Mao Zedong
Briser l’offensive de Tchiang Kai-chek par une guerre de légitime défense1
20 juillet 1946
1. Après avoir déchiré l’Accord de trêve2, violé les résolutions de la Conférence consultative politique3 et occupé Seping, Tchantchouen et d’autres de nos villes dans le Nord-Est, Tchiang Kaï-chek déclenche maintenant contre nous une nouvelle offensive de grande envergure dans la Chine de l’Est et du Nord ; par la suite, il renouvellera sans doute ses attaques contre le Nord-Est. Le peuple chinois ne pourra rétablir la paix avant d’avoir brisé complètement l’offensive de Tchiang Kaï-chek dans une guerre de légitime défense.
2. Notre Parti et notre armée sont en train de faire tous les préparatifs nécessaires pour briser l’offensive de Tchiang Kaï-chek et gagner ainsi la paix. Tchiang Kaï-chek dispose de l’aide des Etats-Unis, mais le sentiment du peuple est contre lui, le moral de ses troupes est bas, et son économie dans une situation difficile. Quant à nous, nous ne recevons pas d’aide de l’étranger, mais le sentiment du peuple est pour nous, le moral de nos troupes est élevé, et, sur le plan économique, nous sommes capables de nous tirer d’affaire. Donc, nous pouvons vaincre Tchiang Kaï-chek. A ce sujet, une confiance entière doit régner dans tout notre Parti.
3. Pour vaincre Tchiang Kaï-chek, la guerre de mouvement est en général la méthode de combat qu’il faut utiliser. Par conséquent, l’abandon momentané de certains territoires ou de certaines villes est non seulement inévitable, mais nécessaire. Si nous abandonnons momentanément certains territoires ou certaines villes, c’est que la victoire finale est à ce prix ; nous ne pouvons y parvenir autrement. Nous devons le faire comprendre clairement à tous les membres du Parti, à tout le peuple des régions libérées, et y préparer les esprits.
4. Pour briser l’offensive de Tchiang Kaï-chek, nous devons coopérer étroitement avec les masses populaires et gagner tous ceux qui sont susceptibles de venir à nous. A la campagne, nous devons d’une part résoudre le problème agraire avec décision, nous appuyer fermement sur les salariés agricoles et les paysans pauvres, et nous unir avec les paysans moyens ; d’autre part, en résolvant le problème agraire, nous devons distinguer le commun des paysans riches et des petits et moyens propriétaires fonciers d’avec les traîtres, les mauvais hobereaux et les tyrans locaux. Il faut traiter avec moins de rigueur les premiers que les seconds. Là où le problème agraire a déjà été résolu, nous devons modifier notre attitude et être moins sévères envers l’ensemble de la classe des propriétaires fonciers, à l’exception d’un petit nombre de réactionnaires. Afin de réduire le nombre des éléments hostiles et de consolider les régions libérées, nous devons aider tous les propriétaires fonciers qui ont de la peine à assurer leur subsistance, engager les propriétaires fonciers fugitifs à revenir et leur offrir la possibilité de gagner leur vie. Dans les villes, nous devons non seulement nous unir avec la classe ouvrière, la petite bourgeoisie et tous les éléments progressistes, mais prendre soin de nous unir aussi avec tous les éléments du centre, afin d’isoler les réactionnaires. Parmi les troupes du Kuomintang, il nous faut gagner à notre cause tous les opposants possibles à la guerre civile et isoler les bellicistes.
5. Pour briser l’offensive de Tchiang Kaï-chek, nos plans doivent porter sur une longue durée. Nous devons user avec la plus grande économie de nos ressources humaines et matérielles, et faire tout notre possible pour en éviter le gaspillage. Il faut enquêter sur les cas de corruption apparus çà et là et y mettre fin. Nous devons travailler ferme à la production, afin de pouvoir subvenir nous-mêmes à tous nos besoins en produits de première nécessité, surtout en céréales et en textiles. Nous devons généraliser la culture du coton, inciter chaque famille à filer, et chaque village à tisser. Nous devons commencer à développer ces activités même dans le Nord-Est. Dans le domaine des finances et du ravitaillement, nous devons répondre aux besoins matériels de la guerre de légitime défense et alléger en même temps les charges du peuple, de sorte que ses conditions d’existence dans nos régions libérées s’améliorent malgré la guerre. Bref, à l’opposé de Tchiang Kaï-chek pour qui tout dépend de l’étranger, nous comptons entièrement sur nos propres efforts, et nous sommes invincibles. Nous menons une vie simple et nous luttons ferme, nous veillons à la fois aux besoins de l’armée et à ceux du peuple ; à l’opposé, dans les régions contrôlées par Tchiang Kaï-chek, les hautes classes sociales sont corrompues et pourries, tandis que le peuple croupit dans la misère. Dans ces circonstances, nous sommes sûrs de la victoire.
6. Des difficultés se dressent devant nous, mais ces difficultés peuvent et doivent être surmontées. Tous les camarades du Parti, toutes les troupes et tout le peuple des régions libérées doivent former un seul bloc pour briser complètement l’offensive de Tchiang Kaï-chek et édifier une Chine nouvelle, indépendante, pacifique et démocratique.