd’hui tabou – est lié à leur implantation ouvrière historique , en particulier parmi les délégués (avec les limites et compromissions que cela a toujours impliqué).
Dans leur point 18, PTB revendique « plus de participation à la politique nationale et européenne ». Un examen attentif ne nous a pas permis de déterminer exactement quel est le sujet qui devrait « participer davantage à la politique » : il semblerait que ce soit « le peuple et ses représentants élus » (par opposition au gouvernement « non élu »). Ceci définit pour PTB le « processus démocratique ».
Attendant sa légitimité de la farce électorale bourgeoise, PTB insiste lourdement (à trois reprises) sur le caractère proportionnel du scrutin, afin évidemment d’accroître sa « représentativité » – en proposant, par ailleurs, la possibilité d’édicter des lois par » referendum » (forme de scrutin qui, pas plus que les élections bourgeoises, ne peut servir la cause du prolétariat).
Ici et aujourd’hui, la participation aux élections a pour seule fonction de légitimer les formes actuelles de domination politique de la bourgeoisie : le devoir des communistes est de les dénoncer comme telles. « Plus la démocratie est puissamment développée, plus la Bourse et les banquiers se soumettent les parlements bourgeois » (Lénine)
Aux points 20 et 21, PTB traite de la question des populations immigrées, en se limitant aux questions de légalité bourgeoise : nationalité, papiers et titres de séjour. On remarquera tout d’abord que PTB ne démontre pas le lien essentiel entre cette question et l’oppression des « pays du Sud » (à qui on doit « donner une chance de voler de leurs propres ailes », selon le point 24, essentiellement via l’ « annulation de la dette » et l’ « aide au développement »).
Les délocalisations augmentent le taux de chômage dans les métropoles impérialistes, accélèrent considérablement le développement de l’industrie légère capitaliste dans les pays dépendants, remplaçant de façon accélérée les modes de production antérieurs subsistants par le mode de production capitaliste, créant là aussi un chômage massif, et par la loi de la valeur une destruction de l’agriculture locale de subsistance et de l’industrie locale existantes. Selon le BIT, en 2005, la moitié des 2.8 milliards de travailleurs dans le monde vivent sous le seuil de pauvreté. En effet, la différence énorme de la valeur de la force de travail entre les pays dépendants et les pays de la métropole est le facteur permettant aux capitalistes de piller ses pays, en y déplaçant leurs capitaux pour y réaliser des profits énormes. Elle impose également aux capitalistes de réguler, voire d’empêcher, le déplacement international des travailleurs, c’est-à-dire d’établir des barrières protectionnistes sur la marchandise « force de travail »
Quant aux « solutions » apportées par PTB (aide au développement, annulation de la dette), les mécanismes décrits ci-dessus – simples conséquences de la loi de la valeur au niveau international – montrent qu’elles ne peuvent résoudre le problème de la domination impérialiste sur les pays de la périphérie, de la misère dans laquelle les trois-quarts de l’humanité sont maintenus.
Si bien sûr les communistes soutiennent les travailleurs immigrés et les sans-papiers dans leurs luttes contre l’oppression et la répression spécifiques dont ils sont l’objet, ils conçoivent ce combat dans le cadre de l’internationalisme prolétarien : les travailleurs des pays impérialistes doivent soutenir la lutte des travailleurs de la périphérie qui vivent dans la misère à cause de la domination impérialiste.
La solidarité avec les sans-papiers victimes de la répression bourgeoise dans nos pays est donc indissolublement liée à la solidarité avec la résistance irakienne contre l’occupation impérialiste, avec la résistance des peuples africains contre l’impérialisme français, avec la résistance de tous les peuples opprimés par l’impérialisme, car « un peuple qui en opprime un autre ne saurait être libre « . (Marx)
Les communistes doivent aux peuples en lutte une indéfectible solidarité, que ces peuples aient pu conquérir ou maintenir un certain nombre de victoires (comme à Cuba, en Bolivie ou au Venezuela). Lorsque PTB parle de solidarité internationale (point 25), ce n’est pas avec les peuples et avec leur combat, mais avec les « pays qui oeuvrent pour la justice sociale », sans comprendre que – quel que soit l’état du rapport de force – ce sont les masses populaires qu’il faut soutenir, avant des états qui – quels que soient les mérites et le caractère populaire que l’on peut peu ou prou leur reconnaître – ne sont pas (pas encore, ou plus) aujourd’hui en phase de transition vers le socialisme.
On notera au passage que PTB ne soutient même pas la juste lutte de libération du peuple palestinien (mais revendique la reconnaissance par la Belgique de l’ « Etat palestinien », cette entité fantoche et asphyxiée politiquement et économiquement par le sionisme) et reconnaît implicitement l’Etat sioniste. Les communistes ne « reconnaissent » la légitimité d’aucun état bourgeois, et soutiennent les peuples dans tous leurs modes de combat.
Le respect total de la légalité bourgeoise par PTB s’exprime très clairement dans le point 22, traitant de la « criminalité » : la solution, selon PTB, passe par les flics de quartier, les accompagnateurs de bus, les concierges et l’enseignement.
Autrement dit, PTB envisage la question de la criminalité de la même façon que toute la « gauche » petite-bourgeoise, de Besancenot à Ségolène Royal.
« Est-il plus grave de voler une banque, que de fonder une banque ? » (B. Brecht)
La véritable criminalité, c’est celle de l’exploitation du salariat. La véritable insécurité, c’est celle de l’esclavage salarié. La société dans laquelle nous vivons a pour base la propriété privée des moyens de production, et donc le vol institutionnel – en parfaite cohérence avec les lois de l’économie marchande, et avec la légalité de la bourgeoisie – de la majeure partie de la vie des prolétaires. La barbarie de l’opprimé n’est que le reflet de la barbarie de l’oppresseur.
Quand PTB soutient la police de proximité, il fait mine d’ignorer que la jeunesse est bien consciente que la police n’est que le bras armé quotidien d’une organisation de la société qui, au mieux, les réduit en esclavage, au pire les marginalise.
Les communistes condamnent les formes légales du vol et de la barbarie (propriété privée des moyens de production, exploitation) comme ses formes illégales (délinquance, banditisme), mais comprennent que les secondes ne sont que le produit des premières.
Quand, rejoignant le chœur bien-pensant des idéologues de la justice bourgeoise (incluant même Sarkozy), PTB propose de mettre « la victime au centre », en indiquant que « les auteurs doivent prendre conscience de ce qu’ils ont infligé », ils déplacent le problème sur le plan de la conscience et des idées : les actionnaires, les capitalistes, savent bien ce qu’ils infligent au prolétariat, la misère, les quinze mille gosses qui crèvent de faim chaque jour à cause de leurs agissements. Ca ne les empêche pas de dormir. Ca n’empêche pas non plus PTB de qualifier de « crimes » les barbaries individuelles commises dans le cadre d’un système qu’il respecte et dont il cherche à tirer sa légitimité, un système qui commet chaque jour contre l’humanité, les crimes les plus innommables.
Nous, communistes, voulons mettre fin au crime.
Au point 23, PTB fait l’éloge de la paix, prône la neutralité, dénonce les accords militaires secrets avec les USA et indique que l’armée « ne doit avoir qu’un rôle défensif, [sans] participation aux interventions étrangères »
Si l’on comprend bien PTB, le seul rôle de l’armée doit être la répression militaire des luttes prolétariennes : telle est la fonction de l’appareil militaire de la bourgeoisie. Soyons indulgent : PTB ignore à ce point la violence des masses que ceci a dû lui échapper : il est naturel pour les pacifistes petits-bourgeois de laisser le monopole de la violence à la bourgeoisie, ses flics et son armée.
Il n’y a pas de capitalisme sans guerre, pas de paix sans révolution. La guerre est un produit cyclique, inévitable, du mode de production capitaliste arrivé à son stade impérialiste. Pour combattre la guerre impérialiste, il faut combattre le mode de production qui l’engendre ; pour se donner les moyens de le combattre, il faut se préparer à la guerre de classe, expression transitoire et nécessaire de la violence révolutionnaire des masses
Les communistes ne promeuvent pas la » neutralité » de leur Etat bourgeois, mais le défaitisme révolutionnaire dans le cadre des guerres impérialistes. Les communistes dans chaque camp doivent travailler à la défaite de leur propre bourgeoisie, non bien sûr en vue de la victoire de la bourgeoisie adverse, mais en vue de l’affaiblissement des bourgeoisies des deux camps et du basculement du rapport de forces en faveur du prolétariat
PTB a renoncé même à se draper dans une fierté révolutionnaire factice : ils sont passés avec armes (virtuelles) et bagages (sacs-poubelle) d’un révisionnisme instable à un réformisme démocrate bourgeois assumé.
Comme toute la » gauche » bourgeoise, ils continueront à tenter de détourner les luttes du prolétariat vers des leurres sans jamais réussir à duper le peuple ; ils continueront à proposer des aménagements inefficaces, utopiques ou dérisoires, de la barbarie capitaliste.
Nous souhaitons à PTB un beau parcours dans la politique parlementariste ; nous leur souhaitons d’obtenir tous les ministères qu’ils briguent, et sommes profondément soulagés à l’idée qu’ils n’encombreront plus le terrain de la lutte prolétarienne. Enfin, ils ne saliront plus de leurs initiales les idées de la Révolution, et seront condamnés par l’Histoire aux côtés de leurs maîtres bourgeois. Enfin, ils se rangent explicitement du côté des ennemis du peuple.
Bon débarras.
NOTE :
1. Dans les années 80 et 90 en Belgique, PTB sa complaisait à qualifier de fascistes et de provocateurs tous ceux qui osaient les critiquer sur une base de classe.
Cf. en particulier http://www.cellulescommunistescombattantes.be/PTB.htm
2. Raoul Hedebouw, dans Le Journal du Mardi, 24 mars 2008.
3. Raoul Hedebouw, dans Le Journal du Mardi, op. cit.
4. Lénine, De l’Etat
6. Marx, Pour une Critique de la Philosophie du Droit de Hegel
7. A la timide exception du point 17, visant à protéger les délégués syndicaux – nous y reviendrons
8. Celle « des gens » donc, puisqu’on peut imaginer que « nous » sommes « des gens ». Les catégories PTBistes sont bien insondables !
9. Forme d’énergie nucléaire produisant beaucoup moins de déchets et consommant beaucoup moins de matériau fissile (plutonium, uranium) que l’actuelle fission. Uniquement mise au point aujourd’hui dans les « bombes H »
10. Engels, La Question du Logement
11. Interview de Raoul Hedebouw, Journal du Mardi, op cit
Le 7 octobre 2001, moins d’un mois après l’attaque du WTC, les USA bombardaient l’Afghanistan. C’était le début d’une guerre dont le premier acte prit fin en novembre 2001, avec la chute du régime des talibans. Ceux-ci entamèrent une guerre irrégulière qui ne cesse de gagner en intensité, provoquant un engagement impérialiste de plus en plus important. La mise en place du régime fantoche d’Hamid Karzaï en 2004 n’y a rien changé: sept ans après les premiers bombardements, la situation de l’Afghanistan est catastrophique.
L’insurrection a une présence permanente dans 72% du pays (54% en novembre 2007). Les talibans constituent de facto le pouvoir dans de nombreuses localités. Ils sont aux portes de la capitale et s’infiltrent dans la ville à leur guise. Sur les quatre accès menant à Kaboul, trois sont sous le feu des insurgés. Ceux-ci s’appuyent sur le mécontentement populaire contre l’OTAN et ses bombardements meurtriers, contre le gouvernement de Kaboul et sa corruption, contre le sous-développement chronique en dépit des milliards de dollars d’aide. Cette situation, et le simple fait de l’occupation, ont permis aux talibans d’élargir leur base de soutien traditionnel. La propagande occidentale qualifie de « terroristes » tous les combattants anti-occidentaux en Afghanistan. Pourtant, la plupart des insurgés (qu’ils soient des nationalistes pashtounes, des fondamentalistes islamistes, ou des guerriers tribaux), s’ils peuvent côtoyer des partisans du « jihad global », ne relèvent pas de cette mouvance. Leur objectif est simplement de chasser de leur pays les troupes « infidèles ». Leur modèle social est clairement réactionnaire, mais il ne diffère que peu de celui du régime fantoche de Karzaï.
La situation économique, sociale et politique des Afghans se dégrade. L’Afghanistan ne dispose toujours pas des services de base (électricité, eau courante, autosuffisance alimentaire) et il affiche le deuxième taux de mortalité le plus élevé du monde chez les nourrissons, après la Sierra Leone, avec 165 décès pour 1.000 naissances vivantes, selon l’UNICEF. Selon le sondage d’une ONG environ 60% des Afghans considèrent que l’administration actuelle est la plus corrompue de l’histoire récente du pays. Pour 93% des Afghans, un pot de vin est nécessaire pour accéder aux services publics. 2007 a été l’année record mondial de la récolte d’opium, et 90% de la production provient d’Afghanistan. La production d’héroïne en Afghanistan a augmenté de 34% en 2007, selon l’Organe International de Contrôle des Stupéfiants. Le trafic de drogue représente 60% du PNB du pays, et les barons de la drogue se retrouvent au Parlement. Le propre frère du président Karzaï est mis en cause.
Les justifications présentées par la propagande impérialiste pour cette guerre sont chaque jour davantage infirmée par la réalité. Le droit des femmes avait été abondament évoqués. Rappelons que l’époque où les femmes ont disposé du plus de droits a été la période communiste, et qu’alors l’Occident armait les féodaux islamistes avec la bénédiction du Parti Socialiste, du PTB et de quelques autres (lire la presse militante de l’époque est très instructif). Si, du point de vue juridique, la situation des femmes afghanes est un peu meilleure que sous les talibans, le niveau de la violence contre les femmes en Afghanistan reste le plus élevé du monde, et 57% des filles sont mariées avant l’âge légal. Le régime de Karzaï ne distingue pas entre entre une femmes qui a été violée et une femme adultère : deux tiers des prisonnières ont été condamnées pour relations sexuelles illégales, mais sont en fait des victimes de viols. Le nombre de femmes qui tentent de mettre fin à leurs jours en s’immolant augmente (au moins 184 cas en 2007 contre 106 en 2006).
Malgré la présence de près de 70.000 soldats de deux forces impérialistes multinationales (l’une de l’OTAN, l’autre sous commandement américain ), l’insurrection n’a fait que croître. Le nombre d’attaques des insurgés a augmenté de 400% entre 2002 et 2006. En 2007, selon un rapport du Secrétaire général de l’ONU, quelques 566 » incidents » étaient enregistrés en moyenne chaque mois contre 425 en 2006. 1.115 civils seraient morts au cours des sept premiers mois de l’année 2008, soit 24% de plus que les 902 victimes enregistrées au cours de la même période précédente. Les insurgés ont tués plusieurs ministres, Karzaï a lui-même échappé à plusieurs tentatives d’assassinat. Le nombre de tués au sein de la coalition internationale n’a fait que croître. Le seuil des 1.000 soldats tués en Afghanistan depuis la chute des talibans a été franchi le 27 octobre avec la mort de deux militaires de la coalition internationale dans un attentat-suicide à Mazar-i-Sharif, dans le nord du pays. Ces pertes ont dépassées celles enregistrées en Irak où les effectifs occidentaux sont pourtant deux fois plus importants qu’en Afghanistan.
L’escalade militaire impérialiste se traduit par une multiplication des bombardements aériens. En 2007 l’OTAN a largué 3.500 bombes en Afghanistan, soit plus qu’en Irak. L’aviation US effectue chaque mois, en moyenne, plus de 2.000 missions d’appui aérien rapproché aux troupes. Participent aux raids, en plus des chasseurs-bombardiers classiques (F-15E, F/A-18), des avions d’attaque au sol (A-10), mais aussi des bombardiers stratégiques B-1B (porteurs de 54 tonnes de bombes) et des drones. Conséquence de cette escalade, le nombre de civils tués en Afghanistan lors des bombardements aériens des forces des Etats-Unis et de l’OTAN a presque triplé entre 2006 et 2007. En 2006, 116 civils afghans ont été tués par des frappes aériennes de l’OTAN ou des forces américaines. En 2007, ils étaient 321. Les massacres n’ont pas manqué cette années : Rappelons les frappes sur une fête de mariage le 6 juillet et le bombardement du 22 août sur Azizabad (90 civils tués, dont 60 enfants).
Comme ces bombardements n’empêchent pas l’insurrection de s’amplifier, les Etats-Unis ont appelé à renforcer la force internationale. L’Allemagne a refusé, le Canada a hésité et la Belgique (comme la France) a accepté.
Les soldats belges étaient depuis plusieurs années en Afghanistan pour sécuriser l’aéroport de Kaboul, mais aussi pour participer à certains PRT (Provincial Reconstruction Teams). Le conseil des ministres a décidé, le 1er février dernier, le déploiement à Kandahar de quatre chasseurs-bombardiers F-16 (ainsi que de la centaine de militaires de soutien). Arrivés le 1er septembre, les quatre F-16 obéissent aux mêmes « règles opérationnelles » que leurs homologues hollandais également basés à Kandahar : les F-16 pourraient intervenir en appui aux troupes US régulièrement engagées au-delà de la frontière pakistanaise. Cela représente un pas supplémentaire dans la guerre. Car si la Belgique avait déjà déployé ponctuellement des F-16 (lors des élections), ils atterrissaient à Kaboul et n’intervenaient que dans le nord. C’est désormais au sud-est que les F-16 interviendront, soit la zone la plus dangereuse du pays. L’armée allemande, depuis le premier jour partenaire de l’armée belge en Afghanistan, a toujours refusé les missions offensives dans le sud. L’armée nérlandaise, par contre, avait accepté une mission offensive, ce qui lui a déjà coûté seize hommes de tués.
Autre nouvel effort de guerre belge en Afghanistan : la mise en place le 1er octobre de 20 militaires au sein d’une Operational Mentor and Liaison Team (OMLT), dont la mission sera de former et d’encadrer l’armée afghane. Ajoutons à cela la prolongation du commandement de l’aéroport de Kaboul par les Belges jusqu’au 1er octobre 2008 ; la prolongation et le renforcement de la mission de la Compagnie de protection jusqu’au 31 décembre 2008 ; la poursuite des opérations au sein du PRT allemand de Kunduz jusqu’au 31 décembre 2008 ; la présence d’officiers de liaison au sein du quartier-général de l’ISAF. La contribution belge à la guerre en Afghanistan coûtera : 30 millions d’euros en 2008 (24,5 millions en 2007).
Rappelons que, contrairement à ce qu’on alors laissé entendre De Gucht et De Crem, l’ONU n’a pas donné mandat à l’OTAN pour la guerre actuelle. En décembre 2001 la résolution 1386 établissait une force internationale pour « appuyer la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan en créant un environnement sécuritaire à Kaboul et ses environs ». L’OTAN a pris le contrôle de l’ISAF en août 2003 ; et en 2005, les USA ont engagés l’ISAF dans les opérations de contre-insurrection.
Barack Obama s’est engagé à dépêcher plus de troupes américaines en Afghanistan. La décision d’ajouter 20.000 soldats américains pour garantir la sécurité de l’élection présidentielle de 2009 en Afghanistan devrait être une de ses premières décisions. Cela refroidira peut-être l’obamania de ceux qui ne se sont pas donné la peine d’examiner la politique des divers autres présidents « démocrates » US, de Kennedy (débarquement à Cuba, guerre du Vietnam, etc.) à Clinton (bombardements du Soudan et de l’Irak, débarquement en Somalie, etc.).
Ah oui. Encore une chose : Selon le Service géologique des États-Unis, l’Afghanistan dispose d’une réserve de 1 000 km3 de gaz naturel, 570 km3 de pétrole et 210 km3 de gaz liquide…
Depuis 1994, au Kivu, de trois à cinq millions de Congolais ont été assassinés. Après les massacres au Rwanda et l’arrivée de Kagame au pouvoir dans ce pays, la guerre s’est poursuivie sur le territoire de la RDC : la lutte entre les puissances impérialistes pour le pillage des ressources minières nécessitait la déstabilisation du pouvoir central de Kinshasa et un nouveau partage des zones d’influences au bénéfice des multinationales minières appuyées par les gouvernements des pays impérialistes et néo-coloniaux. Les régimes de Kagame et de Museveni, le président de l’Uganda, sont devenu les instruments directs de ces pays pour ce nouveau partage.
Tout se passe comme si nous assistions à une nouvelle « Conférence de Berlin ». La conférence de Berlin fut l’organisation et la collaboration européenne pour le partage et la division de l’Afrique. Cette conférence débuta le 15 novembre 1884 à Berlin et finit le 26 février 1885. À l’initiative de Bismarck, l’Allemagne, l’Autriche-Hongrie, la Belgique, le Danemark, l’Espagne, la France, la Grande-Bretagne, l’Italie, les Pays-Bas, le Portugal, la Russie, la Suède-Norvège et la Turquie ainsi que les États-Unis y participèrent. Une conférence antérieure initialisa le débat sur la conquête des Congos et amorça ainsi le début des luttes coloniales. La conférence de Berlin aboutit donc à édicter les règles officielles de colonisation. L’impact direct sur les colonies fut une vague européenne de signature de traités engendrant des massacres afin de les obtenir.
Aujourdhui, il s’agit bien d’un conflit international dont le peuple congolais est la victime. Les opérations militaires s’accompagnent de campagnes de terreur et d’extermination des populations civiles. Une véritable guerre de conquête visant à briser toute forme de résistance patriotique et permettre le démantèlement politique et territorial de la RDC. Pour l’heure, il faut aussi punir le gouvernement Kabila pour ses écarts vis-à-vis des corrupteurs traditionnels et les contrats de semi troc avec les multinationales chinoises.
Le gouvernement belge est lui aussi l’instrument de cette agression. Naguère, il s’agissait d’encadrer l’armée nationale congolaise, de la « réorganiser », ainsi que l’appareil judiciaire et policier, notamment. Avec cette « aide » l’armée nationale subit un embargo sur les armes, souffre d’une carence de ressources et de l’anarchie qui règne dans le commandement.
Les bandes de N’Kunda et son CNDP ont pour rôles de contrôler les points de passage des minerais volés, en particulier le coltan, vers l’Ouganda et le Rwanda, de fixer les troupes congolaises et de déplacer les populations par la terreur et les massacres massifs. Au fallacieux prétexte de protéger la population congolaise d’origine rwandaise, nullement menacée et qui ne compte pas plus de 70 à 80.000 personnes. A noter que le vocabulaire utilisé à propos de la guerre en Yougoslavie – « génocide », « épuration ethnique »…- n’est pas d’usage dans les médias bourgeois, toujours propagandistes du néo-colonialisme et pratiquant le négationisme à propos de l’histoire coloniale.
L’UE n’a cessé d’intervenir dès l’origine de la guerre en envoyant des « émissaires » pour s’en remettre ensuite partiellement à la « communauté internationale », en l’occurrence l’ONU qui a constitué une force d’intervention, la MONUC, sensée garantir la souveraineté de la RDC et protéger la population. Cette MONUC est composée de pas moins de contingents de 18 pays, les pays africains étant les moins présents, chacun étant plus ou moins soumis aux directives et aux intérêts de leurs gouvernements respectifs. Cette force d’intervention, plus de 17.000 hommes est quasi totalement inefficace.
Outre le pillage organisé au profit de multinationales étatsuniennes et européennes, l’Afrique du Sud et la Chine sont sur les rangs des prédateurs dont les appétits ne se limitent pas au Kivu : il y a les diamants du Kasaï, le cuivre, l’uranium, le cobalt, le fer, le diamant, le radium du Shaba.
Quand il s’est agi de déterminer les causes réelles de l’agression, à savoir le pillage des matières premières au profit de sociétés occidentales, une commission a effectivement publié, en 2003, une liste de ces sociétés directement impliquées dans les trafics et l’entretien de bandes armées. Publication rapidement escamotée et sans aucun effet.
Derrière des sociétés-écrans » congolaises « , voire rwandaises, on trouve des sociétés comme la société mixte belgo-congolaise SOMIGL, l’allemande MASINGIRO, la nord-américaine CABOT-KEMET et une demi-douzaine de filiales du groupe français BOLLORE, toutes impliquées dans le pillage et l’agression.
Mention spéciale pour la société FORREST International S.A. dont le siège est à Wavre et qui exploite les minerais du Shaba, dont l’uranium et le cobalt, notamment. Cette société vient d’obtenir une immense concession pour l’extraction de l’uranium en Namibie, pays qualifié, comme le Congo, de » scandale géologique « . Le patron, George Forrest membre éminent de la grande bourgeoisie » belge « , avait tenté d’installer une usine de production de munition en Tanzanie, pays limitrophe du Congo et du Rwanda. ..La société est sans doute incluse dans le bilan du » Plan Marshall » lancé par le P.S. en Wallonie.
La Belgique, pion utile et obéissant de l’impérialisme
La rivalité entre les multinationales, soutenues par les gouvernements impérialistes, trouve son reflet dans le conflit qui se déroule au sein du gouvernement belge. C’est auprès de la secrétaire d’Etat étatsunienne, C.Rice, que le ministre des Affaires étrangères, K.De Gucht, a reçu ses instructions pour amplifier l’ingérence permanente des gouvernements belges dans les affaires de le R.D.C. Cela heurte d’autres intérêts, plus européens, défendus par le Commissaire européen à la coopération, L.Michel et consort.
C’est logiquement que le gouvernement Leterme est investi d’une mission de police et de renseignement. Simultanément il apporte, tout comme l’ONU dont la Belgique est membre de son Conseil de sécurité, son soutien à N’Kunda, tout en condamnant les massacres. Et condamne aussi la politique de Kabila qui tente de se dégager des pressions occidentale. L’argument de la corruption est d’une rare hypochrisie compte tenu du fait que la corruption est un élément fondamental du système néo-colonial.
D’autre part, la « coopération au développement » belge a toujours servi d’arme politique dans les pays néo-coloniaux, au Congo en particulier. Les ONG sont largement subsidiées et appartiennent toutes aux « piliers » entretenus par les partis bourgeois.
La revendication la plus » xtrème portée par les O N »G est celle de la remise de la dette. Il s’agit bien d’une revendication indispensable qui a, en quelque sorte un caractère pédagogique. Mais s’agissant de défendre la souveraineté populaire cette revendication met en quelque sorte la charrue avant les bœufs et escamote les problèmes des luttes de libération et des luttes révolutionnaires. La remise de la dette est aussi une mesure, parmi d’autres, qui s’inscrit dans le cadre des rapports entre pays impérialistes et pays sous tutelle.
Si complexe que soit la situation, c’est un devoir internationaliste de dénoncer la politique néo-coloniale menée par le gouvernement belge, l’impérialisme américain et celui de l’Union européenne. C’est un front dans lequel les marxistes-léninistes doivent jouer un rôle actif, préparant la voie à une solidarité concrète avec les patriotes et les révolutionnaires congolais
(première partie)
Le 15 janvier 1919, il y a 90 ans, à Berlin, Karl Liebknecht et Rosa Luxembourg tombaient sous les griffes des corps francs chargés d’écraser le mouvement révolutionnaire en Allemagne. Wilhelm Pieck, qui deviendra plus tard président de la République Démocratique Allemande, parvint heureusement à s’échapper, mais Rosa et Karl furent sauvagement torturés et abattus. Les meurtriers étaient des officiers réactionnaires passés d’une division de la Garde de Guillaume II à la tête des troupes de la contre-révolution sous le gouvernement social-démocrate. La voie de la terreur et de l’assassinat politiques était ouverte. Elle le restera pendant plus de 26 ans. Les noms de nos deux camarades, combattants héroïques de la classe ouvrière allemande, s’inscrivent parmi les premiers de la liste si longue de tous les martyrs – communistes, socialistes, démocrates – victimes du militarisme puis du fascisme hitlérien.
La social-démocratie allemande avait connu une progression exceptionnelle au cours des 30 années qui précédèrent la guerre impérialiste de 1914. Le nombre de voix socialistes s’était élevé régulièrement de 549.000 en 1984 à 4.250.000 en 1912. Le nombre des élus au Reichstag était passé de 24 à 110.
Il s’est formé, écrira Lénine élaborant les caractéristiques de l’impérialisme, » toute une couche sociale de parlementaires, de journalistes, de fonctionnaires du mouvement ouvrier, d’employés privilégiés, à partir de certains milieux du prolétariat, et cette couche ‘est intimement liée avec sa bourgeoisie nationale ; cette dernière la juge à sa juste valeur, et se l’est soumise « .
Ainsi la social-démocratie allemande répandit largement, au sein de la classe ouvrière, les illusions sur la possibilité d’un passage pacifique graduel au socialisme par les méthodes de la démocratie parlementaire bourgeoise.
Le 4 août 1914, le groupe socialiste au Reichstag, aveuglé de chauvinisme, vota les crédits de guerre malgré l’opposition de quelques députés avec Karl Liebknecht à leur tête.
“Après le 4 août, écrit Rosa Luxembourg, la social-démocratie allemande est devenue un cadavre puant. »
Seuls contre tous, nos glorieux camarades avec Clara Zetkin et Franz Mehring, s’adressent aux militants, dans tout le pays, pour les appeler à engager résolument la lutte contre la guerre impérialiste. Cet appel courageux a peu d’écho. Dès lors, Karl et Rosa montreront l’exemple avec audace et héroïsme. Le 2 décembre 1914, seuls sur les 110 députés social-démocrates, Karl Liebknecht et son ami Otto Rühle rompent la discipline, brisent » l’unité » avec les chauvins et les conciliateurs. Ils votent contre de nouveaux crédits de guerre.
Du haut de la tribune du Parlement, Karl Liebknecht appelle les ouvriers et les soldats d’Allemagne à tourner leurs armes contre leur gouvernement.
L’étincelle a brillé! Le combat ne s’éteindra plus, même quand Karl et Rosa seront jetés dans les prisons du Kaiser. Autour d’eux se groupent bientôt les militants restés fidèles au socialisme international, ceux qui mèneront la lutte illégale contre le véritable ennemi à l’intérieur même du pays. Le groupe « Spartakus » naît de cette gauche de la social-démocratie allemande.
La victoire de la Révolution socialiste d’octobre 1917 et l’offre de Lénine à tous les gouvernements et à tous les peuples d’une paix immédiate sans annexions et sans contributions soulèvent un grand espoir chez les ouvriers allemands. Sur le front de l’Est, des officiers furent déposés. Des « conseils d’ouvriers et de soldats » élus réclamèrent la conclusion immédiate de la paix.
Dans les arsenaux de Berlin, d’Allemagne du centre, de l’Ouest et du Sud jaillirent des grèves puissantes, traduisant la volonté de la classe ouvrière d’obtenir une paix immédiate et de renverser le gouvernement de la guerre. Lénine salua « cette action du prolétariat dans un pays enivré de nationalisme et empoisonné par le chauvinisme » comme « un fait de première importance marquant un tournant dans l’opinion du prolétariat allemand ».
Sentant la défaite militaire inévitable, redoutant le mouvement révolutionnaire qui se développe, les maîtres du pouvoir cherchaient une issue pour sauvegarder les positions dirigeantes du capital des monopoles et des banques ainsi que celles des grands propriétaires fonciers.
Depuis août 1914, un des chefs de la IIe Internationale, Karl Kautsky, offrait l’exemple des hésitations et des trahisons, du reniement complet du marxisme. Il avait déjà rédigé les projets pour une « économie de transition » qui ne risquait pas de porter la moindre atteinte à la puissance des capitalistes et des hobereaux. Quelle planche de salut pour ces Messieurs !
Alors le social-démocrate Bauer, deuxième président de la commission générale des syndicats, et Scheideman entrèrent dans le gouvernement, afin de prévenir une « révolution d’en bas » selon l’aveu cynique du secrétaire d’Etat à l’Extérieur. Rosa était emprisonnée à Breslau, Karl reclus au bagne de Luckau, mais le mouvement Spartakus tenait, le 1er octobre 1918, une importante conférence qui appelait la classe ouvrière à renverser le gouvernement de la guerre et exigeait notamment :
– l’expropriation du capital bancaire dans son ensemble, des mines et des aciéries, et de la grande propriété foncière ;
– une diminution importante de la durée du travail ;
– la fixation des salaires minima…
Novembre 1918 ! Les marins de Kiel viennent de refuser de prendre la mer. Ils ne veulent plus de la guerre .Ils constituent leurs conseils. Les grèves se multiplient. Des conseils d’ouvriers et de soldats se forment dans tout le pays. Le mouvement révolutionnaire se développe rapidement. Berlin se soulève à son tour et Karl Liebknecht qui vient d’être libéré après deux ans et demie de bagne s’adresse à la foule massée autour du palais impérial :
« Voici le moment de proclamer la libre République socialiste d’Allemagne… Il faut que nous rassemblions toutes nos forces afin d’édifier le gouvernement des ouvriers et soldats, afin de créer un nouvel ordre dans un Etat prolétarien, un ordre de paix, de bonheur et de liberté pour nos frères allemands, pour nos frères dans le monde entier. »
Ce n’est pas cet objectif que poursuivent la majorité des sociaux-démocrates.
Quand Guillaume II, renversé par le soulèvement populaire, s’enfuit en Hollande, le prince Max de Bade, chancelier impérial, confia le gouvernement au social-démocrate Ebert après que ce dernier eut promis de conduire les affaires dans le cadre de la Constitution de l’Allemagne impériale.
Entre le social-démocrate Ebert et Hindenburg l’accord se réalisa pour laisser le pouvoir militaire aux mains de l’Etat-major allemand. On exigea des ouvriers qu’ils livrent leurs armes tandis que les officiers réactionnaires prenaient la tête des corps francs et de milices armés contre le peuple. Entre Legien, chef de la commission générale des syndicats et Stinnes, le maître des trusts, l’accord se réalisa pour que l’on ne touche pas aux scandaleux bénéfices de guerre des marchands d’armements, pour que l’on respecte les privilèges de classe des magnats et des hobereaux.
C’est le gouvernement du social-démocrate Ebert, pour se concilier les puissances capitalistes occidentales, qui décida que les troupes allemandes continuent d’occuper les territoires d’Ukraine soviétiques pour y soutenir les ennemis du jeune pouvoir des Soviets.
C’est le gouvernement du social-démocrate Ebert qui décida l’envoi de troupes dans les pays baltes pour désarmer et étouffer le mouvement révolutionnaire.
Toutes ces trahisons se dissimulèrent sous l’épaisse fumée d’une propagande outrancière pour le « calme et l’ordre » la « socialisation sans troubler l’économie « . Malgré les efforts du mouvement spartakiste et des social-démocrates indépendants de gauche, le gouvernement Ebert-Noske-Scheideman, recueillit la majorité au premier congrès des « conseils » du Reich, le 16 décembre 1918.
Le congrès des conseils transmit l’ensemble du pouvoir au gouvernement Ebert-Scheideman. Il décida de recourir à l’élection immédiate de l’Assemblée nationale sans préparer les conditions d’élections démocratiques, notamment en laissant aux leviers de commande de l’Etat les principaux criminels de guerre.
La contre-révolution, encouragée ouvertement, entra aussitôt en lutte avec tous les moyens militaires dont elle disposait pour abattre les forces révolutionnaires avant l’ouverture de l’Assemblée nationale.
Les mêmes officiers qui écrasèrent les ouvriers révolutionnaires en 1919 sous le commandement du ministre socialiste de l’Intérieur Noske, et assassinèrent Karl et Rosa, prépareront la dictature fasciste et pousseront l’Allemagne dans la seconde guerre mondiale.
Mais Karl et Rosa resteront vivants dans le mouvement ouvrier. Ils ont donné un exemple impérissable de la lutte courageuse contre le nationalisme chauvin, et contre la guerre.
Au premier Congrès général des organisations socialistes des jeunes, en 1906 déjà, Karl Liebknecht présenta un rapport qui combattait avec vigueur le militarisme. Au congrès de Stuttgart de la II° Internationale, en 1909, Rosa Luxembourg fut aux côtés de Lénine pour faire adopter un amendement à la résolution sur « le militarisme et les conflits internationaux ». Cet amendement disait qu’au cas où l’on ne pourrait empêcher le déclenchement de la guerre impérialiste les ouvriers devraient utiliser la crise engendrée par la guerre pour hâter le renversement de la bourgeoisie. Tandis que les Scheideman et les Kautsky trahissaient ces décisions de 1907, reprises dans le Manifeste de Bâle en 1912, Liebknecht et Luxembourg engageaient l’action, même seuls, avec esprit de sacrifice et d’internationalisme prolétarien. Exaltant leur exemple, en avril 1917, Lénine dégagera cette règle de conduit communiste : « Quiconque veut aider les hésitants, doit d’abord cesser d’hésiter lui-même. »
[suite au prochain numéro]
Culture prolétarienne
La rubrique culturelle de ce numéro de Clarté est consacré à Edmond Dubrunfaut, à l’occasion de la prochaine grande exposition, organisée par l’Institut d’Histoire Ouvrière, Economique et Sociale (IHOES) consacrée à Edmond Dubrunfaut et à l’art mural (au Musée d’art wallon de Liège).
Notre dossier comprend un texte de Dubrunfaut, la chronologie de ses oeuvres. Ce numéro de Clarté est illustré de la série de peintures que Dubrunfaut avait réalisées par les 20 ans du Parti Communiste.
Dans l’extrait ci-dessous de L’avenir culturel de la communauté française (Editions de l’Institut Jules Destrée, 1979, réédité dans les Cahiers Marxistes n°137-138, novembre-décembre 1985), Dubrunfaut développe une belle analyse de la création collective, qu’il pratiqua à de nombreuses reprises. Dans ce texte également transparaît l’influence de la politique artistique révisionniste/réformiste qui consiste, fondamentalement, à demander aux » pouvoirs publics » (représentant quelle classe?) de contrebalancer le marché de l’art (ou l’art de marché) capitaliste.
Pourquoi le réalisme – Comment nous le comprenons – Vers une nouvelle synthèse des arts
Tout en voulant dépasser les querelles d’écoles qui souvent sont stériles, il faut se refuser de voir ériger en système des beaux-Arts » l’incertitude de la vérité « . Faudrait-il tout prendre, être ouvert à toutes les recherches, à toutes les trouvailles, même farfelues?
Quel est le critère d’analyse qui peut décider de la qualité d’une création? Qui dit goût des grands esthètes de ce monde, qui tranchent et décident des choix n’est pas affaire de classe, n’est pas affaire de société? C’est pourquoi la défense du réalisme, dans un pluralisme accepté et épaulé par les pouvoirs publics, paraît fondamentale. Le réalisme permet, dans des intégrations murales ou de synthèses – créées individuellement ou collectivement – d’établir, dès le départ, une certaine identité d’écriture qui, avec les divers apports sensibles, tente d’atteindre une unité de style.
Et plus précisément sur l’invention en groupe, quelques mots. Dans une composition commune, l’épanouissement d’un créateur, son comportement d’homme peuvent se valoriser et prendre une dimension, une grandeur à l’échelle des problèmes nouveaux abordés ensemble. L’interdisciplinarité et l’intercréation peuvent propulser la personnalité. Dans ce type de démarche, un artiste peut trouver sa véritable authenticité qu’il n’arrivait pas à percevoir dans sa » tour d’ivoire « . Le narcissisme et ses freins bénéficient ici d’autres miroirs qui permettent un dépassement de soi. Il suffit d’empêcher le passage du moi à un pulseur de groupe. Cette attitude implique une réelle communication d’idées, l’intervention de sensibilités diversifiées et si possible complémentaires. On redevient ainsi soi-même à une autre échelle, à une autre grandeur. La conduite créatrice prend une chaleur humaine plus fraternelle, souvent plus généreuse, où le métabolisme de l’angoisse se désorganise et se transforme pour devenir matière positive.
Il y a une assurance du faire et du dire qui s’affirme par l’exemple. Les points d’appui se consolident et l’apport collectif prend la mesure des concours individuels majeurs.
Dans une plastique commune, il y a interaction de beaucoup de facteurs. Si l’on prend possession de l’architecture sans projets, les idées et les perceptions de chacun s’élaborent en groupe et évoluent en conséquence. Par contre, il peut y avoir une esquisse, édifiée par plusieurs, ou par une personne. Dans le premier cas, la réalisation se développe un peu comme s’il s’agissait d’une création sans projet. Dans le deuxième cas, il est souhaitable que l’auteur des cartons prennent certaines responsabilités en tant que coordinateur lors de l’exécution. Dans tous les cas, tenter d’aller au-delà des apports créateurs individuels est souhaitable.
Il semble que cette perception, pour être grande, ne doive pas se limiter à une volonté préalable. Si l’on tient compte que cette action créatrice permet un véritable dépassement, l’oeuvre peut singulièrement élargir son apport poétique et sa portée humaine.
Pour ce faire, il faut donner des points d’appui communs. Le réalisme en est un, et les réalistes passent de plus en plus par l’implantation des arts dans les lieux publics, là où passent, vivent et se reposent les hommes. C’est là que se trouve un des avenirs de l’art.
A charge pour nous de veiller à en établir les limites en collant, par le quotidien, aux aspects humains, changeants et mouvants que nous mettons en place chez nous et dans le monde, et d’essayer de conserver, de transposer, de sublimer l’essence de ces changements, non par une représentation imagée de nos voeux et de nos désirs, mais en les saisissant dans leur matérialité, dans leurs aspects typiques, quand ils sont passés par le cerveau et le coeur des hommes et qu’ils sont devenus réalités vivantes.
Peut-être ces démarches continueront-elles à laisser sur leur faim bon nombre de créateurs actuels? Il importe qu’ils réfléchissent. La situation n’est pas sans issue. Le perpétuel scepticisme de quantité d’artistes n’a pas empêché la rénovation des techniques à portée murale, ni l’utilisation de nouvelles matières, ni la mise en place d’intégrations, ni les essais de synthèses.
1920: Naissance d’Edmond Dubrunfaut à Denain (France), le 21 avril. Etudes à l’Académie de Tournai et à l’Ecole Nationale Supérieure d’Architecture et des arts Décoratifs (professeur Charles Counhaye).
1937: Premiers cartons de tapisseries: Le faisan doré tissé à l’époque, et Le fourmilier.
1938 à 1942: Cartons de tapisseries: L’oiseau de feu, Les chèvres, Tournai, Le retour de la chasse et Le pain et le vin.
1943: Création de deux ateliers artisanaux de tissage à Tournai, les ateliers Leroy C. et Taquet R.
1943 à 1945: Série de dessins 50 témoignages. Production de nombreux cartons de fresques et de tapisseries: L’ouvrier blessé, Les cimentiers, Les scieurs de long, Les carriers, Le combat de coqs, La cartomancienne et la série de cartons pour un mausolée aux prisonniers et déportés politiques (1945). Durant ces quatre années également: production de tapisseries d’un esprit nouveau: Le chat aux épines, Les pintades, Le chat gris, La femme au tournesols, Les papillons et Les chats.
1945: Manifeste pour l’art mural. Etude d’un programme de rénovation de la tapisserie de haute et de basse lisse en Belgique.
1946: Membre de la « Jeune Peinture »; membre fondateur, avec Deltour et Somville, du « Centre de Rénovation de la Tapisserie de Tournai », de la société coopérative « La Tapisserie de Tournai », ainsi que du groupe « Forces Murales » et du mouvement « Art et Réalité ».
De 1947 à 1977: Professeur d’art monumental à l’Académie Royale des Beaux-Arts de Mons.
De 1947 à 1951: Tapisseries pour les ambassades de Belgique à l’étranger, dans le groupe « Forces Murales » avec Deltour et Somville (300 m²).
1948: Fresque pour la Maison Communale de Morcourt (Hainaut), avec Somville.
1949: Fresque pour le Palais de justice de Bruxelles (70 m²), avec Deltour et Somville.
1950: Fresque pour l’Ecole Moyenne de l’Etat à Overijse (84 m²) et pour l’exposition « Logis 50 » (16 m²), avec Somville.
1952: Tissus peints, Hommage aux travailleurs belges et Non à la guerre (150 m²), avec Deltour et Somville.
1953: Salle de réunion du syndicat de Verviers: Le Travailleur (15 m²), avec Somville.
1955: Cartons de vitraux: béton et verre, Les ouvriers du bâtiments, Les chèvres, avec Somville. Carton et mosaïque byzantine avec Somville.
1956: Céramiques murales pour la Crèche communale de Forest et tapisserie Les lavandières pour la Maison Communale d’Etterbeek (23 m²), avec Somville.
1957: A la gloire de Bruxelles, tapisserie, Ministère des affaires Economiques.
1957-1958: Décoration d’ensemble pour la salle du Conseil du Gouvernement Provincial du Brabant (six tapisseries, 85 m²), avec Somville.
1958: Décoration au polyester sur aluminium pour les bâtiments du Pard d’Osseghem à l’Exposition internationale et universelle de Bruxelles 1958 (160 m²), avec Somville.
1959: deux toiles marouflées pour la Ford Motors à Anvers (72 m²), avec Somville.
1960 à 1980: 500 tapisseries intégrées dans des architectures privées et publiques.
1965: Fresque Le chant de la ville pour le hall des bureaux de l’architecte Bertiaux à Mons (40 m²), avec Houfflin et Rousseau.
1966: Fresques Les chausseurs et Les ouvriers agricoles et peinture murale Vive la mariée pour la Maison Communale d’Erquelinnes (100m²), avec A. Houfflin et Rousseau.
1968: 450 m² de peinture murale pour un réfectoire à Cuesmes: Chantier naval, Le Borinage, La rentrée des foins et Battage d’été, avec Herla, Moulin, Faidherbe, Houfflin, Rousseau, Ch. Vienne et D. Vienne. Membre fondateur du groupe « Cuesmes ’68 ».
1969: Les arts plastiques et l’homme (Cahiers marxistes n°1).
1970: Peintures murales Les jeunes et la nature, Le salut des jeunes travailleurs, La jeunesse et le sport, La jeunesse et la nature et La jeunesse et la musique pour la Maison des Jeunes à Anderlecht (100 m²), avec Arnouldt, Herla, Moulin, Faidherbe, Houfflin, Ch. Vienne et D. Vienne.
1971: Cinq créations d’enfants et 400 m² de peinture murale sur vinyle pour la nouvelle clinique des Mutualités Socialistes à Tournai, avec Arnouldt, Herla, Moulin et Ch. Vienne. L’offrande aux malades, Le marché aux fleurs, La chasse sous-marine, Les pêcheurs, Le scaphandrier et la sirène, Le grand zodiaque, Provence, Jeux d’enfants, Hommage aux mamans.
1972: Peintures murales aux résines d’acryl: Le cosmos et la paix, Les cosmonautes, Les chevaux, Le théâtre et le cinéma à l’Ecole Normale de l’Etat à Nivelles (250 m²), avec Binche, Lembourg et Maroil. Voile de polyester Les travailleurs, dans les locaux de la FGTB à Tournai (11 m²), avec Houfflin. Peintures murales aux résines d’acryl Les archers, Combat de coqs, Les colombophiles, Détente, Les carriers, Les cimentiers, au réfectoire des usines Cimescaut à Antoing (75 m²), avec Arnouldt, Herla, Moulin, Houfflin, Ch. Vienne.
1973: Peinture murale aux résines d’acryl L’arbre de la vie et Les âges de l’homme, porte sculptée d’André Hupet à l’Hôtel Communal de Marchienne-au-Pont (50 m²), avec Houfflin. Peinture murale aux résines d’acryl sur fibres synthétiques Les étapes de la lutte syndicale dans la salle d’accueil de la CGSP à Bruxelles (15 m²), avec Houfflin.
1974: Peintures murales aux résines d’acryl: La destruction de notre environnement et Pour la présence et la conservation de notre environnement, réfectoire du Lycée de Morlanwelz (380 m²), avec Arnouldt, Herla, Houfflin, Rousseau, Ch. Vienne et D. Vienne. Céramiques monumentales exécutées aux usines Keramic à Courtrai: Le temps de l’amour, La promenade, Les épilobes, Le retour de la chasse, En bordure de forêt, Sur l’eau, au Logis à Watermael-Boitsfort (100 m²), avec A. Cape, C. Podolski et D. Maroil.
1975: Emaux de grand feu sur acier: Notre siècle au bassin de natation Quinot à Nivelles (40 m²), avec Maroil. Peintures aux résines d’acryl: La cueillette des tournesols à la Crèche communale d’Obourg-Mons 10 m²), avec Maroil.
1976: Emaux de grand feu sur acier: La terre en fleurs, L’action syndicale, La créativité, Les loisirs actifs, En verrerie, La céramique, En sidérurgie- La coulée, La mine, à la FGTB de Charleroi (140 m²), avec Cornil, Houfflin, Maroil, Rousseau. Emaux de grand feu sur acier: Le regard sur l’ère atomique, Une femme, une fleur, un oiseau, L’homme au tournesol – Hommage à Van Gogh,- Le chant triste du Chili, avec implantation d’un forum (1000 m²) et d’une signalisation humanisée sur l’ensemble du C.M.P.A. À Mons (anciens établissements Labor), avec Hupet, Maroil, Piron, Rousseau, Ch. Vienne. Tapisserie du 550e anniversaire de l’U.C.L. Pour Louvain-la-Neuve (16 m²).
1977: Peinture murale aux résines d’acryl: Le remembrement des terres – avant, pendant, après, dans la salle de réunions et le réfectoire de la Petite Propriété Terrienne à Mons 85 m²), avec Arnould, Moulin, rousseau et D. Vienne. Peintures murales aux résines d’acryl Les portes de notre monde: La porte du soleil (avec Le mythe d’Hélios, la photosynthèse, en mer, en forêt, L’effet de serre, Le chauffage solaire, Le four solaire, Les vacances, Le nouveau mythe solaire), La porte de la terre (avec L’entente entre les peuples: gage de notre avenir, Le choix: la folie atomique ou la Paix, La vie est quotidienne: les pêcheurs, les paysans, les citadins) et La porte de la lune (avec La ronde des cosmonautes, La lune des poètes, Hommage à Gagarine et Terechkova, La conquête de la lune, La formation des cosmonautes, La rencontre d’Einstein avec les savants, les techniciens et les cosmonautes, L’alunissage (Aldrin et Armstrong), Les visiteurs, Le retour d’une cabine spatiale) dans les halls de l’immeuble du Foyer Anderlechtois à Anderlecht (540 m²), avec Arnouldt, Herla, et D. Vienne (assistant: Ph. De Jaegere).
1978: Mosaïques de déchets et peinture murale aux résines d’acryl: Les naïades, Les dryades, La belle chevauchée au logis à Watermael-Boisfort (50 m²), avec Cape, Houfflin, Podolski et D. Vandendriessche.
1979: Mural en béton polychromé dans la masse: Les tritons au logis à Watermael Boisfort (27 m²), avec Montes. Peintures murales aux résines d’acryl. Le retour du berger parmi nous à Floréal, à Watermael-Boisfort (24 m²).
1979-80: Peintures murales aux résines d’acryl: Les mémoires d’un peuple – Cultures, connaissances, solidarités, loisirs au Centre culturel d’Antoing (140 m²).
1980: Céramique murale : La terre, les émaux et le feu, pour le Centre de Recherches Technologiques du Hainaut à Mons-Hyon (4,5 m²). Peinture sur toile de lin aux résines d’acryl: Six temps de l’action ouvrière et syndicale: La lutte pour le suffrage universel, le premier vote, La résistance, La délégation syndi,cale, La lutte anti-coloniale, Les trois » huit » (8h. de travail, 8h. De repos, 8h. De loisirs), 1961 – En avant!, dans les locaux de la FGTB de Tournai (42 m²).
1981: Céramiques murales Les marais (82 m²) et tapisserie Le grand passage (35 m²), bassin de natation de Kain-Tournai.
1982-82-83-84: Céramiques murales L’homme morcelé (50 m²) et tapisserie La terre en fleur, notre espoir (30 m²) à la station de métro « Louise » à Bruxelles.
1982-83-84: Peintures murales aux résines d’acryl: Le jour et la nuit, Le paradis perdu, Le meiboom et la fête, Le quartier des Marolle (200 m²).
Extrait du bulletin des travailleurs et militants communistes d’ArcelorMittal :
A nous de refuser d’écoper leur crise !
La direction d’Arcelor-Mittal a annoncé lundi la suppression de 800 emplois en Belgique. Officiellement, ce serait au sein des services administratifs et commerciaux que les coupes sombres se feraient. A Liège 350 travailleurs seraient concernés, 150 à 200 à Charleroi, 200 à Gand et le reste à Genk. La direction d’ArcelorMittal veut ainsi économiser 775 millions de dollars sur le dos des employés des secteurs non productifs. A quelques jours près, Mittal avait annoncé 9.000 suppression d’emplois dans le monde dont 6.000 en Europe (1.400 en france, 400 au Luxembourg, 1.500 en Allemagne…) et elle les justifie par la nécessité de faire des économies! Comme si elle ne gagnait pas beaucoup d’argent: 8 milliards d’euros les neuf premiers mois de l’année 2008! Elle parle de “départs volontaires” mais quelle est la liberté d’un ou d’une salariée de partir volontairement de son travail dans la situation de l’emploi que nous subissons? Aucune! c’est pourquoi ces suppression d’emploi sont inacceptables, il faut faire remballer son plan à Mittal ccar après les annonces de chômage économique massif, tant dans le chaud que dans le froid, la liquidation des CDD, des intérimaires et les centaines de travailleurs sous-traitants qui vont se retrouver sur le carreau, c’est une nouvelle attaéque frontale. Et tout cela n’est sans doute qu’un début.
“La faute à la crise” ?
Difficile de prévoir comment et à quel rythme la crise économique actuelle se développera. Ce qui est sûr, c’est que les patrons la font déjà payer aux travailleurs. dans ce contexte, les coups contre les salariés sont présentés comme une fatalité. En réalité, il s’agit bel et bien de choix politiques. Car, crise ou pas crise, les profits se portent bien. Les vingt plus grandes entreprises belges ont annoncé pour cette année des bénéfices supérieurs à ceux de 2007. Elles ont largement de quoi maintenir tous les emplois et d’embaucher tous les précaires. C’est aussi largement de quoi maintenir l’intégralité des salaires et même les augmenter
Ce ne sont pas les “nécessités économiques” qui dictent la politique des patrons, c’est la défense de leurs intérêts de classe contre les travailleurs. Si la crise n’existait pas, les possédants auraient pu l’inventer. Les dizaines et centaines de milliards affluent vers les caisses des banquiers d’abord, des grands patrons ensuite, et on n’a pas tout vu. Incroyable mais vrai, ces sommes faramineuses seront prises dans la poche des plus modestes. L’argent qui est passé dans les banques ne servira pas aux services publics, aux écoles, aux hôpitaux, ni aux logements sociaux!
Tous ensembles !
Il va falloir mettre un terme à cette spirale infernale. La colère existe, s’exprime depuis deux mois, entre autre, par des rassemblements, journées de grève et manifestations. Mais les travailleurs manquent de perspectives de classe, d’un plan de mobilisation d’ensemble, le seul qui puisse faire reculer patrons et gouvernement.
A gauche, les dirigeants du PS n’ont rien à offrir. Quant ausx fédérations syndicales, elles organisent au mieux des “journées” de leur corporation, en prenant bien soin que les travailleurs de telle branche ne rejoignant pas ceux de telle autre.
Aujourd’hui tous les travailleurs sont attaqués. il faut que les dernières manifestations sectorielles ou locales soient un encouragement pour une véritable mobilisation d’ensemble du monde du travail derrière des objectifs communs:
l’interdiction des licenciements y compris des intérimaires, celles des suppressions de postes et de la précarité.
Le maintien du salaire intégral pour les journées chômées, mais aussi l’augmentation générale de tous les salaires (d’au moins 300 euros par mois) et pas un salaire ni une pension sous 1.500 euros!
L’expropriation des banques et leur mise sous contrôle des travailleurs mobilisés et organisés d’une branche à l’autre.
Oui, une lutte d’ensemble sera bien le seul moyen de ne pas être les victimes du capitalisme et de ses crises.