MATIERE. Le monde est matériel de par sa nature. La diversité des phénomènes naturels est une manifestation des diverses formes de la matière en mouvement. La matière est la source unique et la cause ultime de tous les processus naturels. L’atome, la cellule vivante, l’organisme, l’homme pensant sont des espèces différentes de la matière.

La matière est éternelle dans le temps et infinie dans l’espace. Elle ne peut être ni créée ni détruite ; elle ne peut que changer de forme.

Engels écrivait que dans le cycle de la matière « il n’est rien d’éternel sinon la matière en éternel changement, en éternel mouvement, et les lois selon lesquelles elle se meut et elle change » (« Dialectique de la nature », P. 1952, p. 46).

Les hommes ont conclu à l’unité du monde matériel à la suite d’un long développement de la philosophie et des sciences de la nature. La matérialité du monde est prouvée non par quelques tours de prestidigitateurs, dit Engels, mais par un long et laborieux développement de la philosophie et des sciences de la nature.

Déjà les premiers philosophes de la Grèce antique plaçaient la matière à la base de toutes choses, mais ils l’identifiaient avec un de ses divers aspects : pour Thalès (V.) c’était l’eau, pour Anaximène, l’air, pour Héraclite (V.), le feu.

La diversité des phénomènes naturels ne les empêchait pas d’en reconnaître l’unité qu’ils recherchaient dans des formes matérielles particulières (l’eau, l’air, le feu). La première définition de la matière est due aux atomistes antiques : Leucippe, Démocrite (V.), Epicure (V.). Démocrite considérait le monde comme une infinité d’atomes indivisibles, identiques par leur substance, mais de forme et de grandeur différentes.

Au XVIIe siècle, la conception atomistique fut développée par Gassendi (V.) pour qui le monde est composé d’atomes doués de propriétés absolues telles que la solidité et l’impénétrabilité. Quant à Descartes (V.), il s’élevait contre la théorie atomistique, soutenait l’idée de la continuité de la matière, niait l’indivisibilité des atomes et affirmait que la matière est divisible à l’infini.

Les philosophes matérialistes français du XVIIIe siècle se prononçaient d’une part contre Descartes qui identifiait la matière et l’étendue, d’autre part, contre Newton (V.) qui considérait la matière comme quelque chose de passif et d’inerte. Pour les matérialistes français, la matière est inséparable du mouvement.

Mais eux non plus n’ont pas dépassé le cadre de la conception métaphysique d’après laquelle la matière est composée de particules égales immuables et le mouvement est réduit au simple déplacement dans l’espace. « L’admission d’on ne sait quels éléments immuables, de l’« essence immuable des choses », etc. n’est pas le matérialisme ; c’est un matérialisme métaphysique, c’est-à-dire antidialectique » (Lénine : « Matérialisme et empiriocriticisme », M. 1952, p. 300).

Les découvertes du grand savant russe Lomonossov (V.), notamment la loi de la conservation de la matière et du mouvement qui démontra l’impossibilité d’anéantir la matière et le mouvement, ont été d’une grande portée pour l’étude scientifique de la matière et des lois de son mouvement.

Un apport précieux a été fait dans ce domaine par les penseurs russes du XIXe siècle Biélinski (V.), Herzen (V.), Tchernychevski (V.), Dobrolioubov (V.) qui, s’élevant contre la théorie métaphysique de la matière, l’envisageaient sous l’angle de son développement et de son changement continus.

Cependant, seul le matérialisme dialectique a entièrement éliminé les postulats métaphysiques et a donné une définition scientifique de l’essence de la matière.

Elle a été formulée par Lénine de la façon suivante : « La matière est une catégorie philosophique servant à désigner la réalité objective donnée à l’homme dans ses sensations qui la copient, la photographient, la reflètent, et qui existe indépendamment des sensations » (Ibid., p. 140). Cette définition généralise les données de la science sur la matière et fournit aux savants un solide appui matérialiste.

Elle est dirigée contre les idéalistes qui spéculent sur chaque nouvelle découverte dans le domaine de la structure de l’atome pour dénigrer le matérialisme et faire croire que la matière serait une fiction, un symbole, un pur concept et non une réalité objective.

Or, quelles que soient les nouvelles idées sur la structure de l’atome, rien ne saurait ébranler ce fait capital : la matière existe indépendamment de la conscience humaine, tout ce qui existe est la matière dans ses diverses manifestations.

La définition de la matière en tant que catégorie philosophique résout le problème de la réalité objective et de l’antériorité de la matière, embrasse toutes les formes connues et encore inconnues de l’existence de la matière.

La matière est douée de certaines propriétés essentielles dont la principale est le mouvement. Elle se meut dans l’espace et dans le temps (V. Temps et espace), formes objectives de son existence. Nos représentations sur la structure de la matière sont fonction du niveau atteint par la science.

Elles changent nécessairement au fur et à mesure que la science progresse, que l’homme pénètre toujours plus les secrets de la nature. Ainsi, les nouveaux progrès de la science à la fin du XIXe et au début du XXe siècle ont modifié et enrichi nos connaissances sur la structure de la matière (la radioactivité, la théorie électronique, etc.).

La physique moderne a découvert la structure complexe non seulement de l’atome mais aussi de son noyau composé de particules de deux genres: de protons et de neutrons. (V. Atome ; Noyau atomique.) Mais « la variabilité des connaissances scientifiques sur la structure de la matière et les formes de ses mouvements ne réfute pas la réalité objective du monde extérieur » (Ibid., pp. 196-197).

Les physiciens de la fin du XIXe et du début du XXe siècle ont tiré de ces découvertes une conclusion idéaliste. La destruction des anciennes représentations concrètes de la matière a été interprétée par eux comme la disparition de la matière même.

Dans sa lutte contre l’idéalisme « physique » (V.) et le machisme (V.), Lénine remarque que ce n’est pas la matière qui disparaît, mais une limite déterminée de nos connaissances dans ce domaine. En progressant, nos connaissances découvrent des propriétés nouvelles de la matière. Seules nos idées sur la structure de la matière, sur la composition chimique des substances, sur l’atome et l’électron, etc., peuvent vieillir, et non la notion de matière.

Les philosophes réactionnaires de nos jours ont de nouveau déclenché la campagne contre la matière, en dénaturant les découvertes nouvelles dans le domaine du microcosme. Seul le matérialisme dialectique assure une base philosophique inébranlable à la science moderne de la matière.

Le marxisme considère que la définition de la matière en tant que catégorie philosophique ne peut pas être confondue avec telle ou telle théorie physique de la structure de la matière : la variabilité de nos représentations sur la structure et les propriétés de la matière ne peut récuser le fait de sa réalité objective. En même temps le marxisme insiste sur la liaison de la philosophie avec les autres sciences.

Engels fait remarquer que le matérialisme change d’aspect avec chaque grande découverte des sciences naturelles. Ainsi, la thèse du matérialisme dialectique sur l’espace et le temps en tant que formes objectives de l’existence de la matière, est incontestable. Mais la physique moderne ayant approfondi nos données sur les rapports entre la matière et le mouvement, l’espace et le temps, il est à présent impossible d’examiner les notions de l’espace et du temps sans tenir compte des nouvelles découvertes.

Il en va de même en ce qui concerne le mouvement en tant que mode d’existence de la matière dont il est une propriété inséparable : les progrès de la physique moderne, la théorie de la corrélation entre la masse et l’énergie, du changement de la masse avec l’accroissement de la vitesse, etc., ayant approfondi et concrétisé nos connaissances sur ce point, la notion du mouvement ne saurait être examinée en dehors de la théorie physique moderne.

Le matérialisme dialectique exige que la conception philosophique de la matière tienne compte des acquisitions de la science, sans quoi la philosophie devient dogmatique, impuissante à généraliser les nouvelles données scientifiques.

MATRIARCAT (gens maternelle). Etape historique dans le développement du régime de la commune primitive (V.), caractérisée par le rôle prépondérant de la femme dans l’économie. Le matriarcat a pour base le mode de production de la commune primitive qui s’est épanouie à cette époque.

Les principales causes du matriarcat sont les suivantes : dans le mariage en groupe, qui a existé chez tous les peuples aux stades inférieurs de leur évolution, on connaissait la mère des enfants, mais non le père. Comme l’origine ne pouvait être établie que du côté maternel, seule la parenté maternelle était admise.

Quand elle se mariait, la femme restait dans la gens, l’homme passait dans la gens de sa femme. La cause essentielle du matriarcat était que la femme tenait en main toute l’économie de la gens. La chasse ne procurait pas de moyens d’existence sûrs.

Le travail était plus productif dans l’agriculture, et au début, ce sont surtout les femmes qui s’en occupaient. Le rôle de la femme s’accroît avec la vie sédentaire, quand apparaît l’économie domestique proprement dite. Les soins donnés au logis, l’entretien du foyer domestique, l’approvisionnement, le travail dans le potager, la préparation des aliments, etc., telles étaient les fonctions de la femme.

Sous le régime de la commune primitive, l’économie domestique jouait un rôle important. Elle avait un caractère social, et la femme était la surintendante de la maison. Avec l’apparition et le développement de l’élevage, le rôle de la femme diminue, l’homme devient la force productive principale dans la société.

Toutes les richesses, les instruments de production, le bétail, et, par la suite, les esclaves, deviennent peu à peu la propriété de l’homme. La femme est refoulée au second plan, car l’économie domestique n’est plus qu’une annexe de la production essentielle.

La femme, libre jusqu’à ce jour, devient la servante de son mari. « Le renversement du droit maternel fut la grande défaite historique du sexe féminin. L’homme prit le gouvernail aussi dans la maison ; la femme fut dégradée, asservie, devint l’esclave du plaisir de l’homme et simple instrument de reproduction » (Marx-Engels : Ausgewählte Schriften, Band II, M. 1950, S. 202).

La science bourgeoise vulgaire nie l’existence du matriarcat. Elle nie ainsi le régime de la commune primitive en tant que premier degré économique et social dans l’évolution historique de tous les peuples.

Les savants bourgeois estiment que le patriarcat (V.) est de tous les temps. On comprend les raisons de cette assertion : le patriarcat, qui existait pendant la dernière période de la commune primitive, est déjà lié à l’apparition de la propriété privée, et s’il a toujours existé, la propriété privée, elle aussi, a toujours été et sera toujours.

L’abondance des preuves fournies par l’ethnographie, qui confirment la réalité du matriarcat, a contraint les savants bourgeois à modifier leur point de vue.

Ils affirmèrent alors que le matriarcat ne serait propre qu’aux peuples appartenant aux races « inférieures », aux races de couleur ; d’après eux, les peuples de race « supérieure » n’auraient connu que le patriarcat.

La fausseté de cette théorie a été démontrée par le marxisme sur la base de données strictement scientifiques.

Au premier stade de l’évolution du régime de la commune primitive, le matriarcat a existé chez tous les peuples sans exception.

MECANISTES. Partisans du matérialisme mécanise (V.).


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