Accueil → Analyse → Culture → Rubriques du Petit dictionnaire philosophique de l'URSS (1955)
DEMOCRITE (vers 460-370 av. n. è.). Grand philosophe matérialiste de la Grèce antique, le premier esprit encyclopédique parmi les philosophes grecs. Lénine estime que Démocrite est le plus brillant représentant du matérialisme dans l’antiquité ; il oppose la ligne philosophique de Démocrite à celle de l’idéaliste Platon (V.).
Elève de Leucippe, Démocrite est un des fondateurs de la théorie atomiste. Ses idées hardies et révolutionnaires sur l’essence de la nature anticipèrent de plusieurs siècles le développement de la science. L’atomisme de Démocrite était cependant limité par le niveau des connaissances qui étaient alors à un stade préscientifique.
Selon Démocrite, il existe deux éléments premiers : les atomes et le vide. Les atomes, c’est-à-dire des particules matérielles, indivisibles et invariables, éternelles et perpétuellement en mouvement, ne diffèrent que par leur forme, leur grosseur, leur position et leur ordre.
Les autres propriétés telles que le son, la couleur, le goût, etc., ne sont pas propres aux atomes, elles ont un caractère conventionnel et n’existent pas « dans la nature des choses elles-mêmes ».
Il y a là en germe la fausse théorie des qualités premières et secondes des choses (V.). Les corps sont des combinaisons d’atomes ; la séparation des atomes aboutit à leur destruction. L’âme se compose d’atomes ardents, légers et sphériques.
Les innombrables atomes se meuvent éternellement dans le vide infini ; se déplaçant dans diverses directions, ils s’entrechoquent parfois et forment des tourbillons qui engendrent une pluralité des mondes. Ces mondes qui « naissent et meurent » ne sont pas l’œuvre de Dieu, mais surgissent et disparaissent naturellement et nécessairement.
Partisan d’un déterminisme proche du fatalisme, Démocrite nie le hasard qu’il attribue à l’imagination des hommes incapables d’expliquer les rapports de causalité entre les phénomènes.
Sa théorie de la connaissance présuppose que les choses émettent des substances très fines (« idoles », images) qui agissent sur les organes des sens. Bien que tous les éléments du savoir soient fournis par les sensations, ces dernières ne donnent qu’une connaissance « confuse » au-dessus de laquelle s’élève une connaissance « claire», plus subtile, qui vient de la raison et découvre les atomes et le vide.
Démocrite fut un représentant de la démocratie antique, adversaire de l’aristocratie esclavagiste. Epicure (V.) et plus tard Lucrèce (V.) continuèrent le matérialisme de Démocrite.
DESCARTES René (1596-1050). Célèbre philosophe et savant français. Descartes tranche en dualiste la question fondamentale de la philosophie, celle du rapport de la pensée à l’être. Il admet deux substances : celle du corps dont l’attribut est l’étendue et celle de l’âme dont l’attribut est la pensée ; d’où deux principes indépendants : l’un, matériel, l’autre, spirituel.
L’existence du corps et de l’âme est déterminée par une troisième substance: Dieu. Dans sa physique, Descartes soutient des thèses matérialistes. La nature, selon lui, est un amas continu de particules matérielles ; l’essence de la matière est l’étendue.
Le mouvement du monde matériel est éternel et s’effectue d’après les lois de la mécanique: il se réduit à la simple translation des particules, des atomes dans l’espace.
Marx notait que « dans sa physique, Descartes a prêté à la matière une force autocréatrice et a considéré que le mouvement mécanique en était l’acte vital… Dans les limites de sa physique la matière est la seule substance, la raison unique de l’être et de la connaissance » (Marx/Engels : Gesamtausgabe, Erste Abteilung, Bd. 3, B. 1932, S. 302).
Descartes rejetait la philosophie du moyen âge, niait l’autorité de l’Eglise.
Profondément convaincu de la puissance de la raison humaine, il voulait créer une méthode nouvelle, scientifique, de la connaissance du monde, substituer à la foi aveugle la raison et la science.
Il recourt au « doute » comme méthode de raisonnement, à l’aide de laquelle on peut se délivrer de toute idée préconçue ou notion habituelle, et établir des vérités incontestables. Il déclare qu’il doute de la justesse de nos représentations du monde comme de l’existence du monde lui-même. Mais, doutant de tout, il doit toutefois reconnaître qu’il doute, c’est-à-dire qu’il pense.
Et Descartes aboutit à cette fameuse conclusion idéaliste : « Je pense, donc je suis. » Partant ainsi du fait de l’existence de son propre « moi », il conclut que le monde extérieur existe également. Cette thèse cartésienne sera plus tard utilisée par l’idéalisme subjectif.
Dans la théorie de la connaissance, Descartes est le père du rationalisme (V.). Il estimait que les sens ne nous donnent qu’une représentation confuse des objets, et peuvent ainsi nous induire en erreur.
C’est la raison même qui conçoit la vérité, par une intuition qui lui est propre, et la justesse d’une vérité est confirmée non par la pratique et l’expérience, mais par la clarté et la netteté de nos idées. Le critérium de la vérité se trouve donc dans la raison elle-même.
Descartes fut l’auteur de la théorie idéaliste des « idées innées », telles que les idées de Dieu, de la substance corporelle et de la substance spirituelle ; sa philosophie s’efforçait de concilier la religion et la science.
Cependant, Descartes fut un éminent physicien et mathématicien de son temps.
Engels indique que « la grandeur variable de Descartes a marqué un tournant en mathématique. C’est avec elle que le mouvement et la dialectique sont entrés dans la mathématique » (« Dialectique de la nature », P. 1952, p. 264).
Descartes est le fondateur de la géométrie analytique. Ses conceptions matérialistes de la nature constituent un apport au progrès de la science et de la philosophie, mais le côté idéaliste de sa doctrine a contribué à la défense de la religion.
Sa doctrine a subi l’influence de l’idéologie bourgeoise du XVIIe siècle qui reflétait, à côté des tendances progressives de la bourgeoisie française de l’époque, la peur des masses populaires, la politique d’adaptation à la monarchie féodale.
Principaux ouvrages : « Discours de la méthode » (1637), « Méditations métaphysiques » (1641), « Principes de la philosophie » (1644), « Traité de la lumière » (1664), « Regulae ad directionem ingenii » (1701).