Etude

Pour former et posséder le concept de Biosphère, il a fallu le matérialisme dialectique dans toute sa longue chaîne historique. Dans le même sens, pour le comprendre et l’assumer de manière conséquente, il faut assimiler le matérialisme dialectique. C’est là une grande exigence de notre époque. Nous proposons ici de comprendre pourquoi.

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La Biosphère n’est pas un concept annexe du matérialisme dialectique. Tout au contraire, c’en est un élément constitutif, central et incontournable. L’assimiler permet de comprendre correctement tout à la fois les enjeux écologiques de notre époque et par suite, le caractère inéluctable du communisme comme étape supérieure du développement non seulement de l’Humanité, mais de la vie même sur notre planète.

Commençons par l’évidence. Face à ce que nous appelons la « nature », il est manifeste que les contradictions s’accumulent. Le capitalisme toutefois ne les a pas en soi créées. Tout notre rapport actuel à la « nature » vient en fait de l’histoire même de l’Humanité. Le travail et l’organisation toujours plus poussée des forces productives ont déterminé à chaque étape historique les termes de ce rapport sous la forme des sociétés et des cultures qui se sont ainsi constituées. De ce fait, des choses comme l’idée que des « forces », des « dieux », élevaient des règles au-dessus ou au-delà des capacités humaines, et qu’une lutte à la fois tragique et héroïque poussait l’Humanité à accomplir comme « destin » une « sortie de la nature » en forme de libération, de domination en fait, se sont ancrées très profondément dans les cultures qui ont partout accompagné ce mouvement, de façon variée et inégale.

Dans notre pays, on peut voir par exemple la formation de la pensée stoïcienne, néoplatonicienne sous expression catholique, puis cartésienne et sécularisée comme autant d’étapes s’ajoutant, complétant, complexifiant toujours plus les efforts de compréhension intellectuelle de cette dynamique, mais de manière incomplète ou erronée.

Le capitalisme dans ces diverses phases a poussé cet élan dans ses limites avant de voir s’accumuler les catastrophes écologiques comme reflet de ses agressions toujours plus inouïes contre l’environnement. A mesure que s’élève la compréhension du fonctionnement de la vie, ces agressions prennent un tour de moins en moins acceptables sur le plan sensible ou même intellectuel. Et surtout, à mesure que se répètent, comme des coups de butoirs, les catastrophes et les dégradations de tous ordres, il devient manifeste que cela n’est plus gérable, que d’ailleurs ce ne peut pas être simplement une question de gestion, que le cadre même est ce qui pose et nourrit le problème. Emerge alors la question de l’organisation, du changement de cadre. Et cette question est aussi d’ordre culturel.

Le sol se dérobe inévitablement sous les pieds des partisans du capitalisme. Sur le plan général, ils ne peuvent pas affronter ces catastrophes, qui sont appelées à se répéter, toujours plus souvent et toujours plus fort. Implacablement. Ces dernières montrent symétriquement toujours plus la validité du concept de Biosphère, que les capitalistes comprennent de loin, mais ne peuvent pas assumer. Parce que cela engagerait à dynamiter le capitalisme jusque dans ses ressorts les plus fondamentaux. Et même au-delà, cela engage vers une transformation culturelle que le capitalisme comme cadre d’organisation est tout simplement incapable de porter. Il ne peut que se ratatiner sur le présent et sur le particulier, refusant de penser l’avenir et le général.

Alors face au vertige de la prise de conscience, les capitalistes vont à la fuite en avant, avec ou sans « transitions » de ceci ou de cela, avec ou sans « développement durable » et autres « changement global », « adaptations » ou « résiliences ». L’inévitable changement ne pourra venir d’eux et donc, toutes les tentatives pour « alerter » ou « faire prendre conscience » aux dirigeants des Etats ou des grandes entreprises capitalistes sont vaines et vouées à l’échec. On ne peut esquiver la lutte : il faut choisir un camp et affûter des positions idéologiques claires, marquées et libératrices. C’est une voie nécessaire. Vitale.

La tendance à paniquer et à vouloir « raisonner » le capitalisme est forte toutefois, et il ne faut pas la sous-estimer. Elle prend appui sur toute l’épaisseur historique accumulée, qui offre le reflet, mal compris en ce sens, d’une Humanité laborieuse, qui disposerait comme base d’un « jadis » confus ou d’un « autre » fantasmé, soi-disant plus « raisonnable » ou « équilibré ». Tout cela nourrit faussement la possibilité d’en « revenir » à un état des choses où les contradictions étaient plus lointaines ou pourraient sembler plus « gérables ». C’est le sens même de la réaction. Celle-ci perçoit une vengeance de la nature, mais en lui donnant une allure irrationnelle, sous la forme d’un « ordre traditionnel » avec lequel il faudrait renouer, en sacrifiant quelque chose : les machines, le confort moderne, la modernité même peut-être, et bien sûr une partie de l’Humanité.

Mais comme aucun retour en arrière n’est possible, toutes ces chimères réactionnaires ne peuvent que se souder à la fuite en avant capitaliste, prête à offrir ou ménager des places préservées, « survivalistes » pour les uns ou « durables » pour d’autres, du moins à qui le pourra, au prix d’aller toujours plus loin dans la ségrégation généralisée et l’effondrement décadent.

On doit alors comprendre que la seule issue, l’inévitable issue, nécessaire parce que portée par le mouvement même de la vie, est de dépasser cette tragédie de la rupture nature/culture à laquelle le capitalisme de notre époque a donné un tour dramatique. Il faut aussi comprendre que ce face à face rattrape de toute façon toutes les sociétés humaines engagées dans la production collective par la division du travail. Peu importe les formes culturelles qu’elles se sont donnés ou le degré de développement relatif atteint. Un intellectuel contemporain de grande envergure comme Philippe Descola a bien saisi cela par exemple, mais il ne parvient pas toutefois à relier cette diversité et à dépasser son propre cadre d’analyse.

Pour nous, il faut clairement dire que le capitalisme mondialisé a été une nécessité historique, et que son développement a permis d’atteindre un niveau supérieur de compréhension. Toute l’Humanité y est désormais confrontée d’une manière ou d’une autre mais toutefois d’une manière inégale. La difficulté est là bien sûr.

L’apport intellectuel du matérialisme dialectique formé en Union Soviétique a ici été déterminant. C’est dans ce cadre que le concept de Biosphère a été formé. Cela a aussi son importance. Il nous faut ici assumer, pour le prolonger, cet héritage et ce que nous devons de ce point de vue au grand savant Vladimir Vernadski. Mais cet héritage nous devons aussi le mettre en discussion et le corriger en vue de le perfectionner.

L’époque tragique que nous traversons ne doit donc pas nous laisser désespérés. Les communistes authentiques, formés à la compréhension approfondie du matérialisme dialectique savent qu’une route lumineuse s’ouvre devant nous. La nature se venge certes, et nous en payons le prix. Cela ira en s’empirant jusqu’à la rupture révolutionnaire.

Mais ce sentiment tragique n’a aussi de sens que dans la perspective matérialiste historique de notre époque. Tournant nos yeux vers l’avenir, nous devons voir que nous allons à l’harmonie, à la fusion de la culture et de la nature, et à la rencontre entre la nature et la culture. Synthèse, symbiose, voilà le vocabulaire du matérialisme dialectique qui a donné à toute l’Humanité le concept de Biosphère, affirmant l’unité de la matière au sein de notre planète comme un élément constitutif de systèmes supérieurs : notre système stellaire, notre galaxie et au-delà, le cosmos, l’univers.

Ce qui se joue pour nous, c’est la formulation d’un nouvel humanisme sensible, symbiotique et collectiviste : communiste pour tout dire.

C’est à cela que permet d’aller l’assimilation du sujet que nous nous proposons ici d’étudier sous différents rapports pour se former, se transformer de manière approfondie et prolongée :

Biosphère


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