Programme d’action du nouveau gouvernement tchécoslovaque, 10 mars 1948
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Mesdames, Messieurs, Les membres du gouvernement pour les partis socialiste national, populiste et démocrate slovaque ont démissionné le 20 février 1948. Par ce fait fut ouverte la crise gouvernementale.

Le 25 février 1948 le président de la République a accepté la démission des dits membres du gouvernement et a approuvé nos propositions relatives au complètement et à la reconstruction du gouvernement. Par là la crise gouvernementale était dénouée.

Le gouvernement complété et reconstruit se présente aujourd’hui à l’Assemblée Nationale Constituante avec l’exposé de son programme. Par l’approbation de ce’ programme du gouvernement au sein de l’Assemblée Nationale Constituante la solution de la crise gouvernementale sera dénouée également selon la voie parlementaire.

Avant de parler du programme gouvernemental lui-même, je veux dire quelques paroles sur la nature essentielle de la crise que nous avons vécue ces derniers jours. Il faut connaître les racines de la crise ainsi que les buts que suivaient les initiateurs de la crise — il faut que nous les connaissions pour pouvoir éviter la prochaine fois de semblables événements ou pour les empêcher à temps.

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Pour cette raison je ne vais pas m’occuper des phénomènes extérieurs de la crise et je vais essayer de pénétrer à la base-même de celle-ci.

Dans la République d’avant Munich une petite poignée de magnats de la grande finance, de la grande industrie et des grosses propriétés foncières gouverna et décida chez nous. Tout le monde le sait à présent, chaque Tchèque et chaque Slovaque.

Dans la Constitution il était inscrit, bien entendu, que le peuple était la source de tout pouvoir — mais dans la réalité le peuple éprouvait lui-même à chaque pas que la source de tout pouvoir était le sac d’argent. En d’autres termes : sous la mantille d’une démocratie parlementaire formelle il y avait dans la République d’avant Munich une hégémonie des grands magnats que étaient puissants grâce à leurs biens.

Cette couche de grands et puissants magnats justifiait son hégémonie entre autres également par la prétention qu’elle seule était capable de diriger notre économie nationale. Les résultats de leur régime économique — des crises économiques périodiques, le chômage constant, d’une part la misère et d’autre part l’accumulation de richesses — ont prouvé que les magnats du grand capital n’étaient pas capables de diriger l’économie en faveur de tous.

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Les grands et puissants dirigeants de la République d’avant Munich ont affirmé encore que seuls ils étaient appelés à diriger et administrer d’une manière juste les affaires nationales des Tchèques et des Slovaques ainsi que les affaires d’État de la Tchécoslovaquie. Qu’uniquement sous leur direction nos nations pourraient garantir leur liberté nationale et leur indépendance. Cependant les résultats de l’hégémonie de la grande bourgeoisie étaient justement dans les affaires vitales de la nation et de l’État les plus tragiques, les plus affreux et les plus désastreux.

Pour maintenir son régime de classe et ses privilèges la bourgeoisie tchèque et slovaque s’associa d’abord aux ennemis intérieurs de la République, aux fascistes allemands et hongrois.

Pour les mêmes raisons de classe égoïstes la grande bourgeoisie tchèque et slovaque a capitulé à l’époque de Munich et a refusé l’aide militaire, offerte à la Tchécoslovaquie, par l’Union soviétique.

Et à nouveau dans l’intérêt du sac d’argent et des biens, les magnats tchèques et slovaques ont sacrifié la cause nationale, le 15 mars 1939, ont accepté le protectorat honteux et le détachement de la Slovaquie des pays tchèques et se sont mis complètement et ouvertement au service d’Hitler bien qu’ils aient su que, la victoire remportée, l’Allemagne hitlérienne était décidée à disperser les Tchèques et les Slovaques et à ruiner leur nation.

Ainsi la grande bourgeoisie tchèque et slovaque ne s’est pas montrée en bon administrateur, mais a misérablement trahi notre cause nationale. Ainsi à l’époque des épreuves historiques, les dirigeants tchèques et slovaques avaient été pesés — et s’étaient montrés trop légers.

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La connaissance de cette réalité pénétra dans la conscience de la grande partie du peuple tchèque et slovaque déjà à l’époque de l’occupation allemande. Cela s’effectuait d’autant plus vite que tous voyaient : pendant que le peuple s’opposait d’une manière active et passive aux occupants, que les dirigeants collaboraient avec ceux-ci et tiraient leur profit de la guerre allemande et de la misère de la nation.

Pour cette raison il était de plus en plus évident qu’après avoir chassé les occupants allemands, il serait impossible de retourner aux conditions d’avant Munich.

Il devenait de plus en plus évident qu’après les Allemands leurs aides devaient être élimines également du pouvoir politique, et qu’il faudrait saisir aussi la hase de leur pouvoir, cela vent dire les grandes propriétés et les biens accumulés par la longue exploitation du peuple.

Il était donc évident que dans la République libérée le peuple devrait avoir le pouvoir décisif. Non pas sur le papier, mais dans la réalité. Ainsi après la libération de la Tchécoslovaquie par la glorieuse armée soviétique nous avons nationalisé les finances et la grande industrie lourde, nous avons transféré les Allemands et nous avons remis les terres, les banques et les usines, qui leur appartenaient auparavant, non pas aux mains des magnats tchèques et slovaques, mais dans celles des agriculteurs, des ouvriers et des artisans tchèques et slovaques, aux mains de la nation, nous avons éliminé le système policier et bureaucratique et par l’institution des comités nationaux nous avons rendu populaire l’administration publique, nous n’avons pas permis la rénovation des partis politiques réactionnaires d’avant Munich qui avaient été les instruments politiques directs de la grande bourgeoisie tchèque et slovaque, nous avons créé le gouvernement du Front National qui devait être l’organe exécutif de l’union des ouvriers, des agriculteurs, des artisans et des intellectuels.

Par ces faits la classe sociale qui avait régné auparavant, était vraiment éliminée du pouvoir politique décisif et touchée à son point le plus vulnérable dans le domaine de ses biens. Et dans la nouvelle République populaire et démocratique on commença réaliser le principe que le peuple était la source de tout le pouvoir.

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Cependant le peuple fut généreux à l’égard de ses anciens tenants du pouvoir. Il ne nationalisa leurs biens que partiellement et il garantit une indemnité pour ces biens nationalisés. Il laissa en des mains privées beaucoup d’entreprises industrielles et autres et la nationalisation n’intervint point dans les domaines du commerce intérieur en gros ainsi que dans celui de l’exportation et de l’importation.

Il resta donc aux capitalistes la possibilité de gagner, de commercer et d’accumuler des profits. Et les capitalistes en profitèrent pleinement. Ils se jetèrent, en premier lieu, sur des branches qui étaient au point de vue du profit les plus lucratives et dans cette ruée vers le profit ils ne se souciaient guère de la loi, de la moralité et de la pureté de leurs mains.

Le peuple voit ces faits très clairement de la manière suivante : à l’époque de la réforme monétaire, à la fin de 1945, tout le monde commença formellement avec 500 couronnes. A présent beaucoup de capitalistes possèdent des millions et des millions au comptant. Il est évident qu’ils ne pouvaient pas prendre possession de cet argent par leur propre travail honnête, mais par l’exploitation malhonnête et par le marché noir.

Le résultat de cette « évolution » est donc que la base financière de la bourgeoisie, diminuée et affaiblie par la nationalisation, commença de nouveau à s’élargir et à se renforcer.

Mais ce n’était pas la seule conséquence. Nous avons laissé, après la libération, aux anciens magnats et dirigeants tous les droits civiques et politiques. Nous étions témoins que le jugement des traîtres et des collaborateurs tournait en farce ridicule et blessait le sentiment de la justice et de la morale de notre peuple. Nous étions aussi témoins que les traîtres et les collaborateurs étaient libérés tout d’un coup et que les enquêtes menées contre eux étaient arrêtés, que seulement un nombre insignifiant était puni et le plus souvent avec beaucoup d’indulgence.

Il n’est pas étonnant que très vite ils aient repris de l’audace. Ils ont profité pleinement ou plutôt abusé de leurs droits politiques qui leur avaient été généreusement laissés, lls sont entrés eux-mêmes ou ont envoyé leurs agents dans les partis politiques légaux et dans les organisations et institutions légales.

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Ils ont délégué aux postes dirigeants de ces partis et organisations leurs gens ou se sont imposés eux-mêmes, et ils dirigeaient leurs travaux en coulisse, de cercles secrets et illégaux. A voir la conduite de quelques partis de l’ancien Front National au sein du gouvernement, au parlement, dans les comités nationaux, dans les organisations syndicales et autres, dans la presse, aux assemblées et en général dans la vie publique — à observer cela, on pouvait suivre dans ces partis les progrès de l’infection réactionnaire et comment finalement ils devenaient complètement les instruments de la réaction.

De cette « évolution » ressort le fait qu’après la révolution de Mai 1945, la grande bourgeoisie, éliminée du pouvoir politique, s’est renforcée dans le domaine politique, que son influence a atteint le gouvernement et que cette influence ne pouvait être autre que réactionnaire.

En Mai 1945 nous avons obligé la réaction à passer la porte des délibérations gouvernementales, en février 1948 il était clair qu’elle était revenue par la fenêtre.

Voilà donc l’arrière-plan économique, de classe et des positions du pouvoir politique de la crise gouvernementale de février.

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La réaction qui avait profité de ses positions économiques pour l’acquisition de nouvelles richesses et qui s’était acquis plusieurs partis de l’ancien Front National dans une mesure telle qu’elle pénétra grâce à leur aide directement dans le gouvernement — cette réaction décida à porter un coup général contre le régime populaire et démocratique.

Le but immédiat de la réaction était de changer dans le gouvernement et dans l’État entier la proportion des forces avant les élections parce qu’elle avait peur d’une défaite au cours des élections.

Le but de la réaction était de renverser complètement le régime populaire et démocratique, de prendre au peuple tout ce que la libération et la Révolution nationale lui avaient apporté, de rendre aux anciens propriétaires tout ce qui était nationalisé et d’imposer de nouveau l’hégémonie illimitée des grands et puissants magnats. Dans le domaine de la politique étrangère, la réaction s’efforça de nous éloigner de l’Union soviétique et des autres alliés et de rapprocher de nouveau la République de ceux qui avaient cause Munich.

En bref, sous une forme ou sous une autre devait se répéter l’année 1920 qui signifia la fin des conquêtes que notre peuple avait acquises après la liquidation de la Monarchie austro-hongroise après la première guerre mondiale.

Que personne ne se trompe si les initiateurs réactionnaires de la crise gouvernementale n’ont pas parle ouvertement de ces. buts finaux. Que personne ne se laisse tromper si ces gens de temps en temps ont même répété que, par exemple, ils n’avaient pas l’intention d’abolir la nationalisation, que l’alliance avec l’Union soviétique était en dehors de toute discussion et ainsi de suite. C’est le procédé de chaque contre-révolution.

La contre-révolution ne parle point de ses buts finaux et ne révèle ses cartes que progressivement.

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La contre-révolution veut toujours, en premier lieu, le renversement des forces du pouvoir en sa faveur, il ne s’agit pour elle que du pouvoir. S’emparer — cela signifie une victoire totale.

Par-là elle retrouve la liberté de mener jusqu’à leur terme tous ses plans contre-révolutionnaires. Il en était de même dans le cas tchécoslovaque. D’ailleurs le prétexte lui-même, lequel les réactionnaires avaient provoqué la crise gouvernementale, jette une lueur claire sur leurs buts visant au pouvoir et qui ont une grande envergure.

L’aspect extérieur faisait entrevoir le déplacement de huit officiers du Corps de la Sûreté Nationale. Ces messieurs faisaient leurs comptes de cette façon-ci : placer à nouveau le Corps de la Sûreté Nationale sous le contrôle des réactionnaires et sous le commandement réactionnaire, et par conséquent avoir la possibilité d’utiliser ce corps contre le peuple — comme il en était à l’époque d’avant Munich — cela signifie avoir en mains tous les atouts et avoir la possibilité de jouer avec le peuple d’une manière analogue à celle qu’avait employée en 1920 le bien connu Jan Cerny, l’ami intime de Heinold.

Bref, par leurs attaques mal conçues, dirigées contre le Corps de la Sûreté Nationale, ces messieurs avaient révélé déjà d’avance une partie de leurs plans réactionnaires. D’ailleurs c’était justement notre peuple qui ne se laissait pas tromper, par aucune manœuvre, détour ou prétexte de la réaction.

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Le peuple devina ses intentions et buts cachés, non seulement au moment où la réaction mit tout sur une seule carte et provoqua la crise gouvernementale, mais bien avant. Le peuple avait déjà plus qu’assez de tout ce que la réaction tramait depuis de longs mois déjà.

La crise gouvernementale, provoquée par la réaction, n’était qu’une goutte qui faisait déborder la coupe déjà pleine de la patience du peuple. Et ce ne furent pas seulement nos travailleurs des villes, mais en même temps nos travailleurs des campagnes.

Le peuple se rendit compte, dans son immense majorité, qu’il ne s’agissait pas dans le gouvernement de quelques petits conflits de coalition dans le but de conquérir des postes de ministres et des avantages matériels, de conflits qui étaient si typiques dans les gouvernements de coalition d’avant Munich.

Le peuple voyait clairement, dans sa grande majorité, qu’il s’agissait ici d’un dangereux essai de renverser le régime populaire et démocratique et de ruiner tout ce que la libération avait apporté à notre peuple.

Pour cette raison se manifesta cette tempête élémentaire de la colère et de l’opposition populaires qui du 20 au 25 février 1948 traversa toutes la République de la Forêt de Bohême jusqu’aux Tatras et qui dispersa les sombres plans de la réaction comme un château de cartes.

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Je n’exagère pas, si je dis, que nos masses laborieuses des villes et de la campagne ont passé dans ces jours critiques un nouvel examen de maturité politique et qu’elles se sont avérées magnifiquement, même à merveille, dans cet examen.

J’estime de mon devoir d’exprimer également de cette tribune de l’Assemblée Nationale Constituante ma grande admiration et mes remerciements à nos travailleurs des villes et de la campagne et à leurs véritables représentants politiques, pour leur attitude décidée et vraiment digne d’hommes d’État au cours de cette crise. Vous, les millions et millions de simples citoyens dans les villes et dans les villages, vous avez sauvé notre pays d’une nouvelle défaite auprès de Lipany et par là également d’une nouvelle bataille de la Montagne Blanche.

L’unité actuelle des magnats fut brisée et ce sont maintenant les successeurs des partisans du maître Jean Hus, de Jean de Trocnov, de Procope le Chauve et de Rohac de Duba qui assumeront la parole décisive dans toutes les questions nationales et relatives à l’État.

C’est ainsi qu’à la suite de l’attitude trop voyante et impertinente de la contre-révolution, grâce à la promptitude et à la vigilance de notre peuple — et particulièrement grâce à la vigilance et à la clairvoyance de son plus grand parti, le parti Communiste de Tchécoslovaquie, — le putsch contre-révolutionnaire de la réaction fut étouffé dans son germe.

Au moment où l’on nous a communiqué la démission des membres du gouvernement, représentant les dits partis, nous avons déclaré clairement et sans équivoque à l’adresse die tous : premièrement le retour des membres du gouvernement, qui avaient démissionné, était impossible, deuxièmement il était impossible de négocier dans le but de compléter et de refaire le gouvernement avec les cliques, qui se représentaient comme les dirigeants légitimes des partis de la confiance desquels elles avaient si grossièrement abusé.

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Nous avons dit troisièmement que nous allons négocier pour compléter et reconstituer le gouvernement avec les éléments des partis de l’ancien Front National qui sont restés fidèles à l’esprit et au programme originaux du Front National.

Et finalement nous avons demandé que le gouvernement comprenne également les représentants d’une organisation aussi importante que Mouvement Syndical Révolutionnaire.

Et c’est justement sur cette base que le gouvernement a été complété et reconstitué. Le gouvernement, complété et reconstitué, est le gouvernement du Front National renouvelé. Les représentants de tous les partis politiques renouvelés ainsi que ceux de notre plus grande organisation, du Mouvement Syndical Révolutionnaire, participent directement au gouvernement.

Dans ce sens le gouvernement du Front National renouvelé est l’organe exécutif de l’union des ouvriers, des agriculteurs, des artisans et des intellectuels. Et par là nous retournons au sens et à l’esprit originaux du Front National tels que ceux-ci s’étaient formés dans la Résistance, lors du Soulèvement slovaque et de la Révolution de Prague et dans les jours de la glorieuse libération.

Le gouvernement a été complété et reconstitué de manière strictement constitutionnelle, démocratique et parlementaire. Quiconque a des yeux pour voir et des oreilles pour entendre doit reconnaître ces faits. La Constitution et l’usage exigent que le président de la République nomme sur la proposition du président du Conseil les nouveaux membres du gouvernement pour remplacer ceux qui ont démissionné. Ces conditions ont été remplies.

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La Constitution exige encore que chaque gouvernement, par suite également le gouvernement actuel, jouisse de la confiance du parlement. Le gouvernement actuel du Front National renouvelé sollicite maintenant cette confiance de l’Assemblée Nationale Constituante. C’est à vous d’accorder ou de refuser cette confiance au gouvernement. Je pense que la plus grande partie des membres de ce corps illustre accordera sa confiance au gouvernement actuel.

Il l’accordera d’autant plus qu’il va juger d’une manière équitable son programme. Mais il paraît toutefois nécessaire d’adresser quelques paroles aux « défenseurs » actuels de la constitutionnalité tchécoslovaque dans notre pays et à l’étranger. Ces gens-là se lamentent à présent sous prétexte que la Constitution tchécoslovaque a été violée. Mais où étaient tous ces gens-là, lorsqu’en 1939 se déroula la tragédie de Munich ?

Qu’est-ce que signifia Munich du point de vue de la constitutionnalité tchécoslovaque ? Munich signifia le mépris le plus brutal de la Constitution tchécoslovaque.

Et à l’époque de Munich les éléments étrangers ainsi que ceux du pays avaient foulé la Constitution tchécoslovaque sans aucun égard. La Constitution tchécoslovaque formule clairement que les changements territoriaux dans la République ne peuvent être effectués qu’avec l’accord expressif de l’Assemblée Nationale. Les hommes de Munich étrangers et tchécoslovaques le savaient bien.

Et qui donc demanda à l’Assemblée Nationale Constituante ce qu’elle pensait de la décision dictée à Munich ? Personne ! L’écartèlement, la mutilation et la paralysie de la République étaient effectués par les magnats étrangers et indigènes sans aucun égard envers la Constitution tchécoslovaque.

Nous voudrions conseiller à ces gens-là ou à leurs successeurs lorsqu’ils se plaignent aujourd’hui de la prétendue violation de la Constitution : dans la maison du pendu ne parle pas de la corde !

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Je passe maintenant aux questions du programme gouvernemental du Front National renouvelé. Vu le fait que la période de l’Assemblée Nationale Constituante se rapproche de sa fin, le programme du gouvernement est lié également à cette limite.

Il est possible de répartir le programme gouvernemental en trois points : le gouvernement veut premièrement réaliser les parties les plus importantes du programme gouvernemental de juillet 1946 qui n’étaient pas encore remplies jusqu’à présent.

Le gouvernement veut deuxièmement réaliser les revendications qui étaient formulées par le Congrès national des Conseils d’entreprise et des organisations syndicales le 22 février 1948 ainsi que par le Congrès des Commissions Agricoles les 28 et 29 février 1948.

Le gouvernement doit réaliser troisièmement les revendications qui découlent de la liquidation du putsch réactionnaire dirigé contre le gouvernement en février 1948. Si nous jugeons objectivement l’évolution de notre économie depuis les élections en 1946, il faut se rendre compte de sa tendance progressive.

Lors de la mise au point du plan économique biennal nos adversaires prédisaient son effondrement. Il n’en était rien. Le plan économique fut accompli au cours de la première année du plan biennal à 100,9 %, en janvier 1948 le plan fut accompli à 103,6 % et les chiffres préalables pour le mois de février 1948 montrent qu’au cours de ce mois de la crise gouvernementale le plan ne fut pas seul : ruent accompli mais également dépassé.

Nous avons terminé, dans la plus grande partie, le repeuplement de nos régions frontières et nous avons assuré ainsi la possibilité d’une nouvelle existence à des centaines de milliers de Tchèques et de Slovaques, d’ouvriers, d’agriculteurs, d’artisans et d’intellectuels.

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Nous avons abordé la révision de la première réforme agraire et nous présentons ainsi aux agriculteurs, qui travaillent eux-mêmes sur le sol, des centaines de milliers d’hectares de terres.

Nous avons maintenu, en général, l’équilibre entre les prix et les salaires, nous avons stabilisé notre monnaie et nous avons évité l’inflation. En 1947 notre commerce extérieur a augmenté dans une mesure considérable et son bilan était équilibré. Dans le domaine de la politique sociale nous avons, au cours des 18 derniers mois, réalisé en faveur du peuple plus qu’au cours des 20 années qui ont précédé la guerre.

En un mot, la production et le commerce intérieur et extérieur ont augmenté et par là — bien que lentement — a augmenté également le niveau de vie de notre peuple.

La sécheresse de l’été passé et la mauvaise récolte qui en découle, constituent une grave atteinte à notre économie. Nous étions obligés de diminuer, par suite de la mauvaise récolte, les rations de quelques denrées, nous sommes obligés d’importer une plus grande quantité de diverses denrées de l’étranger. Je considère comme mon devoir d’exprimer de nouveau notre reconnaissance à l’Union soviétique et, en particulier, au Généralissime Staline, pour l’aide qu’il nous a fournie par la livraison extraordinaire de 600 000 tonnes de blé et de fourrage.

Mais pour pouvoir assurer le ravitaillement, par un accroissement des importations, il nous faut augmenter nos exportations de produits industriels, entre autres de produits d’une large consommation, dont le marché intérieur se voit par conséquent diminué. Nous avons compensé, au moins partiellement, les dommages, causés aux agriculteurs par la sécheresse, ce qu’on n’avait encore jamais fait. Nous avons donné aux agriculteurs des allocations extraordinaires pour leurs produits agricoles et aux agriculteurs les plus endommagés nous avons fourni une aide financière directe. Bref, même une catastrophe telle que la sécheresse de l’été passé, n’a pas su déséquilibrer notre économie nationale.

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Néanmoins nous aurions pu être beaucoup plus avancés dans la consolidation et l’épanouissement de notre économie et dans l’augmentation progressive du niveau de vie du peuple. Nous aurions pu surmonter plus vite et avec : moins de difficultés la mauvaise récolte causée par la sécheresse.

L’activité freinante de la réaction au gouvernement et dans tout l’organisme économique et administratif plaçait des obstacles sur notre route et rendit plus difficile notre marche en avant. Je ne veux pas vous fatiguer avec un long compte rendu de tout ce que ces messieurs ont à cet égard sur la conscience.

Il suffit que je souligne qu’une partie considérable du programme gouvernemental, approuvé par cette Assemblée Nationale Constituante en juillet 1946, attend encore sa réalisation. Mais je suis pleinement convaincu que nous allons atteindre au moins dans les secteurs principaux les buts que nous avons manqués jusqu’à présent.

Quels points du programme devons-nous donc accomplir au cours de la période qui reste à l’Assemblée Nationale Constituante avant les élections, de ce programme qui avait été approuvé par ce corps illustre en 1946 et qui n’est pas encore réalisé ? Je vais mentionner seulement les choses principales et les plus importantes.

Nous pensons qu’il est indispensable de donner à la République une Constitution nouvelle. Je souligne une Constitution nouvelle, dans l’esprit de la proclamation de programme gouvernemental du 8 juillet 1946. Une Constitution qui va fixer toutes les conquêtes du peuple après la libération et qui en même temps ne constituera pas un frein pour notr future marche en avant, sur la voie vers le socialisme.

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Quant à l’expression constitutionnelle des relations de nos peuples fraternels, tchèque et slovaque, nous insistons sur le programme gouvernemental de Kosice, sur la Magna Charta slovaque, en tenant compte des expériences pratiques acquises depuis la libération.

Quant à la propriété privée de nos masses laborieuses dans les villes et à la campagne, nous insistons sur le fait que la Constitution doit garantir aux agriculteurs la propriété privée du sol jusqu’à la contenance de 50 ha, aux petits et moyens entrepreneurs dans les autres secteurs, la Constitution garantira la propriété privée des entreprises employant jusqu’à 50 travailleurs, excepté les branches dont la nationalisation complète avait déjà été ou sera encore réalisée par une loi spéciale de la nouvelle Constitution.

Outre la grande oeuvre de la nouvelle Constitution nous ferons entrer en vigueur, encore avant les élections, la loi sur l’assurance nationale, unique dans le monde entier. L’assurance nationale du revenu garantit toutes les couches travailleuses de la nation et leurs familles — ouvriers, agriculteurs, artisans et intellectuels — pour le cas d’invalidité et de vieillesse ainsi que pour le cas du décès du père nourricier de la famille. Les allocations de vieillesse seront augmentées.

Les agriculteurs et les artisans, faibles au point de vue social ou mutilés, recevront un revenu social. L’assurance nationale de maladie égalisera les différences actuelles entre les revendications des ouvriers et apportera d’autres améliorations considérables et sera élargie également aux travailleurs indépendants – aux agriculteurs, artisans et professions libres.

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Dans le domaine des terres, nous avons l’intention de mettre sur pied le remaniement de la loi sur la révision de la première réforme agraire, notamment afin que les terres des propriétaires des domaines résiduels puissent être, en cas de nécessité, attribuées aux agriculteurs dans une plus grande mesure que jusqu’à présent.

Simultanément il est nécessaire de faire entrer en vigueur la loi sur l’aménagement durable de la propriété des terres. Cette loi doit rendre possible l’achat des terres comprenant plus de 50 ha, et qui se trouvent dans des mains privées, et la distribution de ces terres aux agriculteurs qui travaillent sur leurs terres.

Une autre aide à nos agriculteurs sera apportée par la nouvelle modification de l’impôt agricole qui libérera totalement des impôts une partie des petits agriculteurs et qui allégera pour l’autre partie des petits et moyens cultivateurs le fardeau des impôts.

Un autre acte important en faveur des cultivateurs sera la loi sur le crédit agricole, qui permettra de recevoir un crédit à bon marché sans conditions d’usure. Nous voulons introduire pour nos artisans un impôt artisanal unifié qui d’une part diminuera ce fardeau, d’autre part simplifiera toute la manipulation fiscale.

Et comme pour les agriculteurs, nous voulons réaliser pour nos artisans une loi sur le crédit artisanal qui une fois pour toutes libérerait les artisans des usuriers. Dans le domaine de l’éducation nationale nous voulons mettre sur pied, encore au cours de cette période, la loi scolaire, depuis longtemps attendue, qui posera les bases de l’école unifiée.

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Je répète que je ne parle dans cette proclamation que des points principaux et les plus importants, à l’accomplissement desquels nous nous sommes engagés par le programme gouvernemental de juillet 1946 et dont la réalisation n’avait pas encore été effectuée. Outre les questions mentionnées, il y en a toute une série d’autres que nous allons nous efforcer de résoudre.

Quelle tâche découle pour le gouvernement et l’Assemblée Nationale Constituante des résolutions prises par les deux Congrès mémorables de février : le Congrès des Conseils d’entreprise et des organisations syndicales et le Congrès des Commissions Agricoles ?

Quant aux questions agricoles, ces résolutions s’accordent en général avec le programme antérieur du gouvernement. Quant aux questions industrielles, du commerce intérieur en gros ainsi que de l’importation et de l’exportation, ce sont des questions nouvelles et le gouvernement ainsi que l’Assemblée Nationale Constituante doit formuler son point de vue.

Je pense que ce point de vue peut être seulement positif. Sans vouloir entrer dans les détails, je veux souligner que jusqu’aux élections doivent être encore réalisées :

– L’organisation nationale de tout le commerce intérieur en gros. Organisation nationale de l’importation et de l’exportation.

– La nationalisation des entreprises capitalistes dans tous les secteurs qui comprennent plus de 50 employés, certains secteurs auxquels le public porte un intérêt considérable e doivent être nationalisés complètement.

Cette mesure est justifiée notamment par des considérations concernant l’économie nationale. Par là des valeurs de dizaines de milliards qui jusqu’à présent ont été soustraites au revenu national et employés abusivement très souvent à des fins anti-nationales, doivent être conservées pour la nation, pour la collectivité.

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Cette mesure est indispensable en même temps pour des raisons concernant la politique d’État. Les secteurs qui seront encore touchés par la nationalisation ou éventuellement par l’étatisation étaient et sont le foyer de conspiration dirigée contre l’Etat et ce sont eux qui sont à l’origine de la crise gouvernementale dénouée, de février.

Et il faut arracher ces racines de conspiration dirigées contre le peuple et contre l’État. Et elles seront arrachées !

Finalement il nous faut faire ressortir également les conséquences politiques de la crise de février.

J’ai déjà mentionné que quelques partis de l’ancien Front National se trouvaient entièrement sous l’influence de la réaction et sont devenus ses instruments. J’ai dit que le gouvernement complété et reconstitué, constitue l’expression du Front National renouvelé.

Il faut encore ajouter que seuls les partis politiques renouvelés et les organisations se trouvant en dehors des partis peuvent faire partie du Front National renouvelé.

Il est indispensable que les agents de la réaction soient éliminés de ces partis et de ces organisations.

Nous avons le devoir envers notre peuple dans les villes et dans la campagne d’effectuer ces tâches. Nous le devons également à la nation et à la République. Nous sommes obligés de le faire si nous voulons garantir l’évolution tranquille et libre ainsi que l’indépendance de notre République.

Cette épuration de notre vie publique s’effectue déjà. Les comités d’action du Front National, d’origine spontanée, la réalisent. Cette action ne doit pas avoir le caractère d’une vengeance politique et d’autant moins celui d’une action par laquelle se règlent des comptes personnels.

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Le comité d’action central du Front National a émis des directives claires dans ce sens et le gouvernement l’appuiera dans ces efforts pour en surveiller l’application.

Au cours d’une telle action il est impossible d’éviter d’avance certains excès et malentendus. Je déclare formellement que dans la mesure où ils se sont manifestés, une réparation équitable sera offerte. Mais je déclare avec la même autorité : nous ne nous arrêterons pas au milieu de la route !

Les agents de la réaction qui avaient pénétré dans les postes dirigeants de notre vie publique doivent être éliminés et leur pénétration réitérée doit être empêchée. Notre peuple ne veut pas que le mois de février 1948 se répète encore une fois au bout de quelques mois.

La tempête de février a éclairci également l’horizon de notre politique étrangère. Nos réactionnaires, abusant de la liberté de parole et de manifestation, se sont permis dans ce sens des actes qui ont vraiment dépassé toutes les limites. Par les provocations systématiques, dirigé contre nos alliés, ils ont miné notre position dans le domaine de la politique étrangère et ils ont menacé ainsi la sécurité et même les bases de l’existence de la République. Ces menées ont pris fin maintenant.

Nous avons mis un terme à l’illusion que la République, au point de vue de la politique étrangère, est assise entre deux chaises. Nous disons à l’adresse de monde que la Tchécoslovaquie est et reste un membre fidèle et digne de confiance de !a famille slave et qu’elle se considère comme alliée des autres pays de démocratie populaire.

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Cette attitude n’exclut point le fait que nous voulons faire tout ce qui est en notre pouvoir, pour conserver de bonnes relations avec tous les autres Etats ce qui, bien entendu, doit se fonder sur la réciprocité. Nous ne désirons rien d’autre de leur part que des rapports commerciaux honnêtes et point d’immixtion dans nos affaires intérieures. Je pense que ce souhait est assez modeste !

Messieurs, Mesdames ! Le gouvernement complété et reconstitué du Front National renouvelé se présente à ce corps illustre pour lui soumettre son programme et sollicite votre confiance.

Quelle est la confiance du peuple envers ce gouvernement, on a pu en juger en ces jours mouvementés de février, notamment le 22 février au Congrès des Conseils d’entreprise et des organisations syndicales et les 28 et 29 février 1948 au Congrès des Agriculteurs.

Ce peuple a manifesté clairement qu’il voulait que finalement et une fois pour toutes entre dans la réalité ce principe que tout pouvoir dans cet État appartient à lui, au peuple. Vous êtes les représentants du peuple, vous connaissez à présent sa volonté. Faites donc tout pour que la volonté du peuple soit réalisée. Et le peuple vous en saura gré.


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