Les changements annoncés par Nikita Khrouchtchev, secrétaire général du Comité Central du PCUS(b), peuvent être résumés par un simple principe : il n’y a plus de direction centralisée qui serve de guide.
La modification des statuts – dans l’esprit désormais de la bonne gestion pour l’édification du communisme, le socialisme étant atteint – est l’aspect secondaire de la clef qui est la disparition de la centralisation politique.
Staline n’est ainsi plus secrétaire général du Parti : ce poste est aboli. Il est désormais simplement membre du Comité Central, au même titre que d’autres.
Le Bureau Politique disparaît. Il consistait en un Comité Central réduit, prenant les décisions lorsque celui-ci ne se tenait pas. Il est désormais remplacé par un « présidium du Comité Central ».
Nikita Khrouchtchev prétendit au XIXe congrès que ce n’était qu’un changement de dénomination, que le terme reflétait mieux le rôle joué par le Bureau Politique. En réalité, on passe désormais à un système collégial, qui va être de rigueur désormais en URSS jusqu’à son effondrement.
Le Bureau Politique avait 9 membres et 2 suppléants au précédent congrès, le Présidium nouvellement fondé a 25 membres et 11 suppléants. C’est une hausse parallèle à celle décidée pour le Comité Central, qui a dorénavant 125 membres et 110 suppléants, pour 71 et 68 respectivement auparavant.
On devine déjà le jeu des chaises musicales qui va se dérouler, rendant d’ailleurs profondément instable pour la période 1953-1964 la direction du Parti devenu révisionniste.
Un autre aspect est la disparition du Bureau d’organisation et du Secrétariat du Comité Central. Le Bureau d’organisation s’occupait de gérer les postes clefs du Parti, en choisissant les membres adéquats, ainsi que de superviser toutes les structures du Parti sur le plan de l’organisation.
Le Secrétariat du Comité Central était une institution quant à elle ancrée dans l’organisation depuis le VIIIe congrès du Parti Communiste de Russie (bolchevik), en 1919. Son rôle était la vie courante du Parti, soit la formation des cadres, l’instruction des membres du Parti et leur organisation, la propagande et l’agitation, mais également l’ensemble des activités où le Parti était impliqué, ce qui signifiait de très nombreux aspects pour l’URSS, justement guidé par le Parti.
Le XIXe congrès forme une sorte de super « secrétariat », combinant les tâches du Bureau d’organisation et du Secrétariat du Comité Central. Cela signifie dans les faits une super centralisation, censée être justifiée par le caractère collégial du Présidium du Comité Central.
Le nombre de membres est d’ailleurs très restreint. Alors que le Bureau d’organisation disposait de 9 membres et le Secrétariat du Comité Central quatre membres, le nouveau « super » secrétariat n’a que dix membres.
En pratique, cela sera un sas pour la bataille pour le pouvoir au sein de l’URSS révisionniste. Les dix membres appartiennent forcément au Comité Central et les secrétaires les plus « expérimentés » du secrétariat appartiennent en même temps au « super » secrétariat et au présidium, cette double appartenance étant un sas pour la direction (ce fut la norme pour tous les dirigeants de l’URSS à partir de Nikita Khrouchtchev).
Un autre point, très important, consiste en les organes de contrôle. Il y a ici tous les ingrédients pour le coup d’État qui va avoir lieu par la suite.
Initialement, il y avait à partir de 1920 une Inspection ouvrière et paysanne, chargée de surveiller les organes d’État, les administrations locales et les entreprises. Ses fonctions passèrent, au XVIIe congrès du PCUS(b) en 1934, à une Commission Populaire de Contrôle auprès du Conseil des commissaires du peuple.
Une Commission Centrale de Contrôle auprès du Comité Central fut mis en place également, pour se charger de son côté de surveiller la discipline des membres du PCUS, prenant le relais d’une autre structure ayant ce rôle.
Les changements furent les suivants :
a) En mars 1946, les commissaires du peuple devinrent des ministres, les commissariats du peuple des ministères. La Commission Populaire de Contrôle auprès du Conseil des commissaires du peuple devint un ministère. Il en resta ainsi au XIXe congrès.
b) La Commission Centrale de Contrôle du Parti fut radicalement modifiée au XIXe congrès du PCUS(b), devenant un Comité auprès du Comité Central. Il y a dorénavant des « chargés de pouvoir » représentant le Comité pouvant être envoyés n’importe où dans le pays, représentant en tant que tel la direction.
Cette subordination de la Commission Centrale de Contrôle du Parti s’accompagne également du caractère désormais intouchable du Comité Central.
En effet, si c’est toujours le congrès qui décide de tout, celui-ci ne se réunit que tous les quatre ans et le XIXe congrès supprime la réunion, à l’appel du Comité Central, au minimum une fois par an, d’une conférence des organisations locales du Parti. Cette conférence avait le droit de modifier le cinquième des membres du Comité Central.
On a donc un Comité Central intouchable, avec en son sein dix personnes formant le « super » secrétariat et ayant donc la main sur l’appareil au niveau de l’autorité, tandis que les choix politiques étaient décidées de manière collégiale par le Comité Central, le présidium plus restreint menant la politique proprement dite, avec un noyau dur de dirigeants à la fois membres du présidium et du « super » secrétariat façonnant le Parti à sa guise.
On a là tout le dispositif de l’équilibre à la fois stable et conflictuel entre factions bourgeoises au sein du PCUS devenu révisionniste. Ce mode d’organisation n’est en rien conforme aux exigences communistes.