Par « svatiska », en fait un mot masculin, on parle d’une croix gammée relevant de l’hindouisme, le mot venant du sanskrit (su pour « bien » et asti « il est »). Néanmoins, ce symbole très ancien est connu de toute l’humanité, depuis l’Amérique jusqu’à l’Extrême-Orient en passant par la culture néolithique dite de Vinča dans les Balkans actuels, ainsi qu’en Afrique.
Ce constat a produit des interprétations idéalistes très prononcées, associées à la thèse dominante comme quoi ce serait une représentation du soleil en mouvement.
À suivre le psychiatre et psychanalyste Carl Gustav Jung, ce symbole relèverait d’un « inconscient collectif » propre à toute l’humanité ; tous les êtres humains auraient le cerveau façonné d’une telle manière qu’ils aboutiraient tous aux mêmes symboles.
Le mystique René Guénon, lui emboîtant le pas niveau symbolisme, y voit la preuve d’une sagesse « primordiale » datant des temps anciens. Il y aurait un axe central pour toute chose et, mélangeant un peu tout et n’importe quoi, René Guénon dit qu’il faut voir le swastika comme tournant autour d’un axe perpendiculaire, comme la planète autour de « l’axe du monde ».
Comme on le voit, il y a une base matérialiste à tout cela, mais c’est un idéalisme ; l’idéalisme surinterprète, déforme, modifie, abîme les faits.
« Une des formes les plus remarquables de ce que nous avons appelé la croix horizontale, c’est-à-dire de la croix tracée dans le plan qui représente un certain état d’existence, est la figure du swastika, qui semble bien se rattacher directement à la Tradition primordiale, car on la rencontre dans les pays les plus divers et les plus éloignés les uns des autres, et cela dès les époques les plus reculées ; loin d’être un symbole exclusivement oriental comme on le croit parfois, il est un de ceux qui sont le plus généralement répandus, de l’Extrême-Orient à l’Extrême-Occident, car il existe jusque chez certains peuples indigènes de l’Amérique.
Nous avons dit ailleurs que le swastika est essentiellement le « signe du Pôle » [au sens d’un axe du monde] ; si nous le comparons à la figure de la croix inscrite dans la circonférence, nous pouvons nous rendre compte aisément que ce sont là, au fond, deux symboles équivalents à certains égards ; mais la rotation autour du centre fixe, au lieu d’être représentée par le tracé de la circonférence, est seulement indiquée dans le swastika par les lignes ajoutées aux extrémités des branches de la croix et formant avec celles-ci des angles droits ; ces lignes sont des tangentes à la circonférence, qui marquent la direction du mouvement aux points correspondants.
Comme la circonférence représente le monde manifesté, le fait qu’elle est pour ainsi dire sous-entendue indique très nettement que le swastika n’est pas une figure du monde, mais bien de l’action du Principe à l’égard du monde.
Si l’on rapporte le swastika à la rotation d’une sphère telle que la sphère céleste autour de son axe, il faut le supposer tracé dans le plan équatorial, et alors le point central sera, comme nous l’avons déjà expliqué, la projection de l’axe sur ce plan qui lui est perpendiculaire.
Quant au sens de la rotation indiquée par la figure, l’importance n’en est que secondaire et n’affecte pas la signification générale du symbole ; en fait, on trouve l’une et l’autre des deux formes indiquant une rotation de droite à gauche et de gauche à droite, et cela sans qu’il faille y voir toujours une intention d’établir entre elles une opposition quelconque. »
L’utilisation du swastika par les nazis relève pareillement d’une approche mystique. Officiellement, ce serait un ancien symbole « aryen », choisi par Hitler comme symbole de la « victoire à réaliser ».
En pratique, c’était lié à tout un milieu nazi féru d’occultisme et voyant dans ce symbole la porte ouverte à toutes les interprétations délirantes sur une race aryenne qui aurait vécu en « Hyperborée » tout au Nord du monde.
Là encore, il y a une base réelle, le fait que le swastika ait un rapport avec le Nord, mais l’idéalisme transforme tout de manière subjectiviste.
Si on regarde par contre au moyen du matérialisme dialectique, on doit se fonder sur la chose suivante : une très grande partie de l’humanité connaît le symbole, depuis des milliers d’années.
Cette partie de l’humanité vit dans l’hémisphère nord et les étoiles étaient, de fait, la seule chose qu’avait en commun l’ensemble de l’humanité il y a des milliers d’années.
Et que voit-on ? Que justement le mouvement de la Grande Casserole, visible toute l’année, établit précisément forme et le mouvement montrés par le swastika.
La Grande Casserole désigne les sept étoiles les plus brillantes de la constellation de la Grande Ourse. Elle est appelée également Grand Chariot et, autrefois, le Septentrion ou encore constellation des Sept Bœufs.
Septentrion signifie nord et on n’utilise plus guère que le mot « septentrional », mais sa racine latine s’appuie justement sur septem (« sept ») et triones, pluriel de trio (« bœuf de labour »).
C’est-à-dire que les étoiles de la Grande Casserole étaient employées pour trouver le Nord et ce toute l’année, car elles sont circumpolaires, elles ne se « couchent » jamais dans l’hémisphère nord.
Concrètement, trois étoiles forment le manche de la casserole (Alioth, Mizar et Alkaïd), quatre la casserole elle-même (Dubhé, Mérak, Phecda et Megrez).
Si on prend les deux dernières étoiles de la casserole et qu’on suit une ligne, on arrive rapidement à ce qui est l’étoile polaire aujourd’hui, qui est l’étoile la plus brillante de la Petite Ourse. La distance jusqu’à l’étoile polaire est de deux fois la distance à l’œil nu des deux étoiles dont on part.
Si on reproduit le mouvement cinq fois, on tombe sur la constellation de Cassiopée, dont les cinq étoiles les plus brillantes forment une sorte de W.
Plusieurs autres étoiles peuvent être trouvées de la même manière. Si on prend le manche de la casserole, en s’éloignant de cette dernière, on tombe directement sur Arcturus, l’étoile la plus visible de la constellation du Bouvier. Si on continue, on a Spica, l’étoile la plus brillante de la constellation de la Vierge.
Si on se tourne maintenant vers les deux premières étoiles de la casserole, on tombe sur l’étoile Régulus, l’étoile la plus brillante de la constellation du Lion.
De manière notable, Arcturus, Spica et Régulus, on obtient un triangle, visible durant le printemps.
Si on reprend les deux premières étoiles de la casserole, mais dans l’autre sens, on a Deneb, l’étoile la plus brillant de la constellation du Cygne.
Tout cela montre très bien l’importance de la Grande Casserole. Et à chaque saison, la Grande Casserole est positionnée selon un axe différent, ce qui fait de la Grande Casserole l’expression même du mouvement dans les quatre directions, le symbole du mouvement du monde, propre à l’animisme polythéiste.