Le transfert de pouvoir à la Triple Union dans la ville de Shanghai devint un modèle pour tout le pays, où le principe fut appliqué zone par zone, les dernières étant celles du Sinkiang et du Tibet en septembre 1968 et annoncées dans un éditorial commun du Quotidien du Peuple et du Quotidien de l’armée.
Cela n’alla pas sans mal. Dans la ville de Wuhan, les gardes rouges et les rebelles, au nombre de 400 000, affrontait la faction du « Million de héros » qui profitait de l’appui du général Chen Zaidao, qui fit même arrêter Xie Fuzhi, un dirigeant révolutionnaire envoyé par Mao Zedong pour ordonner au général de cesser un tel soutien.
Dans le Hunan, il y a également la fraction ultra-gauchiste du Shengwulian (Comité d’Union des révolutionnaires prolétariens du Hunan), qui devient le centre névralgique de l’ultra-gauchisme dans tout le pays.
En fait, l’intervention massive des forces conservatrices par l’intermédiaire du « Million de héros » posait le problème de l’influence de celle-ci au sein de l’armée elle-même. Celle-ci, dans l’affaire de Wuhan, a fini par rejoindre la cause du pouvoir central, mais la fraction ultra-gauchiste a considéré, à partir de cette expérience, qu’il fallait rejeter totalement la Triple Union pour former directement une Commune populaire chinoise à l’échelle du pays tout entier.
C’est pourquoi, dès le 5 septembre 1967, le pouvoir central exige que les armes prises à l’armée – qui n’avait pas le droit d’intervenir militairement contre les masses – soient rendus. C’est par l’armée que le pouvoir central, sous l’égide du Groupe s’occupant de la Révolution Culturelle, empêche que les affrontements idéologiques, allant parfois jusqu’aux accrochages violents et des bagarres générales et plus rarement des opérations armées, n’aillent là où tant l’ultra-gauche que les droitistes veulent qu’ils aillent : la guerre civile.
La Grande Révolution Culturelle Prolétarienne était une révolution dans le domaine idéologique et culturel, et non pas une révolution visant à détruire l’Etat socialiste lui-même, disposant d’une base solide. La formule de Mao Zedong était la suivante :
« Il faut être fermement convaincu que l’immense majorité des masses est bonne et que les mauvais éléments sont en nombre infime ».
Par conséquent, étaient refusées tant les initiatives lancées par les forces conservatrices, comme le Liandong (Comité d’Action Unie) portée par des enfants de cadres défendant leurs privilèges et ce ouvertement au nom de leur ascendance et n’hésitant pas à mener des attaques armées, que les ultra-gauchistes généralisant l’esprit de fraction (un état d’esprit qui fascinera la fraction radicale de la petite-bourgeoisie française à la fin des années 1960, surtout à Paris).
Le pouvoir central pratique donc une politique des petits pas, visant à unifier au maximum les masses, ce qui aboutit finalement à la généralisation de la Triple Union dans tout le pays.
Ce n’est qu’au bout de ce processus que la Grande Révolution Culturelle Prolétarienne fut considérée comme un succès, à l’occasion de la XIIe session plénière du Comité Central, en octobre 1968.
Ce n’est de même qu’à partir de cette date que Liu Shaoqi fut publiquement condamné : auparavant, il était fait allusion à lui par des allusions, principalement « le Khrouchtchev chinois » ainsi que « le plus haut des responsables engagés dans la voie capitaliste ». Pareillement, Deng Xiao Ping était désigné par l’expression « un autre haut responsable engagé dans la voie capitaliste ».
Puis, le Parti Communiste de Chine tint son IXe congrès, en avril 1969, rétablissant la pensée Mao Zedong après que celle-ci eut été rejeté en 1956, lors du précèdent congrès.