ARISTOTE (384-322 av. n. è.). Philosophe de la Grèce antique, « le plus grand penseur de l’antiquité » (Marx : « Le Capital », L. I, t. 2, P. 1938, p. 100). Elève de Platon (V.), Aristote a rejeté la théorie idéaliste des Idées professée par son maître, il l’a soumise à une critique serrée, où se manifeste déjà la compréhension des racines gnoséologiques de l’idéalisme en général. Selon Aristote, Platon détache l’essence de ce dont elle est l’essence, en transformant par là même le général (le concept) en une entité ; à côté du monde sensible, réel, il crée un monde à part, un monde idéal, supra-sensible.

A l’en croire, les idées, prototypes des choses, existent indépendamment de ces dernières; les choses empruntent leur existence aux idées, elles n’en sont que les reflets, les ombres, les copies imparfaites. Aristote montre que ce n’est pas en admettant des essences supra-sensibles immuables que l’on peut expliquer les causes de l’apparition et des changements des choses sensibles : « Dire que les idées sont des modèles et que tout le reste participe d’elles, c’est parler pour ne rien dire et user de métaphores poétiques. » On a déjà des éléments matérialistes de la philosophie d’Aristote. « La critique qu’Aristote fait des « Idées » de Platon, est une critique de l’idéalisme en tant qu’idéalisme en général … » (Lénine : « Cahiers philosophiques », éd. russe, p. 264).

A l’opposé de Platon, Aristote affirme que l’essence est renfermée dans les choses mêmes et que le général n’existe pas parallèlement au singulier et séparément de lui. Autrement, remarque Aristote, « il devrait exister on ne sait quel ciel en plus du ciel sensible, et de même pour le soleil, la lune et tous les autres corps célestes. Mais comment ajouter foi à des affirmations pareilles ? » Lénine indique qu’Aristote ne doutait pas de la réalité du monde extérieur, mais s’embrouillait dans la dialectique de l’universel et du singulier, du concept et de la sensation, de l’essence et du phénomène. Selon Aristote, l’idée (la forme, comme il dit) et l’objet sont inséparables.

Aristote hésite entre l’idéalisme et le matérialisme et il finit par se rallier à l’idéalisme. Chaque objet, chaque chose se compose, selon lui, de deux principes : la matière et la forme (ainsi, la statue est faite avec du bronze auquel on a imprimé une forme). Le monde repose sur un substratum passif et indéterminé : « la matière première ». Cependant, une telle matière n’existe que dans l’abstraction ; en réalité, elle est déterminée (et elle l’est pour l’éternité) par l’activité des formes, qui sont par elles-mêmes immatérielles.

La matière est la possibilité, la virtualité de l’objet ; la forme idéale est la réalité de l’objet. La possibilité devient réalité grâce au mouvement : la forme devient matérielle, la matière revêt une forme. Bien qu’Aristote relie les formes à la matière, il n’en existe pas moins, selon lui, une forme pure, c’est-à-dire dépourvue de matière et qui est la forme de toutes les formes. C’est la pensée, la raison qui « se pense elle-même », c’est Dieu.

Celui-ci joue le rôle de moteur immobile du monde, qui est un et éternel. L’univers a, selon Aristote, une forme sphérique avec, au centre, la Terre, au-dessus de laquelle se meuvent des « sphères » avec les astres qui y sont attachés.

Dans sa théorie de la connaissance (ainsi que pour une série de problèmes de la philosophie de la nature et des mathématiques), Aristote touche de près au matérialisme en défendant, à la différence de Platon, l’origine sensible du savoir.

Bien qu’Aristote hésite entre la dialectique et la métaphysique, sa philosophie accuse des éléments de la conception dialectique de la réalité. Engels a écrit qu’Aristote « avait déjà étudié les formes essentielles de la pensée dialectique » (« Anti-Dühring », P. 1950, p. 52).

En critiquant les Éléates pour leur négation du mouvement, Aristote les traite de gens « immobiles » et « antinaturels ». Il estime que la méconnaissance du mouvement entraîne inéluctablement celle de la nature.

Les éléments dialectiques de sa philosophie se manifestent avec éclat quand il aborde le problème des rapports de la possibilité et de la réalité, de la forme et du contenu, etc.

Aristote est, dans la philosophie antique, le créateur de la logique. Il s’efforce non de séparer pensée et existence, mais de relier les formes de celle-là à celle-ci, d’expliquer les catégories logiques conformément à la réalité objective. « Chez Aristote, indique Lénine, on voit partout la logique objective se confondre avec la logique subjective, mais de façon que la logique objective ressort partout » (« Cahiers philosophiques », p. 304).

Par ses vues politiques et sociales Aristote est l’idéologue des esclavagistes. Il considérait comme « naturels » l’esclavage des uns et la domination des autres. Principaux ouvrages : « Métaphysique », « Physique », « De l’âme », « Ethique », « Politique », « Catégories », « Analytiques I et II ».


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