JAMES William (1842-1910). Psychologue et philosophe idéaliste américain, fondateur du pragmatisme (V.), courant réactionnaire, variété de l’idéalisme subjectif. La philosophie de James marque nettement le tournant de l’idéologie bourgeoise de l’époque impérialiste vers l’irrationalisme, le rejet déclaré de la pensée logique. En lutte contre les idées matérialistes avancées, la philosophie réactionnaire prêche ouvertement la rupture avec la connaissance scientifique.

James est un ennemi du matérialisme et de la dialectique. Il fait passer l’inconsistance de la logique métaphysique pour l’inconsistance de la logique en général. A la critique dialectique de la métaphysique, il oppose l’alogisme, le renoncement à la logique. La thèse centrale de sa philosophie réactionnaire est la négation de la vérité objective, la lutte contre la théorie matérialiste du reflet (V. Théorie du reflet).

James conteste que la vérité soit un reflet, dans la conscience de la réalité objective: la vérité c’est ce qui est « commode », « utile », ce qui est conforme à des « buts pratiques », c’est-à-dire ce qui est commode et utile à la bourgeoisie, qui est conforme à ses intérêts de classe.

Le pragmatisme permet de justifier par des sophismes « philosophiques » n’importe quelle exigence idéologique des classes exploiteuses. Chez James la « vérité » devient finalement la « volonté de croire », c’est-à-dire l’obscurantisme non dissimulé.

La « théorie de l’empirisme radical », élaborée par James dans les dernières années de sa vie, n’est qu’une variante de l’idéalisme subjectif, laquelle se distingue peu du machisme (V.). A la différence du machisme, le pragmatisme met l’accent non sur la fonction contemplative mais sur la jonction active, et non contemplative, de la conscience. « La différence entre le machisme et le pragmatisme est du point de vue matérialiste… minime,… insignifiante » (Lénine : « Matérialisme et empiriocriticisme », M. 1952, p. 399).

James appelle « empirisme radical » un empirisme qui ne reconnaît aucune réalité en dehors de l’« expérience pure», c’est-à-dire en dehors de la conscience du sujet. La critique foudroyante de l’idéalisme subjectif, faite par Lénine dans « Matérialisme et empiriocriticisme » (V.), frappe également l’idéalisme de James.

Andréï Jdanov

Andréï Jdanov

JDANOV Andréï Alexandrovitch (1896-1948). Eminent militant du parti communiste et homme d’Etat soviétique, remarquable théoricien du marxisme, propagandiste de talent des idées marxistes-léninistes. Jdanov naquit à Marioupol dans la famille d’un inspecteur d’écoles populaires. Bolchevik dès 1915, il devient bientôt un militant du parti.

En 1917 il prend part à la Révolution d’Octobre dans l’Oural. Jdanov dirige l’instruction politique dans l’Armée rouge, travaille dans le parti et les Soviets dans l’Oural et la région de Tver.

En 1924-1934, il est secrétaire du comité du parti de la province de Nijni-Novgorod, puis du territoire de Gorki. En 1934-1944, après l’assassinat de Kirov, Jdanov est à la tête de l’organisation du parti de Leningrad. Sous sa direction, les communistes de Leningrad ont définitivement raison des traîtres trotskistes-zinoviévistes ; l’organisation du parti de Leningrad se groupe plus étroitement encore autour du Comité Central. Pendant la Grande guerre nationale le parti le charge d’organiser la défense de Leningrad.

Après le XVIIe congrès du parti, Jdanov a été élu secrétaire du Comité Central du Parti communiste (b) de l’U.R.S.S., membre suppléant et, après le XVIIIe congrès, membre du Bureau politique du Comité Central du P.C.(b) de l’U.R.S.S. Pendant les dernières années de sa vie, il a travaillé comme secrétaire du Comité Central.

Jdanov a été un grand militant du mouvement ouvrier international. Ses discours sur la politique intérieure et la situation internationale étaient largement connus des travailleurs du monde entier.

Jdanov a toujours attaché une très grande importance à la théorie du marxisme-léninisme, au rôle des idées du communisme dans l’évolution sociale.

Toujours soucieux de la propagande marxiste-léniniste, Jdanov voulait que la théorie marxiste-léniniste fût assimilée par les larges masses des membres du parti et du komsomol, par tous les bâtisseurs du socialisme.

Ennemi implacable du dogmatisme, il disait : « Notre connaissance doit être active. Il faut savoir manier à la perfection l’arme de la théorie révolutionnaire ; elle doit atteindre l’ennemi quel que soit le masque qu’il porte. » Jdanov était le dirigeant bolchevik qui sait allier la pratique quotidienne de l’édification du socialisme à un grand travail théorique.

Après la Grande guerre nationale, quand les problèmes du travail idéologique eurent pris une importance particulière, son talent de théoricien se révéla avec un éclat particulier. Jdanov a fait plusieurs rapports sur les décisions du Comité Central du parti concernant les questions idéologiques.

Prenant la parole au sujet des revues « Zvezda » et « Leningrad », puis à la conférence des représentants de la musique soviétique au Comité Central du parti et à la discussion sur les problèmes philosophiques, Jdanov établit pourquoi la littérature, l’art et la philosophie ne satisfaisaient pas aux exigences du parti et du peuple soviétique ; il indiqua les moyens de remédiera ce retard et les conditions d’un nouvel essor des sciences et de la culture en U.R.S.S.

Soulignant que la politique du parti communiste et les intérêts du peuple et de l’Etat soviétique doivent inspirer toute l’activité des milieux intellectuels, Jdanov précisa que l’essor culturel n’est possible que par une lutte implacable contre l’apolitisme, l’indigence idéologique, l’objectivisme bourgeois. Il montra que le patriotisme soviétique est une force motrice puissante pour le développement de la culture et de la vie de la société soviétique dans tous les domaines.

Jdanov souligna l’immense portée du patrimoine culturel mondial et de la culture progressiste russe pour la formation de la culture socialiste au pays des Soviets. Comme le léninisme avait hérité de toutes les meilleures traditions des démocrates révolutionnaires russes du XIXe siècle, la littérature et l’art soviétiques — disait Jdanov — sont et doivent être les continuateurs des traditions progressistes de la littérature démocratique révolutionnaire et de l’art classique russes : sens des grandes valeurs humaines, réalisme, caractère populaire.

L’intervention de Jdanov au cours de la discussion philosophique est un modèle de lutte pour une philosophie militante du parti, intransigeante envers l’idéologie bourgeoise. Jdanov a donné une profonde analyse critique du livre « Histoire de la philosophie en Europe occidentale », il a soumis à une critique serrée les erreurs et la pusillanimité de certains philosophes soviétiques dans les problèmes de philosophie, et formulé devant les philosophes soviétiques les tâches que leur assignait le parti communiste.

Ce discours est d’une grande importance pour le développement de l’histoire de la philosophie comme science. Jdanov a donné une définition précise de l’objet de l’histoire de la philosophie: histoire de la naissance et du développement de la conception du monde scientifique, matérialiste, histoire de la lutte du matérialisme contre l’idéalisme. Cette définition convie les philosophes soviétiques à analyser avec esprit critique les systèmes philosophiques du passé.

Jdanov a montré que la naissance du marxisme avait été une véritable révolution en philosophie, que Marx et Engels avaient créé une philosophie nouvelle, différente de toutes les philosophies antérieures, même progressives ; grâce au marxisme, la philosophie est devenue une « arme scientifique des masses prolétariennes en lutte pour leur libération du capitalisme ». De là le grand rôle du principe de l’esprit de parti pour la science historique et philosophique marxiste.

Ce principe, diamétralement opposé à l’objectivisme bourgeois, oblige les militants du front idéologique à soutenir une lutte implacable contre tous les ennemis du matérialisme, à les critiquer vigoureusement, à exposer les questions philosophiques dans un style combatif dont les œuvres de classiques du marxisme-léninisme offrent des exemples brillants.

Dans son intervention, Jdanov a caractérisé d’une manière incisive la philosophie bourgeoise réactionnaire de nos jours et il a convié les philosophes soviétiques à dénoncer hardiment les théories antiscientifiques des philosophes réactionnaires. Sa façon de caractériser la critique et l’autocritique (V.) comme une méthode nouvelle permettant de découvrir et d’éliminer les contradictions de la société soviétique a été d’une grande importance.

Jdanov a beaucoup fait pour la théorie marxiste-léniniste de la littérature et de l’art. Dès 1934, dans son discours au 1er congrès des écrivains de l’U.R.S.S., il a indiqué les tâches principales de la littérature soviétique et exposé les principes du réalisme socialiste qui est la méthode de la littérature, de l’art et de la critique littéraire soviétique.

Le réalisme socialiste exige la représentation artistique de la réalité dans son développement révolutionnaire, une représentation véridique et historiquement concrète et capable d’éduquer les travailleurs dans l’esprit du socialisme. Dans son rapport au sujet des revues « Zvezda » et « Leningrad » et dans son discours à la conférence des représentants de la musique soviétique au Comité Central du P.C.(b) de l’U.R.S.S., Jdanov a mis en lumière les questions essentielles de l’esthétique du réalisme socialiste.

Tout en luttant pour un profond contenu idéologique delà littérature et de l’art, Jdanov a souligné fortement l’importance de la forme. Le peuple soviétique, a-t-il dit, a maintenant un goût et des exigences plus élevés : il demande des œuvres inspirées de grandes idées mais aussi possédant une grande valeur artistique. Les discours de Jdanov ont joué un rôle important dans la lutte du parti communiste pour élever le niveau du travail idéologique.

JEUNES-HEGELIENS. Idéologues du libéralisme allemand des années 30 et 40 du XIXe siècle, représentants de l’aile gauche, composée de bourgeois radicaux, de l’école de Hegel (Bauer. Strauss, Ruge, Stirner). A la différence des vieux-hégéliens (partisans du système réactionnaire de Hegel dans son ensemble, en particulier de sa philosophie de la religion), les jeunes-hégéliens substituaient à l’« Idée absolue » (Dieu) la « conscience de soi », présentée comme le puissant moteur de l’histoire et incarnée par l’Etat et les intellectuels.

Le peuple n’est qu’une « masse à l’esprit non critique », dépourvue de la « conscience de soi ». Ainsi, Bauer affirmait que c’est précisément dans la masse, et non ailleurs, qu’il faut chercher l’ennemi réel de l’esprit. Les jeunes-hégéliens condamnaient la Révolution française de 1789, et lui opposaient les réformes bourgeoises, opérées sur l’initiative de l’Etat «raisonnable» (exploiteur).

Pour ce qui est de la transformation bourgeoise de l’Allemagne, ils plaçaient leurs espérances dans le roi de Prusse qui personnifiait pour eux l’idéal platonicien du philosophe assis sur le trône. Critiquant le christianisme orthodoxal, contestant l’authenticité de l’Evangile, les jeunes-hégéliens identifiaient la conscience religieuse à la conscience populaire. L’obstacle principal au progrès de l’Allemagne ce n’est pas la domination des grandspropriétaires fonciers et l’absolutisme, mais la religion qui déforme la nature soi-disant « raisonnable » de l’Etat menacé par l’avènement de la masse « déraisonnable ».

Prêchant la séparation de l’Eglise et de l’Etat, cherchant à « faire entendre raison » à la monarchie féodale, les jeunes-hégéliens fondaient leurs espoirs sur la « puissance » de l’Etat exploiteur et se mettaient à plat ventre devant la monarchie prussienne. Persuadés que la métamorphose de la conscience en « conscience de soi » est la condition de la transformation sociale, les jeunes-hégéliens prônaient en fait, par l’interprétation « raisonnable » du régime existant alors en Allemagne, la soumission à ce régime.

Ils n’avaient aucune idée de la lutte des classes, des lois objectives du développement social, du rôle des rapports économiques, de la production matérielle dans l’évolution sociale. Leurs exhortations s’adressaient aux classes exploiteuses. Une des particularités du jeune-hégélianisme était sa phraséologie révolutionnaire, laquelle se réduisait à des menaces libérales à l’adresse des classes féodales dominantes qui résistaient au développement capitaliste de l’Allemagne.

L’idéologie des jeunes-hégéliens reflétait la couardise de la bourgeoisie allemande, son impuissance à lutter contre le régime féodal.

Au début de leur activité, Marx et Engels adhérèrent au groupe de jeunes-hégéliens, mais déjà à cette époque ils s’en distinguaient par leurs convictions de démocrates révolutionnaires. En 1843-1846 ils critiquèrent impitoyablement l’idéalisme et les sermons libéraux des jeunes-hégéliens.

Ils montrèrent que ces derniers, « en dépit de leur phraséologie soi-disant propre à « bouleverser le monde », étaient d’incorrigibles conservateurs », qu’ils combattaient non point le monde réel, le monde existant, mais seulement les phrases de ce monde. « Les seuls résultats auxquels pouvait arriver cette critique philosophique, c’étaient quelques éclaircissements, et encore incomplets, sur l’histoire religieuse du christianisme… » (Marx/Engels : Gesamtausgabe, Erste Abteilung, Bd. 5, M.-L. 1933, S. 10).

JUGEMENT. Une des formes essentielles de la pensée. Le jugement de l’acte de cognition qui, au moyen de l’affirmation ou de la négation, révèle la présence ou l’absence de tel ou tel caractère dans un objet ou dans un phénomène. Tout savoir est d’abord un jugement, car seuls les jugements affirment ou nient quelque chose.

Dès que nous prenons conscience de nos perceptions, nous formulons des jugements. Un jugement comprend généralement un sujet, un attribut et enfin la copule qui les réunit dans un seul acte. Ainsi, dans le jugement « Jean est homme » Jean est le sujet, homme l’attribut et est la copule.

Jean est l’élément particulier, homme, l’élément général. Le rapprochement du particulier et du général nous permet de juger correctement d’un objet. Dans la nature, le particulier et le général constituent une unité.

En opposant le sujet à l’attribut, en vue de la connaissance (« Jean est homme »), le jugement semble rompre cette unité, mais pour la rétablir aussitôt dans l’acte du jugement en reflétant la réalité même, l’unité du particulier et du général. La copule est un élément très important du jugement.

La philosophie marxiste-léniniste a élaboré une théorie scientifique du jugement. La logique métaphysique considérait le jugement comme une simple réunion de concepts, bien qu’Aristote (V.) l’interprétât déjà en matérialiste : « Celui-là a raison qui prend pour désuni ce qui est désuni, et pour uni ce qui est uni ; celui-là a tort dont l’opinion va à rencontre des choses. »

Tout jugement est vrai ou faux. Les jugements vrais reflètent fidèlement la réalité objective, les jugements faux ne concordent pas avec elle. Les jugements peuvent être affirmatifs ou négatifs ; les premiers unissent dans la pensée ce qui est uni dans la réalité, les seconds séparent ce qui est séparé dans la nature.

Le jugement ne se réduit jamais à la formule métaphysique A est A. Il élargit constamment la connaissance. « Le fait que l’identité contient en soi la différence est énoncé dans toute proposition dont le prédicat est nécessairement différent du sujet : le lis est une plante, la rose est rouge ; ici, soit dans le sujet, soit dans le prédicat, il y a quelque chose qui n’est pas inclus soit dans le sujet, soit dans le prédicat » (Engels : « Dialectique de la nature », P. 1952, pp. 216-217).

Dans la « Dialectique de la nature » (V.) Engels donne une remarquable classification dialectique des jugements qui se succèdent suivant un ordre ascendant. Il commence par les jugements singuliers (« le frottement est une source de chaleur »). Puis viennent les jugements particuliers (« tout mouvement mécanique est capable de se transformer en chaleur par l’intermédiaire du frottement ») qui montrent qu’une forme particulière de mouvement, la forme mécanique, peut, dans certaines circonstances, se transformer en une autre forme de mouvement, la chaleur.

Le troisième jugement, dit universel, est d’un ordre supérieur. (« Toute forme du mouvement peut et doit nécessairement, dans des conditions déterminées pour chaque cas, se convertir directement ou indirectement en toute autre forme du mouvement. »)

Tout jugement s’exprime par une proposition. L’étude du jugement doit tenir compte de l’analyse des formes de la proposition, à la lumière de la théorie marxiste de l’unité de la langue et de la pensée.


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