Mao Zedong
Sur le problème de la coopération agricole (Rapport présenté par le camarade Mao Zedong à une conférence des secrétaires des comités du Parti pour les provinces, municipalités et régions autonomes, convoquée par le Comité central du Parti communiste de Chine.)
31 juillet 1955
I
Un nouveau mouvement de masse, socialiste, est sur le point de prendre son essor dans toutes les régions rurales de notre pays. Toutefois, certains de nos camarades marchent clopin-clopant, comme une femme aux pieds bandés, et ne cessent de se plaindre, disant : « Ah ! vous allez trop vite ! » Pointilleux sur des vétilles, récriminant sans raison, se tracassant sans cesse, multipliant les interdictions et les prescriptions, ils s’imaginent donner par là une juste orientation au mouvement socialiste de masse dans les campagnes.
Eh bien, non, cette orientation n’est pas juste, elle est fausse.
A l’heure actuelle, l’essor de la coopération agricole, de la transformation sociale à la campagne, a déjà commencé en certains endroits, et il va bientôt gagner tout le pays. C’est un mouvement révolutionnaire socialiste d’une grande ampleur qui touche une population rurale de plus de 500 millions d’habitants ; sa portée mondiale est donc considérable. Nous devons le diriger activement, avec enthousiasme et méthode, et non le ramener en arrière de quelque façon que ce soit. Dans un tel mouvement, certaines erreurs sont inévitables, cela se comprend ; elles ne sont d’ailleurs pas difficiles à redresser. Les cadres et les paysans parviendront à surmonter leurs insuffisances ou à corriger leurs erreurs si nous leur apportons une aide active. Ils vont de l’avant sous la direction du Parti ; le mouvement est fondamentalement sain. Ici ou là, ils ont commis des erreurs dans leur travail ; ils ont, par exemple, empêché des paysans pauvres d’adhérer aux coopératives sans tenir compte de leurs difficultés, alors qu’ils ont forcé des paysans moyens aisés à y entrer, en lésant leurs intérêts. On doit corriger ces erreurs par l’éducation et non par de simples réprimandes, car celles-ci ne peuvent résoudre aucun problème. Nous devons prendre la direction du mouvement, hardiment et non comme si nous avions à « redouter un dragon devant nous et un tigre derrière ». C’est par leur propre expérience de la lutte que les cadres et les paysans se rééduqueront. Qu’on les laisse agir ; c’est dans le feu de l’action qu’ils s’instruiront et deviendront plus capables. Et nous verrons surgir de nombreux hommes de valeur. Ce n’est pas en « redoutant un dragon devant nous et un tigre derrière » que nous formerons des cadres. Il est indispensable que les instances supérieures envoient dans les campagnes un grand nombre de cadres ayant reçu une formation accélérée, pour guider et aider le mouvement coopératif. Mais c’est en s’engageant dans le mouvement même que ces cadres apprendront à faire leur travail. Pour avoir suivi des cours de formation et écouté son professeur exposer quantité de bons principes, il ne s’ensuit pas forcément qu’on ait appris à travailler.
En un mot, la direction ne doit jamais être à la remorque du mouvement de masse. Or, justement à l’heure actuelle, celui-ci devance la direction, qui n’arrive pas à suivre. Cette situation doit changer.
II
A présent, le mouvement coopératif a déjà pris une grande ampleur dans le pays, et pourtant nous avons encore à discuter de questions comme celles-ci: Les coopératives peuvent-elles se développer? Peuvent-elles se consolider ? Il semble que, pour certains camarades, le nœud de la question soit leur inquiétude quant à la possibilité de consolider les quelques centaines de milliers de coopératives semi- socialistes existantes, en général de petite envergure (elles ne groupent en moyenne guère plus de 20 foyers chacune). Naturellement, si elles ne pouvaient pas être consolidées, il ne serait pas question de les développer. Le développement pris par la coopération au cours de ces dernières années n’a pas encore convaincu certains de nos camarades, et ils attendent de voir comment les choses iront en 1955. Peut-être même attendront-ils une année de plus ; si un plus grand nombre de coopératives parviennent à se consolider vers la fin de 1956, ils seront alors vraiment persuadés que la coopération dans l’agriculture est possible et que la politique du Comité central de notre Parti est juste. Voilà pourquoi notre travail au cours de cette année et de l’an prochain est très important.
Afin de prouver que la coopération agricole est réalisable et que la politique de notre Comité central dans ce domaine est juste, il n’est peut-être pas sans intérêt d’examiner un peu l’histoire du mouvement de coopération agricole dans notre pays.
Durant les vingt-deux années de guerres révolutionnaires qui ont précédé la fondation de la République populaire de Chine, notre Parti avait acquis l’expérience de guider les paysans, après la réforme agraire, dans la formation d’organisations d’entraide pour la production agricole, qui renfermaient des germes du socialisme, à savoir les groupes d’entraide au travail et les équipes de labour dans le Kiangsi, les équipes d’échange de travail dans le Chensi du Nord, les équipes d’entraide dans la Chine du Nord, de l’Est et du Nord-Est. On vit apparaître aussi, mais dans des cas isolés, des coopératives agricoles de production de type semi-socialiste ou socialiste. Par exemple, pendant la Guerre de Résistance contre le Japon, une coopérative agricole de production de type socialiste fut établie dans le district d’Ansai, dans le Chensi du Nord, mais à l’époque ce type de coopérative n’était pas encore généralisé.
Ce n’est qu’après la fondation de la République populaire de Chine que notre Parti a conduit les paysans à organiser sur une plus vaste échelle des équipes d’entraide pour la production agricole et, sur cette base, à constituer en grand nombre des coopératives agricoles de production. Ainsi, quelque six années encore ont été consacrées à ce travail.
Quand notre Comité central adopta pour la première fois, le 15 décembre 1951, un projet de résolution sur l’entraide et la coopération dans la production agricole (ce document ne fut publié dans la presse, sous forme de résolution officielle du Parti, qu’en mars 1955) et le diffusa dans les organisations locales du Parti en vue d’une application à titre d’essai dans les diverses régions, le pays comptait un peu plus de 300 coopératives agricoles de production. Deux ans plus tard, quand le Comité central diffusa le 16 décembre 1953 sa résolution relative aux coopératives agricoles de production, elles étaient plus de 14.000, soit 47 fois le chiffre de 1951.
Cette résolution stipulait que, de l’hiver 1953 à la moisson d’automne de 1954, le nombre des coopératives agricoles de production devait passer d’un peu plus de 14.000 à 35.800 et quelques, c’est-à-dire qu’il ne devait être augmenté que de 150 pour cent. Mais, pendant cette période, il fut en fait porté à 100.000, c’est-à-dire à plus du septuple.
En octobre 1954, notre Comité central décida de sextupler le nombre des coopératives, c’est-à-dire de les faire passer de 100.000 à 600.000 ; mais on atteignit en fait le chiffre de 670.000. En juin 1955, après une première révision, leur nombre diminua de 20.000 ; il en restait donc 650.000; c’est-à-dire 50.000 de plus que prévu. Seize millions neuf cent mille foyers paysans y avaient adhéré, ce qui représente en moyenne 26 foyers par coopérative.
Ces coopératives se trouvent principalement dans les provinces septentrionales qui furent libérées les premières. La plupart des provinces du pays, libérées plus tard, ont aussi établi des coopératives agricoles de production, mais celles-ci ne sont pas encore très nombreuses, sauf dans l’Anhouci et le Tchékiang.
D’une façon générale, ce sont de petites coopératives ; cependant, il y en a un petit nombre de plus grandes qui groupent 70 à 80 foyers chacune, parfois plus de 100, et même plusieurs centaines.
Ce sont en général des coopératives de type semi-socialiste : cependant un petit nombre d’entre elles sont devenues des coopératives de forme supérieure, de type socialiste.
Parallèlement au développement de la coopération agricole parmi les paysans, un petit nombre de fermes d’Etat, de caractère socialiste, ont été créées dans notre pays. En 1957, il y en aura 3.038, cultivant 16.870.000 mous. Ce nombre comprendra 141 exploitations mécanisées (soit celles qui existaient déjà en 1952 et celles qui auront été créées au cours du premier plan quinquennal) ; elles mettront en culture 7.580.000 mous. Quant aux 2.897 fermes d’Etat non mécanisées, dépendant de l’administration locale, elles cultiveront 9.290.000 mous. Au cours du second et du troisième quinquennat, on assistera dans l’agriculture à un grand développement du secteur d’Etat.
Ce printemps, notre Comité central a décidé de porter à un million le nombre des coopératives agricoles de production, soit une augmentation de 350.000 coopératives en plus des 650.000 existantes ou un accroissement de cinquante et quelques pour cent seulement. Pour ma part, je trouve que ce n’est pas tout à fait suffisant. Il serait nécessaire de doubler approximativement leur nombre, afin d’atteindre un total d’environ 1.300.000, ce qui permettrait aux deux cents et quelques dizaines de milliers de cantons de notre pays, sauf dans certaines régions frontalières, d’avoir chacun une ou plusieurs petites coopératives agricoles de production de type semi-socialiste, qui puissent servir de modèle. Dans un ou deux ans, ces coopératives, grâce à l’expérience acquise, seront devenues des « vétérans » qu’on pourra prendre en exemple. Durant les quatorze mois qui nous séparent de la moisson d’automne d’octobre 1956, il doit être possible de réaliser ce plan pour la création de coopératives. J’espère qu’une fois de retour chez eux, les camarades responsables des différentes provinces et régions autonomes étudieront la question, élaboreront en conformité avec les conditions concrètes des plans adéquats et les communiqueront, dans un délai de deux mois, au Comité central. Alors, nous discuterons à nouveau la question, afin d’arriver à une décision définitive.
Le problème est de savoir si l’on peut consolider les coopératives. Certains disent que le plan de l’année dernière, portant sur l’établissement de 500.000 nouvelles coopératives, était trop ambitieux, trop aventureux, et que celui qui en prévoit pour cette année 350.000 de plus l’est également. Ils se demandent si, avec un tel nombre de coopératives, il est possible de les consolider.
Qu‘en est-il en réalité ?
Il va sans dire que ni l’industrialisation socialiste ni la transformation socialiste ne sont choses faciles. Il y a certes bien des difficultés à surmonter pour faire passer environ 110 millions de familles de paysans de leur exploitation individuelle à l’exploitation collective et pour réaliser ensuite la refonte technique de l’agriculture ; mais nous devons avoir la conviction que notre Parti est capable de diriger les masses de manière à vaincre ces difficultés.
En ce qui concerne la coopération agricole, il y a deux choses, à mon avis, dont nous devons être convaincus. Premièrement, les paysans pauvres et la couche inférieure des paysans moyens, nouveaux et anciens (Lors du mouvement de la coopération agricole, on désignait comme nouveaux paysans moyens ceux qui, paysans pauvres à l’origine, étaient devenus des paysans moyens depuis la réforme agraire. Ceux qui étaient demeurés des paysans moyens et dont le statut économique était resté inchangé étaient appelés anciens paysans moyens.), désirent ardemment s’engager dans la voie socialiste et répondent avec enthousiasme à l’appel lancé par notre Parti en faveur de la coopération ; les premiers, parce que leur situation économique est difficile, les seconds, parce qu’ils n’ont pas encore acquis l’aisance, bien que leurs conditions de vie se soient améliorées depuis la Libération. Particulièrement actifs sont ceux d’entre eux dont le niveau de conscience politique est relativement élevé.
Deuxièmement, notre Parti est capable de conduire le peuple tout entier au socialisme. Il a mené à la victoire la grande révolution démocratique populaire et instauré la dictature démocratique populaire ayant à sa tête la classe ouvrière ; il est donc certainement capable de diriger notre peuple de façon à réaliser pour l’essentiel, au cours de trois quinquennats environ, l’industrialisation socialiste du pays et la transformation socialiste de l’agriculture et de l’artisanat, ainsi que de l’industrie et du commerce capitalistes. L’agriculture, tout comme les autres domaines, nous en fournit des preuves solides et convaincantes. Considérez, par exemple, les trois premiers trains de coopératives : d’abord 300, puis 13.700, enfin 86.000, soit au total 100.000 coopératives, toutes créées avant l’automne 1954, et toutes consolidées depuis. Pourquoi donc celles du quatrième train, soit 550.000 coopératives, constituées en 1954-1955, et du cinquième, soit 350.000 (chiffre provisoire de contrôle qui devra être arrêté définitivement), à établir en 1955-1956, ne pourraient-elles pas, elles aussi, être consolidées ?
Il faut avoir confiance dans les masses : il faut avoir confiance dans le Parti : ce sont là deux principes fondamentaux. Si nous avons le moindre doute à cet égard, nous serons incapables d’accomplir quoi que ce soit.
III
Pour réaliser graduellement la coopération agricole dans nos campagnes, nous devons procéder dans les coopératives déjà créées à un sérieux travail de révision.
Nous devons insister sur la qualité et nous opposer à la tendance qui, négligeant la qualité, n’a en vue que le nombre des coopératives ou des familles membres. Nous devons donc attacher une grande importance à notre travail de révision.
La révision doit être faite non pas une fois, mais deux ou trois fois par an. Un certain nombre de coopératives l’ont déjà effectuée au cours du premier semestre (toutefois, en certains endroits, d’une façon peu soignée, semble-t-il, et sans qu’on ait fait de gros efforts). Je propose donc une deuxième révision cette année, en automne ou en hiver, et une troisième l’an prochain, au printemps ou durant l’été. Sur les 650.000 coopératives actuelles, 550.000 sont nouvelles et ont été établies l’hiver dernier ou ce printemps ; elles comprennent des « coopératives de première catégorie » (A l’époque, on classait généralement les coopératives en première, deuxième et troisième catégorie, selon que leur fonctionnement était bon, moins bon ou mauvais.), qui sont relativement solides et qui, ajoutées aux 100.000 anciennes déjà solidement établies, font un assez beau total. Ces coopératives déjà consolidées ne peuvent-elles pas entraîner les autres à se consolider graduellement ? Elles le peuvent certainement.
Nous devons faire grand cas de la moindre flambée d’enthousiasme des paysans et des cadres pour le socialisme et nous garder de l’étouffer. Nous devons faire nôtres les aspirations et les sentiments des membres et des cadres des coopératives, des cadres des districts, des arrondissements et des cantons, et non refroidir leur ardeur.
On ne se résoudra à dissoudre une coopérative que si la totalité ou la quasi-totalité de ses membres est absolument décidée à ne plus poursuivre l’expérience. S’il ne s’agit que de quelques membres, laissez-les se retirer, et que les autres continuent. Si la majorité est décidée à ne pas poursuivre alors qu’une minorité est d’avis opposé, on laissera la majorité se retirer, et la minorité restera et continuera. Même ainsi, c’est bien. Dans une toute petite coopérative du Hopei, qui groupait seulement six familles, trois familles d’anciens paysans moyens refusaient obstinément de continuer ; finalement, on les laissa se retirer. Les trois autres familles, des familles de paysans pauvres (Il s’agit des familles de Wang Yu-kouen. Wang Siao-ki et Wang Siao-pang, à Nanwangtchouang, district d’Annping, dans le Hopei. La coopérative agricole de production qu’elles ont fondée est devenue aujourd’hui la Brigade de Production de Nanwangtchouang de la commune populaire du même nom.), se montrèrent décidées à persister coûte que coûte ; elles restèrent, et la coopérative fut maintenue. En fait, l’orientation choisie par ces trois familles de paysans pauvres est celle de nos 500 millions de paysans. Tous les paysans individuels suivront en fin de compte la voie dans laquelle elles se sont engagées avec résolution.
Dans le Tchékiang, l’adoption de la politique dite de “réduction énergique » (qui n’émanait pas d’une décision prise par le comité du Parti de cette province) fit que, sur un total de 53.000 coopératives, 15.000, englobant 400.000 foyers paysans, furent dissoutes d’un coup, ce qui provoqua un vif mécontentement parmi les masses et les cadres ; ce n’était pas du tout ce qu’il fallait faire. C’est dans un état de grand désarroi que fut décidée cette politique. Il était faux aussi de prendre une mesure d’une telle importance sans l’accord préalable du Comité central, d’autant plus que, dès avril 1955, ce dernier avait lancé l’avertissement suivant : « Ne répétez pas les erreurs de 1953 en procédant à une dissolution massive des coopératives, autrement vous aurez encore une fois à faire votre autocritique. » Mais certains camarades firent la sourde oreille.
En face du succès, il faut, je crois, se défier de deux tendances. L’une est de se laisser griser par le succès ; gonflé d’orgueil, on tombe dans l’erreur « de gauche », ce qui, naturellement est mauvais. L’autre est de s’effrayer du succès ; on recourt alors à la politique de « réduction énergique » et on tombe dans l’erreur de droite, ce qui est tout aussi mauvais. C’est la seconde tendance qui prévaut actuellement, car certains camarades sont transis de peur en voyant surgir des centaines de milliers de petites coopératives.
IV
Le travail préalable à la création des coopératives doit être accompli avec soin.
Dès le début, il faut veiller à la qualité et combattre la tendance à n’avoir en vue que le nombre.
« Ne pas engager de combat sans préparation, ou un combat dont l’issue victorieuse ne soit pas certaine », tel était, durant les guerres révolutionnaires, le célèbre mot d’ordre de notre Parti. Il est tout aussi valable dans l’édification du socialisme. Pour être assuré de la victoire, il faut être préparé, et à fond. Avant de créer un nouveau train de coopératives agricoles de production dans une province, une préfecture ou un district, il faut mener à bien de nombreuses tâches préalables, qui sont essentiellement les suivantes :
1) Critiquer les idées erronées et dresser le bilan de l’expérience acquise.
2) Populariser systématiquement et sans relâche, parmi les masses paysannes, l’orientation, la politique et les mesures adoptées par notre Parti dans le domaine de la coopération agricole ; ce faisant, non seulement expliquer aux paysans les avantages de la coopération, mais aussi leur montrer les difficultés qu’on peut rencontrer au cours de sa réalisation, afin qu’ils aient l’esprit bien préparé.
3) Elaborer, en tenant compte de la situation réelle, un plan d’ensemble pour le développement de la coopération agricole, dans le cadre de la province, de la préfecture, du district, de l’arrondissement ou du canton, puis, sur cette base, établir un plan annuel.
4) Former dans des stages d’étude de courte durée des cadres pour la création des coopératives.
5) Assurer partout un large développement des équipes d’entraide pour la production agricole et, dès que les conditions le permettent, les entraîner à se grouper en associations d’équipes d’entraide, de façon à jeter les bases nécessaires à une fusion ultérieure en coopératives.
Quand ces tâches seront réalisées, il sera possible de résoudre, pour l’essentiel, le problème de l’union de la quantité et de la qualité dans le développement des coopératives ; mais cela ne nous dispense pas, dès qu’un groupe de coopératives est créé, d’entreprendre immédiatement un travail de révision.
La possibilité de consolider un groupe de coopératives dépend, en premier lieu, des préparatifs effectués avant leur établissement et, en second lieu, du travail de révision après leur création.
Pour la création des coopératives comme pour le travail de révision, il faut s’appuyer sur les cellules du Parti et de la Ligue de la Jeunesse à l’échelon du canton. C’est pourquoi les deux tâches doivent être étroitement liées à l’édification et à la consolidation du Parti et de la Ligue de la Jeunesse dans les campagnes.
Il est indispensable que les cadres locaux des régions rurales soient les chevilles ouvrières de la création des coopératives aussi bien que du travail de révision ; il faut les encourager et leur confier des responsabilités. Les cadres envoyés par les instances supérieures serviront seulement de force auxiliaire ; leur rôle est de guider et d’aider, non de prendre tout en main.
V
En ce qui concerne la production, les coopératives doivent obtenir de meilleures récoltes que les paysans individuels et les équipes d’entraide. La production ne doit en aucun cas demeurer au niveau de ces derniers, car ce serait l’échec ; à quoi bon alors créer des coopé¬ratives ? A plus forte raison, la production ne saurait diminuer. Pour plus de 80 pour cent de nos 650.000 coopératives elle est en hausse ; c’est là une très bonne chose, qui montre que leurs membres sont pleins d’ardeur pour la production et que les coopératives sont supérieures aux équipes d’entraide, et plus encore aux exploitations individuelles.
Pour augmenter le volume de la production agricole, il faut :
1) appliquer strictement le principe du libre consentement et de l’avantage réciproque ;
2) améliorer la gestion (planification et direction de la production, organisation du travail, etc.) ;
3) améliorer les techniques agricoles (labours profonds et culture soignée, plantation serrée en petites touffes, extension des surfaces donnant deux ou trois récoltes par an, emploi de semences de qualité, popularisation des instruments aratoires de type nouveau, lutte contre les maladies des plantes et les insectes nuisibles, etc.) ;
4) accroître les moyens de production (superficies cultivables, engrais, ouvrages hydrauliques, bêtes de trait, instruments aratoires, etc.).
Ce sont là des conditions indispensables à la consolidation des coopératives et à l’accroissement de la production.
Afin d’assurer une stricte application du principe du libre consentement et de l’avantage réciproque, il faut maintenant porter particulièrement notre attention sur les questions suivantes :
1) Ne convient-il pas d’ajourner d’un an ou deux l’apport des bêtes de trait et du gros outillage agricole aux coopératives ? En a-t-on évalué le prix de façon équitable ? L’indemnisation n’est-elle pas échelonnée sur une trop longue période ?
2) Le rapport entre la quote-part à recevoir pour l’apport en terres et celle qui provient du travail fourni est-il convenable ?
3) Comment les coopératives doivent-elles réunir les fonds qui leur sont nécessaires ?
4) Certains membres peuvent-ils consacrer une partie de leur force de travail à des occupations subsidiaires ?
(Puisque nos coopératives agricoles de production sont en général encore de type semi-socialiste, nous devons veiller à régler convenablement ces quatre questions, afin de ne pas enfreindre le principe de l’avantage réciproque pour les paysans pauvres et les paysans moyens. Le libre consentement ne peut être fondé que sur l’avantage réciproque.)
5) Quelle superficie doivent représenter les parcelles individuelles laissées aux membres des coopératives ?
6) Quelle doit être l’appartenance de classe de ceux qui adhèrent aux coopératives ?
Je voudrais dire ici quelques mots sur la question de l’appartenance de classe. Je pense que pendant une année ou deux, dans les régions où les coopératives commencent à se répandre ou viennent seulement d’être généralisées, c’est-à-dire, aujourd’hui, dans la majeure partie du pays, nous devons faire en sorte que s’organisent tout d’abord les éléments actifs des couches suivantes de la population rurale : 1) les paysans pauvres ; 2) les nouveaux paysans moyens-pauvres ; 3) les anciens paysans moyens-pauvres. Quant aux éléments de ces couches qui, pour le moment, ne réagissent pas encore avec enthousiasme, il faut éviter de les entraîner malgré eux dans les coopératives, il convient d’attendre, pour les y admettre par groupes, que leur conscience politique se soit élevée et que leur intérêt pour les coopératives se soit éveillé. Les paysans de toutes ces couches sont assez proches les uns des autres par leur condition économique, soit qu’ils mènent encore une vie difficile (c’est le cas des paysans pauvres, qui ont reçu des terres et dont les conditions de vie se sont sensiblement améliorées depuis la Libération, mais qui ont encore des difficultés parce qu’ils manquent de main-d’œuvre, de bêtes de trait et d’instruments aratoires), soit qu’ils ne connaissent pas encore l’aisance (c’est le cas des paysans moyens-pauvres). Aussi trouve-t-on chez eux un vif désir de s’organiser en coopératives. Cependant, pour diverses raisons, ils n’ont pas tous le même empressement : les uns sont enthousiastes, d’autres, pour le moment, ne montrent pas beaucoup de zèle, et certains veulent voir venir les choses. Il nous faut donc poursuivre pendant un temps notre travail d’éducation parmi ceux qui ne désirent pas encore entrer dans les coopératives, même s’il s’agit de paysans pauvres ou de paysans moyens-pauvres ; il faut attendre patiemment qu’ils prennent conscience et se garder de violer le principe du libre consentement en les entraînant dans les coopératives contre leur gré.
Quant à la couche supérieure des paysans moyens, anciens ou nouveaux, c’est-à-dire les paysans moyens qui sont de condition relativement aisée, il ne faut pas, pour le moment, les admettre dans les coopératives — excepté ceux qui, ayant pris conscience de la nécessité de s’engager dans la voie du socialisme, désirent vraiment y adhérer — et encore moins les y entraîner contre leur volonté. En effet, ils ne sont pas encore assez conscients pour prendre la voie socialiste; ils ne se décideront à entrer dans les coopératives qu’au moment où la majorité de la population rurale y aura adhéré, ou bien lorsque sur les terres des coopératives le rendement sera égal ou supérieur à celui de leurs propres terres, c’est-à-dire quand ils se rendront compte qu’il leur est désavantageux, à tout point de vue, de continuer à travailler individuellement et qu’ils ont plus d’intérêt à faire partie d’une coopérative.
Ainsi, il faut d’abord, pendant quelques années, organiser en coopératives, par groupes échelonnés, suivant leur degré de conscience politique, les paysans qui sont pauvres ou qui n’ont pas encore une existence aisée (ils représentent au total environ 60 à 70 pour cent de la population rurale), et ensuite seulement admettre les paysans moyens aisés. De cette façon, on évitera l’autoritarisme.
Au cours des prochaines années, il ne faudra en aucun cas admettre dans les coopératives les propriétaires fonciers et les paysans riches, dans les régions où la coopération n’aura pas été réalisée pour l’essentiel. Toutefois, dans les régions où elle l’a été, les coopératives solidement établies peuvent admettre, à certaines conditions, par groupes et par étapes, les anciens propriétaires fonciers ou paysans riches qui ont depuis longtemps renoncé à l’exploitation d’autrui pour se mettre à travailler de leurs mains et qui respectent la loi ; on leur permettra ainsi de prendre part au travail collectif et on continuera à les rééduquer par le travail.
VI
A propos du développement des coopératives, la question qui se pose maintenant n’est pas de critiquer la progression aventureuse. On a tort d’affirmer que le rythme actuel du développement des coopératives « dépasse les possibilités réelles » ou qu’il « dépasse le niveau de conscience politique des masses ». La situation se présente ainsi en Chine: La population est énorme, et la superficie des terres cultivées insuffisante (la moyenne est de trois mous par habitant pour l’ensemble du pays ; mais dans de nombreuses régions des provinces méridionales, elle tombe à un mou, quand elle n’est pas inférieure) ; les calamités naturelles sont fréquentes (chaque année, de vastes étendues cultivées ont plus ou moins à souffrir des ravages causés par les inondations, la sécheresse, les vents, la gelée, la grêle ou les insectes nuisibles), et les méthodes d’exploitation sont arriérées. C’est pourquoi, bien que la vie de la grande masse des paysans se soit améliorée depuis la réforme agraire, parfois même dans une mesure considérable, nombre d’entre eux sont encore en difficulté ou n’ont pas atteint l’aisance, et ceux qui ont une existence aisée sont relativement peu nombreux. Il s’ensuit que la grande majorité des paysans ont le vif désir de s’engager dans la voie du socialisme, désir que l’industrialisation socialiste de notre pays et ses réalisations ne cessent de renforcer. Pour eux, il n’est d’autre issue que le socialisme. Les 60 à 70 pour cent de la population rurale se trouvent dans ce cas. Donc, pour la plupart des paysans, le seul moyen d’échapper à la pauvreté, d’améliorer leurs conditions de vie et de combattre les calamités naturelles, c’est de se grouper et d’avancer dans la grande voie du socialisme. Ce sentiment grandit rapidement dans la masse des paysans pauvres et des paysans peu aisés. Quant aux paysans aisés ou relativement aisés, qui ne représentent que les 20 à 30 pour cent de la population rurale, ils sont hésitants, et certains d’entre eux s’efforcent d’emprunter la voie du capitalisme. En outre, comme je l’ai dit plus haut, nombre de paysans pauvres ou peu aisés, qui n’ont qu’un faible degré de conscience politique, restent pour l’instant dans l’expectative et sont eux aussi indécis ; mais ils acceptent plus facilement le socialisme que les paysans aisés. Telle est la réalité. Et pourtant, certains de nos camarades l’ignorent ; à leurs yeux, les quelques centaines de milliers de petites coopératives de type semi-socialiste qui viennent d’être créées « dépassent les possibilités réelles » ou « dépassent le niveau de conscience politique des masses ». C’est que leur regard reste fixé sur le petit nombre de paysans aisés et qu’ils oublient les paysans pauvres et les paysans peu aisés qui constituent l’immense majorité. C’est là une première conception erronée.
En outre, ces camarades sous-estiment la capacité du Parti communiste de diriger les régions rurales et le soutien enthousiaste que lui apporte la masse des paysans. Ils pensent que notre Parti aura déjà du mal à consolider les quelques centaines de milliers de petites coopératives existantes ; aussi un large développement de la coopération dans l’agriculture leur paraît-il d’autant plus inconcevable. Ils donnent une image pessimiste du travail qu’effectue actuellement notre Parti en dirigeant la coopération agricole ; ce travail, estiment-ils, « dépasse le niveau de l’expérience des cadres ». Certes, la révolution socialiste est une révolution nouvelle. Notre expérience se limitait à la révolution démocratique bourgeoise et nous n’avions pas l’expérience de la révolution socialiste. Or, comment acquérir une telle expérience ? Faut-il rester les bras croisés, ou au contraire se jeter dans la lutte pour la révolution socialiste et apprendre tout en combattant ? Sans mettre à exécution le plan quinquennal, sans entreprendre l’industrialisation socialiste, comment pourrions-nous acquérir l’expérience de l’industrialisation ? Une partie du plan quinquennal est d’ailleurs consacrée à la coopération dans l’agriculture ; si nous ne guidons pas les paysans dans l’organisation d’une ou de plusieurs coopératives agricoles de production par village ou par canton, comment les cadres pourront-ils acquérir un certain « niveau d’expérience » et à partir de quoi pourront- ils l’élever ? Il est manifestement faux de penser que le développement actuel des coopératives agricoles de production « dépasse le niveau de l’expérience des cadres ». C’est là une seconde conception erronée.
La façon dont ces camarades envisagent les choses n’est pas juste. Ils ne considèrent pas l’essence du problème, l’aspect dominant, et insistent sur des questions non essentielles, secondaires. Je ne dis pas que celles-ci doivent être négligées ; il faut les résoudre une à une. Mais nous ne devons pas les confondre avec l’essence du problème, l’aspect dominant, sous peine de perdre notre orientation.
Nous devons être convaincus que 1) les masses paysannes désirent s’engager progressivement, sous la conduite du Parti, dans la voie du socialisme et que 2) le Parti est capable de conduire les paysans dans cette voie. Ces deux points constituent l’essence et l’aspect dominant du problème. Sans cette conviction, nous n’arriverons pas à édifier le socialisme, pour l’essentiel, en trois quinquennats environ.
VII
La grande expérience historique de l’Union soviétique dans l’édification du socialisme exalte notre peuple ; elle lui donne pleine confiance dans l’édification du socialisme en Chine. Cependant, à propos même de cette expérience de signification internationale, les points de vue divergent. Certains camarades désapprouvent la politique de notre Comité central qui consiste à faire concorder, dans notre pays, le développement de la coopération agricole avec celui de l’industrialisation socialiste ; or, une politique du même genre a déjà fait ses preuves en Union soviétique. Le rythme actuel de l’industrialisation leur parait convenir, mais ils estiment qu’il n’est pas nécessaire que la coopération agricole aille de pair avec l’industrialisation, qu’il est préférable qu’elle s’effectue à un rythme particulièrement lent. C’est ne pas tenir compte de l’expérience de l’Union soviétique. Ces camarades ne comprennent pas que l’industrialisation socialiste ne saurait être réalisée isolément, indépendamment de la coopération agricole. En premier lieu, et comme chacun sait, le niveau de production du grain marchand et des matières premières industrielles est actuellement très bas en Chine, tandis que les besoins du pays dans ces domaines s’accroissent d’année en année. Il y a là une contradiction aiguë. Si, en une période de trois plans quinquennaux environ, nous ne sommes pas capables de résoudre pour l’essentiel le problème de la coopération agricole — c’est-à-dire de faire passer notre agriculture de la petite exploitation, avec des instruments aratoires il traction animale, à la grande exploitation mécanisée — et de réaliser en outre de vastes travaux de défrichage organisés par l’Etat et effectués au moyen de machines par une population qui se déplacera à cet effet (il est prévu de défricher, en trois quinquennats, 400 à 500 millions de mous de terres), nous ne serons pas en mesure de résoudre la contradiction entre l’accroissement constant des besoins en grain marchand et en matières premières industrielles et la production actuelle pour les principales cultures, qui est généralement très faible. Dans ce cas, notre industrialisation socialiste se heurterait à d’énormes difficultés et nous ne saurions la mener à bien.
Le même problème s’est posé à l’Union soviétique dans l’édification du socialisme ; elle l’a résolu en dirigeant et en développant de façon planifiée la coopération agricole. C’est seulement en appliquant la même méthode que nous pourrons, nous aussi, résoudre ce problème. En second lieu, certains de nos camarades n’ont pas bien réfléchi il la relation entre les deux faits suivants : L’industrie lourde, secteur capital de l’industrialisation socialiste, fournit à l’agriculture les tracteurs et autres machines agricoles, les engrais chimiques, les moyens de transport modernes, le pétrole, l’énergie électrique, etc. ; mais leur utilisation, surtout à une vaste échelle, n’est possible que sur la base de la grande exploitation agricole issue de la coopération. Actuellement, nous poursuivons non seulement une révolution du système social, la transformation de la propriété privée en propriété publique, mais aussi une révolution technique, le passage de la production artisanale à la grande production mécanisée moderne. Ces deux révolutions sont liées. Dans le domaine de l’agriculture, la coopération doit précéder l’utilisation du gros outillage, étant donné les conditions de notre pays (dans les pays capitalistes, l’agriculture suit une orientation capitaliste). Ainsi, l’industrie et l’agriculture ne doivent en aucun cas être considérées isolément ou séparément ; il doit en être de même pour l’industrialisation socialiste et la transformation socialiste de l’agriculture. Il faut éviter à tout prix d’accorder trop d’importance à l’une au détriment de l’autre.
A cet égard, l’expérience soviétique nous montre aussi la voie à suivre ; mais certains de nos camarades, n’y prêtant aucune attention, considèrent toujours ces questions isolément comme s’il n’y avait aucun rapport entre elles. Enfin, il existe encore deux faits dont la relation échappe à certains de nos camarades : L’industrialisation du pays ainsi que la refonte technique de l’agriculture exigent des fonds énormes, et c’est l’agriculture qui doit en fournir une large part. Ces fonds proviennent non seulement de l’impôt agricole, qui est direct, mais aussi de l’industrie légère, qu’il s’agit de développer pour produire en grande quantité les biens de consommation nécessaires aux paysans et les échanger contre le grain marchand et les matières premières pour l’industrie légère, dont ils disposent ; ainsi, les besoins matériels tant des paysans que de l’Etat seront satisfaits, et celui-ci pourra accumuler les fonds nécessaires. Or le développement, à une vaste échelle, de l’industrie légère implique le développement non seulement de l’industrie lourde, mais aussi de l’agriculture. Car il ne saurait être réalisé sur la base de la petite économie paysanne ; il ne peut reposer que sur la grande exploitation agricole, c’est-à-dire, dans le cas de notre pays, sur une agriculture socialiste, organisée en coopératives. Seul ce type d’agriculture donnera aux paysans un pouvoir d’achat incomparablement supérieur à celui dont ils disposent actuellement. Ici encore, nous avons l’expérience de l’Union soviétique, mais certains de nos camarades n’y prêtent pas attention, S’en tenant à la position de la bourgeoisie, des paysans riches, ou à celle des paysans moyens aisés qui ont une tendance spontanée au capitalisme, ils pensent toujours aux intérêts d’une minorité, au lieu d’envisager, à partir de la position de la classe ouvrière, ceux du pays et du peuple tout entiers.
VIII
Certains camarades ont même cru trouver dans l’histoire du Parti communiste de l’Union soviétique des arguments pour critiquer ce qu’ils appellent la précipitation et la progression aventureuse dans le développement actuel de notre coopération agricole. L’Histoire du Parti communiste (bolchévik) de l’U.R.S.S. ne rapporte-t-elle pas en effet qu’en Union soviétique, à un certain moment, de nombreuses organisations locales du Parti ont commis, en ce qui concerne le rythme dans la réalisation de la coopération, des erreurs ducs à la précipitation et à la progression aventureuse ? Faut-il négliger cette expérience internationale ?
J’estime qu’il nous faut y prêter attention et nous opposer à toute précipitation, à toute progression aventureuse, qui néglige le travail de préparation et qui ne tient pas compte du niveau de conscience politique des masses paysannes ; toutefois, nous ne devons pas permettre à ces camarades de se servir de cette expérience comme couverture pour accréditer leur idée qu’il faut avancer à pas de tortue.
Quelle est, à propos de la coopération agricole en Chine, la décision de notre Comité central ?
Premièrement, elle prévoit de réaliser pour l’essentiel la coopération agricole en dix-huit ans. Une période d’un peu plus de trois ans, qui va de la fondation de la République populaire de Chine en octobre 1949 à la fin de l’année 1952, fut consacrée au relèvement de notre économie. Dans le domaine de l’agriculture, voici ce que nous avons fait au cours de cette période : nous avons achevé la réforme agraire et rétabli la production ; de plus, dans toutes les régions anciennement libérées, nous avons étendu considérablement l’organisation des équipes d’entraide et commencé à créer des coopératives de type semi-socialiste, ce qui nous a permis d’acquérir quelque expérience. Ensuite, ce fut le premier plan quinquennal, commencé en 1953. Il y a maintenant près de trois ans que sa réalisation se poursuit, et notre mouvement de coopération agricole s’est étendu à tout le pays ; notre expérience s’est également enrichie. Entre la fondation de la République populaire de Chine et l’achèvement du troisième plan quinquennal il se sera écoulé dix-huit ans au total. Au cours de cette période, nous nous proposons de réaliser, pour l’essentiel, la transformation socialiste de l’agriculture en même temps que l’industrialisation socialiste et la transformation socialiste de l’artisanat ainsi que de l’industrie et du commerce capitalistes. Est-ce possible ? L’expérience soviétique nous montre que c’est tout à fait possible. En Union soviétique, la guerre civile a pris fin en 1920. La coopération agricole y fut réalisée en dix-sept ans, de 1921 à 1937 ; mais l’essentiel de cette tâche fut effectué en six ans, de 1929 à 1934. Si, au cours de cette période, des organisations locales du Parti se sont laissé « griser par les succès », comme le rapporte l’Histoire du Parti communiste (bolchévik) de l’U.R.S.S., cette erreur fut promptement corrigée. Finalement, grâce à ses efforts acharnés, l’Union soviétique réussit à accomplir la transformation socialiste de toute l’agriculture et mena à bien l’œuvre gigantesque de la refonte technique dans le domaine agricole. La voie suivie par l’Union soviétique est pour nous un modèle.
Deuxièmement, la méthode que nous appliquons dans la transformation socialiste de l’agriculture est d’avancer pas à pas. Dans la première phase, nous engageons les paysans à organiser, suivant le principe du libre consentement et de l’avantage réciproque, des équipes d’entraide qui ne portent en elles que des germes du socialisme et n’englobent chacune que quelques familles ou un peu plus de dix. Puis, dans la deuxième phase, nous les convions à organiser, sur la base de ces équipes d’entraide et également selon le principe du libre consentement et de l’avantage réciproque, de petites coopératives agricoles de production de type semi-socialiste, avec pour trait distinctif l’apport en terres et la gestion unique. Dans la troisième phase, nous les invitons à s’unir encore plus largement pour organiser, sur la base de ces petites coopératives de type semi-socialiste et toujours selon le même principe, de grandes coopératives agricoles de production de type entièrement socialiste. Ces étapes permettront aux paysans de partir de leur propre expérience pour élever graduellement leur niveau de conscience socialiste et transformer peu à peu leur mode de vie, de manière qu’ils aient moins l’impression d’un changement soudain. Elles permettront généralement d’éviter que la production ne baisse pendant une certaine période, disons un an ou deux ; bien plus, elles doivent en assurer l’accroissement d’année en année, ce qui est parfaitement réalisable. Plus de 80 pour cent des 650.000 coopératives existantes ont accru leur production ; dans plus de 10 pour cent la production n’a accusé ni augmentation ni baisse ; dans les autres, soit moins de 10 pour cent, la production a baissé. Les deux derniers cas ne sont pas brillants, et celui des coopératives qui enregistrent une baisse est particulièrement mauvais ; il faut donc procéder à leur révision sans ménager les efforts. Ainsi, puisque plus de 80 pour cent de l’ensemble des coopératives ont obtenu une augmentation de leur production (de 10 à 30 pour cent), que plus de 10 pour cent n’ont enregistré ni augmentation ni baisse de production la première année, mais peuvent obtenir un accroissement au cours de la deuxième année, après le travail de révision, et qu’enfin celles qui ont enregistré une baisse ont également la possibilité, après un travail de révision, d’obtenir un accroissement de production ou du moins de n’accuser ni augmentation ni baisse au cours de la deuxième année, on peut affirmer que, dans l’ensemble, notre mouvement de coopération agricole connaît un développement sain, qu’il est en mesure d’éviter la baisse de la production et d’assurer pour l’essentiel son accroissement. De plus, l’application de toutes ces mesures est un excellent moyen pour former les cadres. Elle permettra de préparer peu à peu, pour les coopératives, un personnel administratif et technique nombreux.
Troisièmement, nous fixons une fois par an, et en fonction de la situation réelle, les chiffres de contrôle pour le développement de la coopération agricole ; en outre, nous vérifions, plusieurs fois par an, le travail de coopération. Ainsi, chaque année, suivant l’évolution de la situation et les résultats obtenus, on peut décider des mesures concrètes propres à assurer le développement des coopératives dans chaque province, dans chaque district et dans chaque canton. En certains endroits, on peut suspendre quelque temps le développement des coopératives afin d’effectuer la révision qui s’impose, Dans d’autres, le développement et la révision peuvent être menés de front. Dans certaines coopératives, on peut autoriser une partie des membres à se retirer. On peut même admettre, dans des cas particuliers, qu’une coopérative soit temporairement dissoute. Dans certaines régions, on établira un grand nombre de coopératives nouvelles, tandis qu’ailleurs on se contentera d’augmenter le nombre des familles dans les coopératives déjà créées. Chaque fois qu’un groupe de coopératives a été constitué dans une province ou dans un district, il faut marquer un temps d’arrêt, afin de procéder à un travail de révision, avant d’en créer un autre. Ne jamais admettre ni trêve ni repos est une conception erronée. Quant au travail de vérification du mouvement de coopération, le Comité central et les comités du Parti pour les provinces, les régions autonomes, les municipalités et les préfectures doivent le prendre fermement en main et s’assurer qu’il sera fait non pas une fois, mais plusieurs fois par an. Chaque fois qu’un problème vient à se poser, réglez-le immédiatement ; ne laissez pas s’amonceler les questions pour tenter ensuite de les résoudre en bloc. Il faut critiquer à temps et non après coup comme on fait bien souvent. Ainsi, durant les sept premiers mois de cette année, le Comité central a convoqué à lui seul trois conférences, y compris celle d’aujourd’hui, pour examiner avec les camarades responsables des différentes régions les problèmes de la coopération dans les campagnes. Grâce à cette méthode, qui consiste à élaborer des mesures adaptées aux conditions du lieu et à donner à temps une juste direction, nous sommes assurés de commettre moins de fautes dans notre travail et de pouvoir corriger rapidement celles qui auront été faites.
Tenant compte de tout ce qui précède, ne pouvons-nous pas affirmer que la politique directrice de notre Comité central en matière de coopération agricole est juste, et que, par conséquent, elle est pleinement capable d’assurer à ce mouvement un développement sain ? Je crois que nous pouvons et que nous devons l’affirmer, et qu’il est tout à fait erroné de qualifier cette politique de « progression aventureuse ».
IX
Partant de la position de la bourgeoisie, des paysans riches, ou de celle des paysans moyens aisés qui ont une tendance spontanée au capitalisme, certains camarades abordent de façon erronée le problème capital de l’alliance des ouvriers et des paysans. Ils s’imaginent que la situation actuelle du mouvement de coopération est très dangereuse, aussi nous conseillent-ils de « descendre immédiatement de cheval » dans notre avance sur la voie de la coopération. « Si vous ne le faites pas, nous avertissent-ils, vous risquez de briser l’alliance des ouvriers et des paysans. » Nous estimons, quant à nous, que c’est juste le contraire : Si nous ne montons pas immédiatement en selle, nous risquons de rompre l’alliance des ouvriers et des paysans. La différence a l’air de ne porter que sur un seul mot — l’un dit qu’il faut « descendre », l’autre, qu’il faut « monter » — mais elle traduit toute la divergence existant entre deux lignes politiques. Comme chacun sait, nous avons déjà réalisé une alliance des ouvriers et des paysans, sur la base de la révolution démocratique bourgeoise dirigée contre l’impérialisme et le féodalisme ; cette révolution a arraché la terre aux propriétaires fonciers pour la distribuer aux paysans ; elle a ainsi libéré ces derniers des chaînes de la propriété féodale. Mais cette révolution appartient au passé, et nous en avons fini avec la propriété féodale. Ce qui subsiste dans les campagnes, c’est la propriété capitaliste des paysans riches et la propriété privée, vaste comme un océan, des paysans individuels. Depuis quelques années, comme on peut le constater, la tendance spontanée au capitalisme s’affirme chaque jour davantage dans les campagnes ; partout on voit apparaître de nouveaux paysans riches, alors que beaucoup de paysans moyens aisés s’efforcent de devenir des paysans riches. Par ailleurs, de nombreux paysans pauvres, ne disposant pas de moyens de production suffisants, sont encore dans le besoin ; certains ont des dettes, d’autres ont vendu ou loué leur terre. Si on laisse se poursuivre cette évolution, la bipolarisation ira inévitablement en s’aggravant. Les paysans qui ont perdu leur terre et ceux qui vivent encore dans la pauvreté nous reprocheront de ne pas les secourir et de ne pas les aider à surmonter leurs difficultés. Les paysans moyens aisés, qui ont tendance à s’engager dans la voie du capitalisme, seront eux aussi mécontents de nous ; nous ne pourrons jamais, en effet, satisfaire leurs exigences puisque nous n’avons nulle intention de suivre cette voie. Dans une telle situation, l’alliance des ouvriers et des paysans pourrait-elle encore être solidement maintenue ? Evidemment pas. Le problème ne peut être résolu que sur une nouvelle base: tout en procédant graduellement à l’industrialisation socialiste et à la transformation socialiste de l’artisanat ainsi que de l’industrie et du commerce capitalistes, il faut réaliser progressivement la transformation socialiste de l’agriculture dans son ensemble, c’est-à- dire réaliser la coopération et liquider l’économie des paysans riches et l’économie individuelle dans les régions rurales, afin d’assurer l’aisance à tout le peuple de nos campagnes. Nous estimons que c’est le seul moyen de consolider l’alliance des ouvriers et des paysans. Sinon, elle risque d’être brisée. Les camarades qui nous conseillent de “descendre de cheval » se trompent complètement sur cette question.
X
Nous devons nous rendre compte dès maintenant que la transformation socialiste connaîtra bientôt, et inévitablement, un essor général dans nos campagnes. A la fin du premier plan quinquennal et au début du second, c’est-à-dire au printemps 1958, les coopératives de type semi-socialiste engloberont quelque 250 millions de paysans, soit environ 55 millions de familles (si l’on admet une moyenne de quatre personnes et demie par foyer), ce qui représentera la moitié de la population rurale. A ce moment-là, la transformation semi-socialiste de l’économie agricole sera achevée pour l’essentiel dans de nombreux districts et dans quelques provinces ; en outre, dans les diverses régions du pays, un petit nombre de coopératives de type semi-socialiste se seront transformées en coopératives de type entièrement socialiste. Vers le milieu du deuxième quinquennat, c’est-à-dire en 1960, nous devrons avoir réalisé, pour l’essentiel, la transformation semi-socialiste de l’économie agricole dans l’autre moitié de la population rurale. A ce moment-là, le nombre des coopératives de type semi-socialiste qui auront passé au type socialiste sera plus grand. Durant les deux premiers quinquennats, cette réforme sociale occupera toujours la première place dans nos transformations à la campagne, et la refonte technique la seconde. Le nombre des grosses machines agricoles aura certes augmenté, mais pas encore dans de fortes proportions. C’est au cours du troisième quinquennat que la réforme sociale et la refonte technique pourront progresser parallèlement dans les campagnes. Chaque année, on utilisera davantage de grosses machines agricoles. Quant à la réforme sociale, les coopératives, dès après 1960, passeront progressivement, par groupes et par étapes, du type semi-socialiste au type entièrement socialiste. L’aspect social et économique de la Chine ne changera complètement que lorsque la transformation socialiste du système socio-économique sera entièrement réalisée et que, dans le domaine de la technique, les machines seront utilisées dans toutes les branches de la production et dans tous les lieux où leur emploi sera possible. En raison des conditions économiques propres à notre pays, la refonte technique sera plus longue à réaliser que la réforme sociale. On estime que la refonte technique de l’agriculture à l’échelle nationale sera accomplie, pour l’essentiel, en quatre ou cinq quinquennats, soit en vingt à vingt-cinq ans. Le Parti tout entier doit lutter pour l’accomplissement de cette tâche grandiose.
XI
Nous devons avoir un plan d’ensemble et renforcer la direction.
Nous devons élaborer des plans à l’échelle nationale, provinciale et préfectorale. à l’échelle du district, de l’arrondissement et du canton, qui prévoient la réalisation de la coopération agricole étape par étape. A mesure que nous avançons dans notre travail, nos plans doivent être régulièrement révisés à la lumière des conditions concrètes. Les organisations du Parti et celles de la Ligue de la Jeunesse, à l’échelon de la province, de la préfecture, du district, de l’arrondissement ou du canton, doivent accorder une sérieuse attention aux problèmes ruraux et améliorer réellement leur travail de direction à la campagne. Les principaux camarades responsables des comités locaux du Parti et de la Ligue de la Jeunesse aux différents échelons doivent s’adonner à l’étude du travail dans la coopération agricole afin de devenir compétents en la matière. Bref, il faut s’assurer l’initiative et non rester passif, il faut renforcer la direction et non l’abandonner.
XII
Au mois d’août 1954 (ce n’est donc plus un fait nouveau), le Comité du Parti communiste chinois pour la Province du Heilongkiang signalait dans son rapport :
Avec l’essor et le développement de la coopération agricole, les organisations d’entraide et les coopératives de divers types, ainsi que toutes les couches du peuple à la campagne se sont, à des degrés différents, mises en mouvement. Les coopératives agricoles de production déjà créées se préparent à accroître le nombre de leurs membres et élaborent des projets dans ce sens, ce que font également les équipes d’entraide appelées à s’organiser en coopératives, tandis que celles dont les conditions ne sont pas encore mûres pour cette transformation souhaitent continuer à se développer et à progresser. Parmi la masse des paysans, les uns s’empressent d’adhérer soit aux nouvelles coopératives, soit aux anciennes : les autres, qui ne sont pas disposés à rejoindre cette année les coopératives, se préparent activement à entrer dans les équipes d’entraide. L’action a pris une telle ampleur qu’elle est devenue un mouvement de masse. C’est là un trait nouveau et frappant dans le grand essor de la coopération agricole. Mais, dans certains districts et arrondissements, des camarades dirigeants n’ont pas su s’adapter à cette nouvelle situation en renforçant la direction au moment opportun ; c’est pourquoi des phénomènes malsains ont fait leur apparition dans un certain nombre de tsouen et de touen. [Dans le Heilongkiang, le tsouen est une unité administrative qui correspond à un canton des provinces situées au sud de la Grande Muraille, tandis que le touen n’est pas une unité administrative et correspond à un village des mêmes provinces.] Comme on dit, quand les paysans se mettent eux-mêmes à la recherche de partenaires, « les forts vont avec les forts et les paysans nécessiteux sont évincés »; « on se dispute les cadres et les membres, ce qui crée la discorde »; « il y a une concentration aveugle de cadres en un même endroit »: « les paysans riches et les paysans aisés imprégnés d’idées capitalistes profitent de la situation pour organiser des équipes d’entraide de forme rudimentaire ou des coopératives de paysans riches ». Tous ces faits montrent pleinement qu’avec le grand essor de la coopération agricole il ne suffit plus, pour appliquer la politique du Parti et pour diriger le mouvement, d’envisager simplement la création de nouvelles coopératives; il faut, en tenant compte de l’ensemble du tsouen [c’est-à-dire de l’ensemble du canton] et de l’impulsion générale à donner au mouvement de coopération agricole, songer à la fois à l’extension des coopératives existantes et à la création de nouvelles, au développement des coopératives et au passage des équipes d’entraide à un niveau supérieur, au travail de l’année en cours et à celui qui se fera dans un an ou même dans deux. C’est le seul moyen d’appliquer pleinement la politique du Parti et d’obtenir un développement sain du mouvement coopératif agricole.
L’observation selon laquelle, « dans certains districts et arrondissements, des camarades dirigeants n’ont pas su s’adapter à cette nouvelle situation en renforçant la direction au moment opportun » est-elle seulement valable pour la province du Heilongkiang ? Ne s’applique-t-elle qu’à certains districts et arrondissements ? Je pense qu’il est fort probable qu’il y a dans de nombreux organismes dirigeants du pays des cas typiques de cette grave situation où les responsables restent à la traîne du mouvement.
Le rapport du Comité du Parti pour le Heilongkiang continue en ces termes :
Dans le tsouen de Hsikin, district de Chouangtcheng, on a procédé à une planification d’ensemble, en associant la direction exercée par le Parti au libre consentement des masses. C’est là une innovation dans la direction au cours du grand essor de la coopération. Son importance réside avant tout dans le fait que, grâce à la planification, la ligne de classe du Parti dans les campagnes a été pleinement appliquée, l’unité entre les paysans pauvres et les paysans moyens a été renforcée et une lutte énergique s’est développée contre les tendances caractéristiques des paysans riches. De même, les cadres ont été répartis d’une manière rationnelle, dans l’intérêt d’un développement général de la coopération agricole. Les relations entre les coopératives, ainsi que leurs liens avec les équipes d’entraide ont été rajustés et resserrés, ce qui a fait progresser de façon planifiée le mouvement de coopération agricole sous tous ses aspects. En second lieu, grâce à la planification, les dispositions concrètes pour un vaste développement de la coopération agricole ont été communiquées aux organismes dirigeants de l’échelon de base et aux larges masses ; ainsi, la cellule du Parti du tsouen a compris comment elle doit diriger, les vieilles coopératives ont appris comment progresser, les nouvelles comment s’établir, et les équipes d’entraide ont trouvé la voie concrète pour aller de l’avant. De ce fait, la cellule du Parti du tsouen et les larges masses ont pu donner libre cours à leur esprit d’initiative et à leur zèle, et le juste principe qui consiste à s’appuyer aussi bien sur la cellule du Parti que sur l’expérience et la sagesse des masses a été pleinement vérifié. Enfin, c’est précisément en procédant à la planification qu’on a pu mieux connaître la vraie situation à la campagne et appliquer concrètement la politique du Parti sous tous ses aspects. C’est pourquoi il est devenu possible d’éviter aussi bien la précipitation et la progression aventureuse que le conservatisme et le laisser- aller ; on a pu ainsi appliquer correctement la politique du Comité central : « direction active et progression méthodique ».
Comment a-t-on mis fin aux “phénomènes malsains » dont parle le rapport du Comité du Parti pour le Heilongkiang ? Le rapport lui- même ne répond pas directement à la question. Mais celui du Comité du Parti pour le District de Chouangtcheng, pièce annexée au rapport du Comité provincial, le fait en ces termes :
Grâce à la planification d’ensemble, qui combine la direction exercée par la cellule du Parti avec le libre consentement des masses, la tendance erronée d’écarter des coopératives les familles pauvres a pu être corrigée, la concentration excessive de cadres en un même endroit a pris fin, on ne se dispute plus les cadres et les membres, les liens entre coopératives et équipes d’entraide ont été resserrés, on a fait échec aux tentatives des paysans riches et des paysans moyens aisés d’organiser des coopératives de paysans riches ou des équipes d’entraide de forme rudimentaire, et le plan de la cellule du Parti se trouve réalisé pour l’essentiel. En outre, on a augmenté de 40 pour cent l’effectif des deux coopératives déjà établies, mis en place l’infrastructure de six nouvelles et organisé deux équipes d’entraide. Nous estimons que si tout va bien, la coopération sera réalisée l’année prochaine [c’est-à-dire en 1955] dans tout le tsouen. A l’heure actuelle, les masses s’emploient à accomplir le plan de cette année pour le développement de la coopération agricole, à augmenter la production et à garantir une bonne récolte. Et voici quelle est l’opinion générale des cadres : « Heureusement que nous avons agi de la sorte, sinon quel désordre ! Rien n’aurait marché cette année et les effets s’en feraient encore sentir l’année prochaine. »
Alors, travaillons tous dans ce sens !
Planification d’ensemble et direction renforcée — voilà notre politique.